le 14/10/2015

La portée du principe d’incessibilité des titres d’occupation du domaine public

CE, 18 septembre 2015, Société Prest’air, n° 387315

Par un arrêt en date du 18 septembre 2015, le Conseil d’Etat a jugé qu’ « il ne peut y avoir transfert d’une autorisation ou d’une convention d’occupation du domaine public à un nouveau bénéficiaire que si le gestionnaire de ce domaine a donné son accord écrit », et admet ainsi qu’une convention d’occupation du domaine public peut être cédée, alors même qu’elle présente par définition un caractère personnel ; caractère personnel qui a longtemps conduit le Juge administratif à considérer qu’un titre d’occupation du domaine public était incessible (CE, 6 novembre 1998, Association amicale des bouquinistes des quais de Paris, n° 171317 ; voir également CAA Marseille, 26 juin 2012, Mme Rolande A. et Mme Danièle A. épouse B., n° 10MA03095 ; CAA Bordeaux, 8 décembre 2011, Mme Claudette X., n° 10BX02755).

Récemment encore, certaines juridictions administratives ont pu considérer qu’« il n’appartient pas à l’administration de donner au titulaire d’une autorisation d’occupation du domaine public maritime, laquelle est, en raison de la nature même du domaine public, strictement personnelle et révocable, l’autorisation de transférer cette autorisation », laissant ainsi à penser que l’administration ne pouvait pas autoriser le titulaire d’une autorisation d’occupation du domaine public à la céder à un tiers, et donc que les autorisations d’occupation du domaine public ne pouvaient jamais être cédées, même avec l’accord de l’administration (CAA Marseille, 15 mai 2003, Commune de Saint-Laurent-du-Var, n° 00MA00118 ; voir également CE, 10 mai 1989, Munoz, n° 73146).

Des décisions du Conseil d’Etat plus récentes admettaient toutefois la faculté d’une cession des conventions d’occupation du domaine public, tout en la conditionnant à la circonstance qu’elle soit prévue dans le titre d’occupation lui-même (CE, 10 janvier 2011, Ville de Paris, n° 323831 ; voir également en ce sens CE, 6 octobre 1997, Mme Anita X., n° 172904).

L’arrêt du Conseil d’Etat du 18 septembre dernier va donc plus loin encore : à le suivre, la personne publique gestionnaire du domaine peut autoriser la cession d’un titre d’occupation du domaine public, sans qu’il soit pour cela besoin que le titre lui-même envisage cette possibilité. La portée du principe d’incessibilité des autorisations d’occupation du domaine public s’en trouverait donc réduite à l’hypothèse dans laquelle le gestionnaire du domaine n’a pas autorisé le transfert du titre. Et il faut bien reconnaître que cette acceptation pragmatique du principe d’incessibilité serait plus conforme à la pratique qui entoure les occupations temporaires du domaine public que celle qui s’imposait jusqu’à présent.