Par un arrêté du 30 décembre 2021, le Préfet d’Ille-et-Vilaine a autorisé, par voie d’enregistrement, l’exploitation d’une unité de méthanisation sur la commune de Bourg-des-Comptes, au lieu-dit Le Vaugouët. Ce projet, porté par la société Agri-Bioénergies, rassemble plusieurs exploitants agricoles locaux et vise la production de biométhane injecté dans le réseau GRDF, à partir de matières organiques issues des exploitations partenaires.
Plusieurs particuliers riverains et l’association « Comité de protection du cadre de vie de Bourg-des-Comptes » ont introduit un recours devant le Tribunal administratif de Rennes contre l’arrêté d’enregistrement de cette exploitation. Leurs griefs portaient notamment sur l’absence d’évaluation environnementale, l’insuffisance du dossier d’enregistrement, l’existence de risques pour la santé publique et l’environnement ainsi que la méconnaissance du principe de précaution. Le tribunal ayant rejeté leur demande, les requérants ont interjeté appel devant la Cour administrative de Nantes.
S’agissant du bien-fondé du jugement, la Cour a rejeté l’intégralité des moyens soulevés par les requérants. Celle-ci a d’abord rappelé l’office du juge amené à se prononcer sur une décision d’enregistrement. Elle a précisé que cette décision était soumise à un contentieux de pleine juridiction et que le juge devait donc apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d’autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l’autorisation et le respect des règles de fond au regard des circonstances applicables à la date à laquelle il se prononce.
Ce principe ainsi rappelé, la Cour a alors considéré, en premier lieu, qu’il n’était pas démontré que le projet aurait dû être soumis à une procédure d’autorisation environnementale comme le permet l’article L. 512-7-2 du Code de l’environnement lorsque le site présente une sensibilité particulière. Elle a également considéré que le dossier présenté était complet au regard des dispositions alors applicables de même que la consultation du public était régulière.
En deuxième lieu, la Cour s’est prononcée sur le bien-fondé de l’arrêté préfectoral :
- S’agissant des capacités financières de la société pétitionnaire, la Cour a jugé que cette dernière avait justifié de la pertinence des modalités selon lesquelles elle prévoyait de disposer de capacités financières suffisantes. Le financement du projet était cohérent et justifié, intégrant apports, subventions (ADEME, FEDER) et emprunts.
- Concernant la méconnaissance des intérêts mentionnés à l’article L. 511-1 du Code de l’environnement et l’existence de risques pour la santé publique et l’environnement, la Cour a jugé que l’étude de dangers du dossier d’enregistrement a évalué les risques pour la sécurité publique s’agissant notamment de ses impacts sur les infrastructures voisines (oléoduc, gazoduc) et que ceux-ci étaient limités, le seul risque d’explosion identifié étant considéré comme improbable. En outre, l’aménagement de l’unité de méthanisation permettait de préserver l’environnement de tout rejet dans le milieu naturel de pollutions organiques grâce à des dispositifs de sécurité et de confinement (bassins, zones de rétention, silos étanches, etc.).
- Enfin, concernant l’atteinte au principe de précaution invoquée par les requérants, La Cour a rappelé que ce principe suppose un risque de dommage grave et irréversible à l’environnement, ce qui n’était pas établi en l’espèce, en raison de la maîtrise du processus de méthanisation, des aménagements prévus et de l’absence de menace avérée pour l’environnement ou la santé.
La Cour administrative d’appel de Nantes a ainsi confirmé la validité de l’arrêté préfectoral autorisant l’enregistrement de l’unité de méthanisation. Elle a réaffirmé le cadre juridique applicable aux installations classées relevant du régime d’enregistrement et le rôle du juge du plein contentieux dans l’appréciation des risques et des garanties techniques et financières.
Cette décision illustre l’équilibre que le juge administratif s’efforce de maintenir entre la promotion des projets de transition énergétique et la protection de l’environnement et des populations riveraines.