le 06/10/2020

Evolution de la règlementation Seveso

Le 24 septembre 2020, soit un an après l’incendie s’étant produit au sein de l’usine de Lubrizol, classée SEVESO, le gouvernement a adopté deux décrets et cinq arrêtés relatifs à la règlementation des installations classées avec la volonté de tirer les conséquences de cet accident.  

  

 

Décret n° 2020-1168 du 24 septembre 2020 relatif aux règles applicables aux installations dans lesquelles des substances dangereuses sont présentes dans des quantités telles qu’elles peuvent être à l’origine d’accidents majeurs 

Décret n° 2020-1168 du 24 septembre 2020 relatif aux règles applicables aux installations dans lesquelles des substances dangereuses sont présentes dans des quantités telles qu’elles peuvent être à l’origine d’accidents majeurs 

  

Ce décret a été adopté en vue de préciser l’application de la directive 2012/18/UE du 4 juillet 2012, dite Seveso III et clarifie ainsi certains éléments et obligations en découlant, telle que l’obligation d’échange d’informations et de coopération entre exploitants voisins, les informations accessibles au public ou encore les objectifs et le contenu des plans d’opération interne (POI). Plusieurs éléments peuvent être mis en avant.  

On peut notamment relever que l’information du préfet est renforcée. Il devra notamment être informé du transfert d’une autorisation environnementale préalablement à sa réalisation et pourra s’y opposer. Le préfet pourra également solliciter de l’exploitant d’une installation faisant une déclaration d’antériorité qu’il lui communique « la production d’une étude montrant que les dangers ou inconvénients […] sont prévenus de manière appropriée », sous certaines conditions (article 4). Lors du recensement, réalisé par l’exploitant de l’installation susceptible de créer des accidents majeurs impliquant des substances dangereuses, de ces substances, le préfet devra être informé des résultats de ce recensement et pourra les communiquer à toute personne en faisant la demande, sous certaines conditions (article 5).  

Le décret définit le moment auquel le préfet doit mettre à disposition du public les informations relatives aux accidents majeurs susceptibles de se produire et aux moyens mis en œuvre pour en assurer la prévention et la réduction des conséquences. Notamment, les informations devront être mises à disposition du public avant la mise en service de l’installation ou la mise en œuvre de certaines modifications ; elles devront être disponibles en permanence (article 5).   

Les exploitants doivent coopérer entre eux. Les exploitants des installations susceptibles de créer des accidents majeurs impliquant des substances dangereuses situés à proximités les uns des autres doivent échanger des informations et coopérer « pour permettre la prise en compte de la nature et de l’étendue du danger global d’accident majeur » et assurer l’information du public et des sites voisins (article 5).  

Ce décret rend en outre obligatoire le réexamen, au moins tous les cinq ans, de l’étude de danger. Elle pourra être communiquée sur demande à toute personne, sous certaines conditions (article 5). 

Les objectifs du plan d’opération interne, qui définit les mesures d’organisation, les méthodes d’intervention et les moyens nécessaires que l’exploitant doit mettre en œuvre contre les effets des accidents majeurs, sont précisés. Il s’agit désormais de « contribuer à fournir à l’autorité compétente les informations nécessaires à l’établissement des plans d’urgence et à la détermination des mesures et des obligations incombant à l’exploitant […] » et d’« assurer, en ce qui concerne l’exploitant, la remise en état et le nettoyage de l’environnement après un accident majeur ». Ce plan doit être réalisé ou mis à jour, notamment, dans un délai raisonnable avant la mise en service d’un établissement ou à la suite d’un accident majeur (article 5).  

En outre, ce décret instaure des modifications du régime des installations relevant de certaines rubriques de la série 4000 de la nomenclature ICPE « afin de clarifier leur applicabilité dans des cas particuliers » (notice). 

