Par une décision du 12 février 2025, le Conseil d’Etat a précisé que si l’autorité administrative ne pouvait légalement refuser la titularisation d’un agent que si les faits retenus caractérisaient des insuffisances dans l’exercice des fonctions et la manière de servir de l’intéressé, la seule circonstance que les faits établissant l’insuffisance professionnelle de l’agent étaient antérieurs à la période de stage n’était pas de nature à faire obstacle à ce qu’ils justifiaient d’un tel refus.
En l’espèce, le Président du CNRS avait refusé de titulariser une agente dans le corps des chargés de recherche et l’a licenciée à l’issue de son stage probatoire, au regard d’une enquête interne[1], réalisée à la suite de dénonciations publiques de plagiat à l’encontre de l’agent. Cette enquête, bien qu’écartant les accusations de plagiat, révélait de graves manquements aux obligations déontologiques, notamment s’agissant de la citation des sources dans la rédaction de ses articles scientifiques qui avaient été publiés avant son recrutement au sein du CNRS.
En première instance comme en appel, les juridictions du fond ont considéré que le licenciement revêtait un caractère disciplinaire, dès lors qu’il était fondé exclusivement sur des faits commis antérieurement au stage[2], de sorte que l’absence de mise en œuvre de l’ensemble de la procédure disciplinaire entrainait l’annulation de la décision de licenciement.
Saisi par le CNRS, le Conseil d’Etat devait trancher la question de savoir si un refus de titularisation fondé sur l’insuffisance professionnelle pouvait être fondé sur des faits commis avant à la période de stage.
Il a répondu positivement. Après avoir rappelé qu’une décision de refus de titularisation pouvait être fondée sur des faits caractérisant à la fois une insuffisance professionnelle mais aussi des fautes disciplinaires, dès lors que l’agent est mis à même de faire valoir ses observations[3], la Haute juridiction juge que « la seule circonstance que les faits établissant l’insuffisance professionnelle de l’agent à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé soient antérieurs à la période du stage n’est pas de nature à faire obstacle à ce qu’ils justifient une décision de refus de titularisation ».
Elle censure alors la Cour administrative d’appel de Paris pour erreur de droit pour avoir jugé que les faits reprochés à l’agent ne pouvaient justifier un refus de titularisation au seul motif qu’ils étaient antérieurs à la période de stage.
Selon le rapporteur public qui s’est prononcé sur cette affaire, l’administration devait « pouvoir se fonder sur des faits antérieurs au stage pour refuser la titularisation, dès lors que celle-ci constitue la dernière phase du recrutement et que l’exigence du mérite doit donc s’y manifester de la manière la plus nette et la plus efficace »[4].
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[1] Conclusions du rapporteur public, N. Labrune, sous CE 12 février 2025, n° 494075.
[2] CAA Paris, 6 mars 2024, n° 23PA03301.
[3] CE, 24 février 2020, Commune de Marmande, n° 421291, aux Tables.
[4] Conclusions du rapporteur public, N. Labrune, sous CE 12 février 2025, n° 494075.