Environnement, eau et déchet
le 07/10/2022
Pauline DELETOILLEPauline DELETOILLE

La preuve de dépôt par voie électronique d’une déclaration d’ICPE est une décision qui fait grief

CE, avis, 15 septembre 2022, M. F., n° 463612, mentionné aux tables du recueil Lebon

Le Conseil d’Etat était saisi par le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de la question suivante :

« La preuve de dépôt d’une déclaration d’une installation classée pour la protection de l’environnement, prévue à l’article R. 512-48 du Code de l’environnement, est-elle une décision susceptible de faire l’objet d’un recours devant le juge administratif, au sens des articles L. 514-6 et L. 512-8 du même Code ? ».

A titre préalable, il convient de rappeler que plusieurs régimes permettent l’exploitation d’une ICPE : l’autorisation, l’enregistrement et la déclaration.

Le régime de déclaration s’applique aux installations qui, sans présenter de graves dangers ou inconvénients pour l’environnement, la sécurité ou la santé des populations voisines justifiant qu’elles soient soumises à autorisation, doivent néanmoins respecter les prescriptions générales édictées par le préfet (art. L. 512-8 du Code de l’environnement). L’article L. 514-6 du Code de l’environnement précise que les décisions prises, notamment, en application de l’article L. 512-8 du même Code sont soumises à un contentieux de pleine juridiction.

Dans l’état du droit antérieur au décret n° 2015-1614 en date du 9 décembre 2015, le préfet donnait récépissé de la déclaration et communiquait au déclarant une copie des prescriptions générales applicables à l’installation. La déclaration était effective dès lors que le dossier de déclaration était régulier et complet et que l’installation pour laquelle était déposée le dossier relevait bien de ce régime (art. L. 512-9 du Code de l’environnement, ancienne rédaction).

Le décret n° 2015-1614 du 9 décembre 2015 modifiant et simplifiant le régime des installations classées pour la protection de l’environnement et relatif à la prévention des risques a opéré une dématérialisation et simplification de la procédure de déclaration des ICPE.

La référence au récépissé est supprimée. Ainsi, le nouvel article R. 512-48 du Code de l’environnement dispose qu’ « il est délivré immédiatement par voie électronique une preuve de dépôt de la déclaration » par le préfet de département.

Ce changement de rédaction a pu faire naître des interrogations quant à la portée juridique de la preuve de dépôt par voie électronique (notamment sur le point de départ du commencement d’exploitation de l’ICPE). Il était donc intéressant que le Conseil d’Etat puisse se prononcer sur cette question.

Tout d’abord, la Haute juridiction énonce que « la délivrance par voie électronique de la preuve de dépôt de la déclaration relative à une installation, se substitue à la délivrance du récépissé de déclaration prévue par la réglementation antérieure ».

Ensuite, « cette déclaration conditionne toujours la mise en service par le déclarant de l’installation classée projetée ».

Enfin, « le préfet est tenu de délivrer la preuve de dépôt dès lors que le dossier de déclaration est régulier et complet et que l’installation pour laquelle est déposée la déclaration relève bien de ce régime ».

En alignant les deux régimes, le Conseil d’Etat énonce que les nouvelles dispositions issues du décret du 9 décembre 2015 « ne modifient ni la nature ni la portée de la déclaration d’une installation classée soumise à ce régime ».

Par conséquent, « la preuve de dépôt d’une déclaration d’une ICPE prévue à l’article R. 512-48 du code de l’environnement est constitutive d’une décision faisant grief susceptible de faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant les juridictions administratives par application des articles L. 512-8 et L. 514-6 du Code de l’environnement ».