  

 

Décret n° 2020-1169 du 24 septembre 2020 modifiant la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement et la nomenclature annexée à l’article R. 122-2 du code de l’environnement 

Décret n° 2020-1169 du 24 septembre 2020 modifiant la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement et la nomenclature annexée à l’article R. 122-2 du code de l’environnement 

  

Ce décret modifie les rubriques 1510, 1511, 1530, 1532, 2662 et 2663 de la nomenclature des ICPE, étendant le régime de l’enregistrement au sein de celles-ci. Les installations visées par ces rubriques sont des installations de stockage (par exemple de pneumatiques, de polymères, de bois ou matériaux combustibles analogues, etc.). Il est précisé que les modifications apportées ont pour objectif de permettre une appréhension globale des entrepôts et d’éviter les doubles classements.  

La nomenclature relative à l’évaluation environnementale des projets est également modifiée. Une distinction est opérée, au sein de la rubrique 39 du tableau annexé à l’article R. 122-2 du Code de l’environnement, entre les projets soumis à évaluation environnementale systématique en raison des surfaces construites, selon si l’implantation a lieu dans un espace artificialisé ou non. Seuls les projets de plus de 40 000 m² d’emprise au sol dans un espace non artificialisé demeurent soumis à évaluation systématique. Les projets sortant de l’évaluation systématique seront soumis à l’évaluation au cas par cas.  

Ces modifications entreront en vigueur le 1er janvier 2021. 

 

 

Arrêté du 24 septembre 2020 modifiant l’arrêté du 26 mai 2014 relatif à la prévention des accidents majeurs dans les installations classées mentionnées à la section 9, chapitre V, titre Ier, du livre V du code de l’environnement 

Arrêté du 24 septembre 2020 modifiant l’arrêté du 26 mai 2014 relatif à la prévention des accidents majeurs dans les installations classées mentionnées à la section 9, chapitre V, titre Ier, du livre V du code de l’environnement 

  

Ce texte transpose la directive Seveso 3 et s’applique aux établissements dans lesquels des substances, préparations ou mélanges dangereux sont présents dans des quantités telles qu’ils peuvent être à l’origine d’accidents majeurs.  

Cet arrêté prévoit la mise en place de mesures relatives aux comportements à adopter en cas d’incidents. A ce titre, on peut notamment relever qu’une formation devra être dispensée aux différents opérateurs et intervenants dans l’établissement sur la conduite à suivre en cas d’accident ou incident. En outre, le contenu du POI est précisé à l’annexe V de l’arrêté du 26 mai 2014 relatif à la prévention des accidents majeurs dans les installations classées ; le POI devra contenir, par exemple, « les moyens et méthodes prévus, en ce qui concerne l’exploitant, pour la remise en état et le nettoyage de l’environnement après un accident majeur ». Cette obligation entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2023 pour les établissements seuil bas (article 2).  

Cet arrêté renforce également l’information du public, son annexe IV énumérant les catégories d’informations mises en permanence à la disposition du public par voie électronique (article 3). Cette liste prévoit notamment l’information du public sur la conduite à tenir en cas d’accident majeur.   

Enfin, l’arrêté prévoit que le préfet devra être informé des produits de décomposition susceptibles d’être émis en cas d’incendie, et ce dans le cadre de l’élaboration, de la révision ou de la mise à jour de l’étude de danger. A compter du 1er janvier 2023, l’étude de danger devra ainsi mentionner les produits susceptibles d’être émis lors d’un incendie important (articles 6 et 7).  

  

Autres arrêtés adoptés le 24 septembre 

Arrêté du 24 septembre 2020 modifiant l’arrêté ministériel du 11 avril 2017 relatif aux prescriptions générales applicables aux entrepôts couverts soumis à la rubrique 1510, y compris lorsqu’ils relèvent également de l’une ou plusieurs des rubriques 1530, 1532, 2662 ou 2663 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement, ainsi que les arrêtés de prescriptions générales applicables aux installations classées soumises à enregistrement sous les rubriques nos 1511, 1530, 1532, 2662 et 2663 

Arrêté du 24 septembre 2020 relatif au stockage en récipients mobiles de liquides inflammables, exploités au sein d’une installation classée pour la protection de l’environnement soumise à autorisation 

