le 09/07/2015

Le permis de construire de l’îlot Rivoli de la Samaritaine est sauvé

CE, 19 juin 2015, Société Grands magasins de la Samaritaine - maison Ernest Cognacq, n° 387061

Le 19 juin 2015, le Conseil d’Etat a mis fin au feuilleton juridictionnel concernant la réhabilitation du célèbre grand magasin de la Samaritaine. Ce dernier n’en est pas à sa première polémique. En effet, si certains de ses éléments constitutifs ont été classés au titre des monuments historiques en 1990, la construction de l’une de ses façades avait déjà fait scandale en 1905.

Un siècle plus tard, c’est le projet de réhabilitation porté par le groupe LVMH et en particulier sa nouvelle façade ondulante en verre haute de 25 mètres et large de 73 mètres, donnant sur la rue de Rivoli, qui a été au cœur des débats.

Le Maire de Paris a autorisé le projet par un permis de construire du 17 décembre 2012.

Ce permis de construire a immédiatement été attaqué par deux associations qui dénonçaient, entre autres, une violation des dispositions de l’article UG 11.1 du plan local d’urbanisme (PLU) de la Ville de Paris portant sur l’intégration des constructions nouvelles dans l’urbanisme existant.

Le Tribunal administratif, puis la Cour administrative d’appel de Paris, sur conclusions contraires de son Rapporteur public, avaient fait droit à leur demande d’annulation du permis en jugeant que les dispositions de cet article imposaient que les constructions nouvelles prennent en compte « les caractéristiques des façades et couvertures des bâtiments voisins, en termes d’ornementation, de matériaux et de coloris, ainsi que celles du site dans lequel elle s’insère, tout particulièrement lorsque celui-ci constitue un ensemble architectural cohérent ».

Dans sa décision rendue le 19 juin 2015, le Conseil d’Etat casse l’arrêt de la Cour administrative d’appel, estimant que celle-ci a commis une erreur de droit en adoptant une vision excessivement restrictive des dispositions du PLU. Selon le Conseil d’Etat, la Cour aurait dû prendre en considération les dispositions de l’article UG.11.1.3 qui précisent expressément que « l’objectif d’intégration dans le tissu urbain existant ne doit pas conduire à un mimétisme architectural ou faire obstacle à des projets d’architecture contemporaine ».

Statuant ensuite au fond, le Conseil d’Etat précise le contrôle du Juge en matière d’insertion des constructions projetées dans le tissu urbain parisien, tel qu’elle est encadrée par les dispositions de l’article UG 11 du PLU, estimant que « le Juge doit tenir compte de l’ensemble des dispositions de cet article et de la marge d’appréciation qu’elles laissent à l’autorité administrative pour accorder ou refuser de délivrer une autorisation d’urbanisme ; qu’à cet égard, il résulte en particulier des dispositions précédemment citées de l’article UG 11 qu’elles permettent à l’autorité administrative de délivrer une autorisation de construire pour édifier une construction nouvelle présentant une composition différente de celle des bâtiments voisins et recourant à des matériaux et teintes innovants, dès lors qu’elle peut s’insérer dans le tissu urbain existant ».

Le Conseil d’Etat valide ainsi définitivement le projet de réhabilitation de la Samaritaine et en particulier sa façade en verre, compte tenu notamment de l’hétérogénéité stylistique des bâtiments du quartier (Haussmannien, Art Nouveau, Art Déco) et de l’usage répandu du verre dans les lieux avoisinants.

Par cette décision, le Conseil d’Etat interprète ainsi de façon plus ouverte les dispositions de l’article UG 11 du PLU de Paris. Il laisse ainsi à l’autorité administrative une latitude plus importante pour accepter les demandes d’autorisation d’urbanisme au regard de l’insertion des constructions nouvelles dans le tissu urbain existant.