le 06/07/2018

L’absence de délivrance d’un permis de construire pour les éoliennes soumises à autorisation ne va pas à l’encontre du principe de non régression

CE, 14 juin 2018, n° 409227

Par une décision n°409227 rendu le 14 juin 2018, le Conseil d’Etat, à qui il était demandé d’annuler le décret n°2017-81 du 26 janvier 2017, est venu en confirmer la légalité.

Ce décret permet d’exempter les éoliennes de la demande d’un permis de construire lorsqu’elles sont soumises à autorisation.

La loi dite Grenelle 2 n° 2010-788 du 12 juillet 2010 prévoyait que les éoliennes se voyaient soumises au régime de l’autorisation ICPE en modifiant l’ancien article L. 553-1 du Code de l’environnement, nouvellement L. 515-44 depuis l’ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 (article 5).

Par la suite, l’ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 (article 1) est venu mettre en place une autorisation unique dite autorisation environnementale, à laquelle les éoliennes sont soumises au regard de l’article L. 515-44 précité.

Le décret contesté prévoit à son article 11 l’introduction d’un article R425-29-2 au Code de l’urbanisme qui énonce que :

« Lorsqu’un projet d’installation d’éoliennes terrestres est soumis à autorisation environnementale en application du chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l’environnement, cette autorisation dispense du permis de construire ».

Dans cette affaire, les requérants demandaient à titre principal l’annulation de l’article 11 du décret et, à titre subsidiaire, l’annulation intégrale de ce décret. Pour justifier leur demande d’annulation pour excès de pouvoir, les requérants se sont fondés sur le principe de non régression prévu à l’article L. 110-1 du Code de l’environnement :

« 9° Le principe de non-régression, selon lequel la protection de l’environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’environnement, ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment. »

Ces derniers considéraient en effet que la dispense de permis de construire pour l’installation d’une éolienne soumise à l’autorisation environnementale venait réduire les contraintes applicables à ces projets. L’importance pour ces associations du maintien de la nécessité d’un permis de construire, qui est un document réglementant l’urbanisme, est justifiée par le fait que c’est principalement pour des questions d’urbanisme que les projets de créations d’éoliennes se voient contestés.

Le Conseil d’Etat a rejeté les arguments des associations en considérant que la dispense de permis de construire ne conduit pas à déroger au respect des règles d’urbanisme :

« Si l’article R. 425-29-2 introduit dans le code de l’urbanisme par le décret attaqué dispense les projets d’installation d’éoliennes terrestres soumis à autorisation environnementale de l’obtention d’un permis de construire, il n’a, en revanche, ni pour objet ni pour effet de dispenser de tels projets du respect des règles d’urbanisme qui leurs sont applicables. Les dispositions citées aux points 5 et 6 mettent à la charge de l’autorité administrative, à l’occasion de l’instruction de la demande d’autorisation environnementale, l’examen de la conformité des projets d’installations d’éoliennes aux documents d’urbanisme applicables. Le moyen tiré de ce que le décret attaqué méconnaîtrait le principe de non-régression posé par l’article L. 110-1 du code de l’environnement au motif qu’il dispenserait ces projets du respect des règles d’urbanisme qui leurs sont applicables ne peut donc qu’être écarté. »

 Le Conseil d’Etat justifie donc le respect des règles d’urbanisme en renvoyant au décret n°2017-82 du 26 janvier 2017 qui crée l’article article D. 181-15-2 du code de l’environnement qui prévoit que, pour les installations terrestres de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent, un document doit établir que le projet respecte les documents d’urbanisme.

Par cette décision, le Conseil d’Etat interprète concrètement le principe de non régression. La position du Conseil d’Etat reste donc dans la droite lignée d’un arrêt récent rendu le 8 décembre 2017 (n° 404391).

Dans cet arrêt ; le Conseil d’Etat avait considéré que l’examen au cas par cas d’un certain type de projet soumis antérieurement à une évaluation environnementale systématique ne méconnaissait pas le principe de non régression en ce qu’il soumet concrètement les projets susceptibles d’avoir un impact néfaste sur l’environnement à une évaluation selon l’article L. 122-1 du Code de l’environnement.

Par conséquent, la dispense de permis de construire ne contrevient pas, à lui seul, au principe de non régression.