le 03/12/2015

L’exploitant d’une ICPE peut se voir imposer des prescriptions complémentaires visant à assurer la protection de la ressource en eau lorsque ces prescriptions sont en rapport direct ou indirect avec son activité

CE, 17 avril 2015, n° 368397

Le 17 avril 2015, le Conseil d’Etat a rendu une décision, mentionnée aux tables du recueil Lebon, portant sur l’articulation des règles applicables aux ICPE et celles qui visent à assurer la protection des milieux aquatiques.

Dans cette espèce, la Société Porteret Beaulieu Industrie exploitait sur le territoire de la commune de Bezouotte (Côte-d’Or) une usine de fabrication de cartons, papier, joints, isolants thermiques, textiles, plaques et poudres filtrantes, en vertu d’un arrêté d’autorisation du 2 juillet 2004 portant sur 12 activités différentes relevant de la nomenclature des ICPE. Par arrêté complémentaire en date du 26 janvier 2010, le Préfet de la Côte d’Or enjoignait la Société de contrôler la présence dans les eaux rejetées par son installation de dix substances, à raison d’une fois par mois pendant six mois. Une demande d’annulation de cet arrêté a été portée devant la juridiction administrative.

Après un rappel des dispositions spécifiquement applicables aux ICPE, et plus particulièrement à celles soumises à autorisation, le Juge administratif reprend les dispositions de l’article L. 214-7 du Code de l’environnement, qui soumet les ICPE aux dispositions relatives à la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau (article L. 211-1 et L. 212-1 à L. 212-11 du Code de l’environnement). Le Juge rappelle alors également qu’aux termes de l’article L. 211-1 la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau « […] vise à assurer : / (…) / 2° La protection des eaux et la lutte contre toute pollution par déversements, écoulements, rejets, dépôts directs ou indirects de matières de toute nature et plus généralement par tout fait susceptible de provoquer ou d’accroître la dégradation des eaux en modifiant leurs caractéristiques physiques, chimiques, biologiques ou bactériologiques, qu’il s’agisse des eaux superficielles, souterraines ou des eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales […] ». Il se réfère en outre aux dispositions de l’article R. 512-28 du Code de l’environnement selon lequel les arrêtés complémentaires pris à l’encontre des ICPE soumises à autorisation, peuvent prescrire des mesures au regard des objectifs mentionnés à l’article L. 211-1 du Code de l’environnement notamment.

Au regard de ces dispositions, le Conseil d’Etat précise alors que « si les ouvrages et installations nécessaires à l’exploitation d’une installation classée pour la protection de l’environnement ayant un impact sur le milieu aquatique ne sont soumis qu’aux règles de procédure instituées par la législation propre à ces installations classées, ils doivent, en revanche, respecter les règles de fond prévues, notamment, par les dispositions du Code de l’environnement relatives aux objectifs de qualité et de quantité des eaux, au nombre desquelles figurent les objectifs et normes de qualité du programme national d’action contre la pollution des milieux aquatiques par certaines substances dangereuses prévus par les articles R. 211-11-1 à R. 211-11-3 du Code de l’environnement ».

A ce titre, et après s’être assuré que les prescriptions de l’arrêté complémentaire attaqué étaient en rapport avec l’activité de l’exploitant et que l’obligation qui en découlait de contrôler la présence, dans les eaux rejetées par son installation, de substances qui soient directement ou indirectement issues de cette installation (en l’espèce des polluants identifiés comme étant caractéristiques de certaines activités de l’industrie papetière), le Juge a refusé de faire droit à la demande d’annulation de la Société requérante.