le 09/12/2021

La responsabilité de la société ENEDIS en cas de dysfonctionnement dans la fourniture d’électricité

CAA Rennes, 2ème, 26 novembre 2021, n° 18/04444

Le juge judiciaire précise dans cette affaire la responsabilité de la société ENEDIS en cas de dysfonctionnement dans la fourniture d’électricité.

Les demandeurs ont assigné les sociétés EDF et ENEDIS aux fins d’obtenir l’annulation de plusieurs factures d’électricité émises sur une période pendant laquelle ils ont subi des dysfonctionnements et sollicitent également l’indemnisation de leurs préjudices moral et de jouissance.

Par un jugement du 16 mai 2018, le Tribunal de grande instance de Brest a rejeté la demande d’annulation des factures contestées, mais a condamné les sociétés EDF et ENEDIS à indemniser les préjudices moraux et de jouissance subis par les demandeurs.

Après avoir rappelé que seule la société Enedis a la charge de l’exploitation et de la maintenance du réseau d’électricité, le juge d’appel relève que les perturbations provenaient d’une fourniture de tension insuffisante ne permettant pas de faire fonctionner l’ensemble des appareils électriques équipant le logement des demandeurs. En l’absence de coupure d’électricité imputable au fournisseur EDF, la Cour d’appel de Rennes rejette la demande d’annulation des factures émises par EDF aux motifs que les factures litigieuses correspondent à des consommations réelles de l’électricité fournie par la société EDF, malgré les dysfonctionnements du réseau géré par la société Enedis.

Les sociétés EDF et Enedis contestaient également leur responsabilité au titre des préjudices moral et de jouissance consécutifs à l’insuffisance du réseau.

Pour contester sa condamnation, la société Enedis se prévalait du fait que la maîtrise d’ouvrage des travaux de renforcement du réseau, résultant du surcroît de demande énergétique générée par les travaux réalisés par les demandeurs, ne relevait pas de sa compétence mais de celle du Syndicat d’énergie du Finistère conformément à l’article 9 du cahier des charges du contrat de concession conclu avec celui-ci. Le domicile des demandeurs relevant du régime basse tension, les travaux de renforcement avaient été réalisés sous la maîtrise d’ouvrage du Syndicat. Ce faisant, Enedis estimait qu’il ne pouvait lui être reproché une quelconque carence alors qu’elle n’était pas en capacité de remédier à la difficulté générée par le réseau basse tension.

Sur ce point, la Cour relève d’abord que les relations contractuelles entretenues par la société Enedis avec le Syndicat départemental d’énergie n’étaient pas opposables aux demandeurs. Une telle conclusion nous semble étonnante dans la mesure où le contrat de concession régit les relations avec les usagers du service public de la distribution d’électricité.

En tout état de cause, et surtout, la Cour rappelle que, indépendamment du contrat de concession conclu avec le Syndicat départemental d’énergie, Enedis « reste l’interlocuteur direct du particulier client ».

Ainsi, dès lors que le gestionnaire avait diagnostiqué la nécessité d’un renforcement du réseau de distribution publique pour améliorer la qualité de la fourniture d’électricité, Enedis ne pouvait se contenter de renvoyer les demandeurs « au contact du syndicat pour connaître de la suite donnée à la demande de renforcement du réseau sans s’assurer elle-même de l’avancement du dossier de façon à réduire le préjudice généré par les dysfonctionnements affectant leur installation électrique ».

La Cour confirme donc la condamnation prononcée par le Tribunal de grande instance de Brest à l’encontre de la société Enedis dès lors que « la société Enedis gestionnaire du réseau de distribution d’électricité, chargée en conséquence, d’assurer une mission d’acheminement de l’énergie électrique, ne peut s’exonérer de sa responsabilité contractuelle à l’égard des [demandeurs] au motif qu’elle n’aurait pas la maîtrise d’ouvrage des opérations de renforcement du réseau qui reviendrait au Syndicat départemental d’énergie du Finistère ».