le 14/04/2016

La conclusion d’une DSP sans publicité ni mise en concurrence préalables est possible en cas d’urgence

CE, 4 avril 2016, Communauté d'agglomération du centre de la Martinique, n° 396191

Le décret n° 2016-360 en date du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, reprenant ainsi la possibilité déjà offerte par feu le Code des marchés publics, prévoit un mécanisme de passation des marchés publics en cas d’urgence.

Aucun dispositif similaire n’était prévu en matière de délégation de service. Les nouveaux textes (ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession et décret n° 2016-86 du 1er février 2016 relatif aux contrats de concession) ne prévoient d’ailleurs pas plus d’avancée en la matière.

Or, les autorités concédantes, pour des raisons diverses sont parfois confrontées à des situations remettant en cause la continuité du service public, comme par exemple la défaillance financière de leur délégataire. Or, la passation d’un contrat de délégation de service public, en urgence, permettant d’assurer la continuité du service public n’est pas prévue par les textes.

C’est cette carence que le Conseil d’Etat vient de pallier tout récemment dans une décision rendue le 4 avril dernier, en jugeant qu’« en cas d’urgence résultant de l’impossibilité soudaine dans laquelle se trouve la personne publique, indépendamment de sa volonté, de continuer à faire assurer le service par son cocontractant ou de l’assurer elle-même, elle peut, lorsque l’exige un motif d’intérêt général tenant à la continuité du service public, conclure, à titre provisoire, un nouveau contrat de délégation de service public sans respecter au préalable les règles de publicité prescrites ».

Néanmoins, cette possibilité est encadrée. Ainsi, la durée du nouveau contrat ne peut excéder « celle requise pour mettre en œuvre une procédure de publicité et de mise en concurrence, si la collectivité entend poursuivre la délégation du service, ou, au cas contraire, pour organiser les conditions de sa reprise en régie ou pour en redéfinir la consistance ».

En l’espèce, la Communauté d’agglomération du centre de la Martinique avait conclu avec la société Clichy Dépannage, reprise par la société Caraïbes Développement, un contrat de délégation de service public portant sur la gestion et l’exploitation de la fourrière de véhicules. Cet avenant avait toutefois été supprimé par la communauté d’agglomération, alors même qu’il avait été signé, et celle-ci avait conclu une convention d’exploitation provisoire sans respecter les dispositions des articles L. 1411-1 et suivants du Code général des collectivités territoriales.

Non choisie par la Communauté d’agglomération, la société Caraïbes Développement a saisi le Juge du référé contractuel d’une demande tendant à l’annulation de ce nouveau contrat, lequel a fait droit à sa demande. Saisi d’un pourvoi en cassation, le Conseil d’Etat annule néanmoins le nouveau contrat conclu car la Communauté d’agglomération pouvait en réalité légitimement conclure l’avenant de prolongation et ne justifiait ainsi pas de l’urgence indépendante de sa volonté à conclure une nouvelle convention sans publicité ni mise en concurrence préalables.