Arrêté du 24 septembre 2020 modifiant l’arrêté ministériel du 3 octobre 2010 relatif au stockage en réservoirs aériens manufacturés exploités au sein d’une installation classée soumise à autorisation au titre de l’une ou plusieurs des rubriques nos 1436, 4330, 4331, 4722, 4734, 4742, 4743, 4744, 4746, 4747 ou 4748, ou pour le pétrole brut au titre de l’une ou plusieurs des rubriques nos 4510 ou 4511 de la législation des installations classées pour la protection de l’environnement 

Arrêté du 24 septembre 2020 modifiant l’arrêté ministériel du 4 octobre 2010 relatif à la prévention des risques accidentels au sein des installations classées pour la protection de l’environnement soumises à autorisation 

  

Enfin, quatre autres arrêtés ont été adoptés le même jour et trouvent à s’appliquer à certaines installations classées.  

  • L’arrêté NOR : TREP2009123A modifie les prescriptions générales applicables aux entrepôts couverts relevant de la rubrique 1510 de la nomenclature ICPE. De nouvelles prescriptions sont ainsi imposées, relatives par exemple à l’état des matières stockées, aux moyens de lutte incendie, aux installations électriques, etc. Les modalités de contrôle de ces installations sont également précisées et renforcées ; par exemple, si aucun point de contrôle n’était auparavant prévu pour la surveillance, l’arrêté du 24 septembre 2020 prescrit une vérification de la présence d’un contrôle des accès. Des dispositifs transitoires sont prévus pour les installations qui, en application du décret n° 2020-1169, sont nouvellement soumises à déclaration, enregistrement ou autorisation. 

  

  • L’arrêté NOR : TREP2021860A vise quant à lui à renforcer les prescriptions applicables au stockage de liquides inflammables et de liquides combustibles en récipients mobiles, que ce stockage soit en extérieur ou couvert. Il est par exemple indiqué dans cet arrêté que les récipients mobiles doivent être implantés sur un site clôturé et que des mesures visant à empêcher les personnes non autorisées à accéder aux installations doivent être adoptées (article II.2), des dispositifs de détection automatique d’incendie avec transmission, en tout temps, de l’alarme à l’exploitant sont mis en place dans certains locaux (article III.4), etc.  

  

  • L’arrêté NOR : TREP2021861A vise les ICPE stockant des liquides inflammables, notamment celles soumises « à autorisation au titre de l’une ou plusieurs des rubriques 1436, 4330, 4331, 4722, 4734, 4742, 4743, 4744, 4746, 4747 ou 4748, ou pour le pétrole brut au titre de l’une ou plusieurs des rubriques nos 4510 ou 4511 de la législation des installations classées pour la protection de l’environnement dites « rubriques liquides inflammables » (article 1er). Les stockages soumis à l’arrêté précédemment présenté ne se voient pas appliquer ces prescriptions. L’arrêté impose par exemple à l’exploitant d’étudier les modalités prévisionnelles permettant d’assurer la continuité d’approvisionnement en eau si l’incendie venait à durer dans le temps (au-delà de trois heures). Les modalités d’application dans le temps des prescriptions de l’arrêté sont également détaillées.  

  

  • L’arrêté NOR : TREP2021862A porte sur l’état des matières stockées. Il est notamment indiqué que les exploitants de l’ensemble des installations soumises à autorisation devront tenir à jour un état des matières stockées et devra rendre ces documents à disposition du préfet, des services d’incendie et de secours, de l’inspection des installations classées et des autorités sanitaires (article 1er). Des dispositions spécifiques s’appliquent aux installations susceptible de créer des accidents majeurs impliquant des substances dangereuses et à celles soumises à autorisation sur le fondement des rubriques 1436, 2718, 4330, 4331, 4722, 4734, 4742, 4743, 4744, 4746, 4747 ou 4748 ; par exemple, pour ces installations, l’exploitant doit mettre à jour l’état des matières stockées au moins toutes les semaines qui doit être accessible à tout moment.