le 11/10/2016

L’administration réduit considérablement le champ d’application de la TVA sur marge en matière de ventes immobilières

Question/Réponse ministérielle n° 94061 du 30 août 2016 de Madame Laure De La Raudière

Lorsqu’elles sont réalisées par des assujettis en tant que tels, les cessions portant sur des immeubles entrent dans le champ d’application de la TVA – art. 256 II 1° du Code général des impôts (CGI).

Bien qu’elles entrent dans le champ d’application de la TVA, sont exonérées de cette taxe, les cessions de terrains non à bâtir et d’immeubles achevés depuis plus de cinq ans, l’assujetti cédant pouvant cependant opter pour le paiement de la taxe (art. 261-5 du CGI).

Sont corrélativement imposables de plein droit les livraisons, réalisées par un assujetti, de terrains à bâtir au sens de l’article 257-I-2-1° du CGI ainsi que d’immeubles bâtis dans les cinq ans qui suivent leur achèvement.

Lorsqu’elles sont soumises à la TVA en applications des principes ci-dessus exposés, sont taxées sur la marge lorsque leur acquisition n’a pas ouvert droit à déduction :

  • les livraisons de terrains à bâtir ;
  • les livraisons d’immeubles bâtis achevés depuis plus de cinq ans en cas d’exercice de l’option pour la taxation.

La marge est déterminée par la différence entre, d’une part, toutes les sommes et charges dues auprès du cédant par le cessionnaire, diminuées de la TVA afférente à la marge elle-même et, d’autre part, le prix d’achat supporté par l’assujetti revendeur.

Par hypothèse, n’a pas ouvert droit à déduction au sens de l’article 268 du CGI, une acquisition d’immeuble réalisée auprès de personnes non assujetties ou auprès de personnes assujetties qui n’ont pas agi en tant que telles, ou encore dont la livraison était exonérée de TVA sur le fondement du 5 de l’article 261 du CGI et qui n’ont pas formulé l’option prévue au 5° bis de l’article 260 du CGI.

Selon la doctrine administrative, (BOI-TVA-IMM-10-20-10) il y a lieu de considérer que le cédant n’a pu disposer d’un droit à déduction lors de l’acquisition lorsqu’ aucun montant de taxe déductible ne figurait dans l’acte d’acquisition ou dans tout autre document valant facture au sens du a du 1 du II de l’article 271 du CGI, alors même que son vendeur aurait néanmoins acquitté de la TVA sur la marge.

Il n’y a en outre lieu de rechercher le régime de l’acquisition aux fins de déterminer la base d’imposition que pour les seules livraisons d’immeubles acquis et revendus en gardant la même qualification, c’est-à-dire respectivement :

  • de terrains à bâtir qui ont été acquis précédemment comme terrains n’ayant pas le caractère d’immeubles bâtis ;
  • ou d’immeubles achevés depuis plus de cinq ans qui ont été acquis précédemment en l’état d’immeuble déjà bâti.

A cet égard, selon une réponse ministérielle récente (rép. DE LA RAUDIERE, JOAN du 30 aout 2016, n° 94061), l’article 268 du CGI prévoit que la cession d’un terrain à bâtir est soumise à la TVA sur la marge lorsqu’il n’a pas ouvert droit à déduction lors de son acquisition initiale. La mise en œuvre de ce régime dérogatoire au principe selon lequel la TVA est calculée sur le prix total suppose ainsi nécessairement que le bien revendu soit identique au bien acquis quant à ses caractéristiques physiques et sa qualification juridique. Ainsi, en cas de division parcellaire intervenue entre l’acquisition initiale et la cession ayant entraîné un changement de qualification ou un changement physique, telle une modification des superficies vendues par rapport à l’acte d’acquisition, la taxation doit se faire sur le prix de vente total en application des articles 266 et 267 du CGI. En revanche, lorsque la division parcellaire est antérieure à l’acte d’acquisition initial ou qu’un document d’arpentage a été établi pour les besoins de la cession, permettant d’identifier les différentes parcelles dans l’acte, la taxation sur la marge s’applique dès lors qu’aucun changement physique ou de qualification juridique des parcelles cédées n’est intervenu avant la revente.

Cette interprétation de l’administration fiscale apparait critiquable au regard de la lettre de l’article 268 du CGI et dans la mesure où elle empêche l’application du régime de TVA sur marge dans des hypothèses où il a précisément vocation à s’appliquer (opérations d’aménageurs, de lotisseurs et de marchands de biens).

Cependant, en l’absence de décision jurisprudentielle à ce jour sur ce point, les opérateurs désireux de sécuriser les modalités de taxation de leurs cessions devront se conformer à l’interprétation contenue dans la réponse « De La Raudière ».