le 15/10/2020

Insalubrité et recouvrement des frais engagés après un changement de propriétaire

CE, 28 septembre 2020, n° 429980, mentionné aux tables du recueil Lebon

Cette décision intéressante revient sur les hypothèses de recouvrement par la Commune du coût de travaux réalisés d’office en raison de propriétaires défaillants, et plus précisément lorsque des changements de propriétaires sont survenus au cours du processus.

A l’encontre de quel propriétaire, celui défaillant à exécuter les mesures prescrites par un arrêté, ici préfectoral, dans le délai impartis, ou celui propriétaire au moment du recouvrement effectif, la Commune peut-elle choisir d’émettre ses titres exécutoires ?

C’est à cette question que le Conseil d’Etat vient d’apporter une réponse en matière d’insalubrité, police spéciale du Préfet et non du Maire mais où la Commune peut être amenée à agir au nom de l’Etat.

En l’espèce, un Maire a mis en demeure des copropriétaires de réaliser sous un mois des travaux afin de mettre fin à l’état d’insalubrité constaté sur leur immeuble. Face à l’inertie de ces derniers, la Commune a été contrainte de les réaliser à leur frais et place.

Postérieurement à la réalisation des travaux mais avant que ne soit émis à son encontre un titre exécutoire aux fins de recouvrement des sommes engagées par la Commune, la société requérante en première instance avait cédé son bien, et n’était donc plus propriétaire. 

Le Conseil d’Etat, en se fondant notamment sur les dispositions de l’article L. 1331-29 du Code de la santé publique, retient que la Commune « est en droit de rendre débitrice de la créance qu’elle déteint la personne qui a la qualité de propriétaire ou de copropriétaire de l’immeuble à la date d’expiration du délai imparti par la mise en demeure d’exécuter les travaux ».

En d’autres termes, une Commune peut légitimement choisir de recouvrir ses créances à l’encontre du propriétaire devenu défaillant et auquel elle a dû se substituer, quand bien même il ne soit plus propriétaire au moment de l’émission du titre exécutoire correspondant. 

Par suite, « dès lors, en se fondant, pour annuler le titre exécutoire émis par la ville de Paris à l’encontre de la société Coste Royale, sur la seule circonstance que la société n’était plus copropriétaire de l’immeuble à la date à laquelle elle statuait sur son appel, la cour a commis une erreur de droit », l’arrêt est annulé et l’affaire renvoyée.

Cette solution semble transposable aux situations de péril où les articles L. 511-2-V, L. 511-3 et L. 511-4 actuellement en vigueur du Code de la construction et de l’habitation posent des principes similaires à ceux du Code de la santé publique en disposant que les frais « de toute nature » avancés par la commune, lorsque celle-ci s’est substituée aux propriétaires défaillants, peuvent être légitimement recouvrés « comme en matière de contribution directe », c’est-à-dire par l’émission de titres exécutoires.