le 14/10/2015

Domanialité publique virtuelle

CE, 29 juin 2015, Centre Hospitalier de Mention, n° 368299

L’arrêt du Conseil d’Etat du 29 juin 2015 témoigne de ce que la décision rendue en 1985, Association Eurolat, est toujours pleinement d’actualité (CE, 6 mai 1985, Association Eurolat, n° 41589).

Les faits à l’origine de cette affaire son quasi identiques à ceux qui avaient donné lieu à la décision Eurolat : en 1987, le Centre hospitalier de Menton avait conclu avec une société, sur une dépendance qu’il pensait relever de son domaine privé, un bail à construction pour la réalisation d’une maison d’accueil pour personnes âgées dépendantes, bail à construction auquel était attachée une convention de location en retour au profit du Centre hospitalier. Vingt-cinq ans après, le centre hospitalier a sollicité la résolution de cet ensemble contractuel, estimant qu’il avait été illégalement conclu sur le domaine public.

Le Conseil d’Etat valide ce raisonnement. Il rappelle en effet que la « théorie de la domanialité publique virtuelle » trouve à s’appliquer aux biens des personnes publiques dont l’affectation à un service public était certaine avant l’entrée en vigueur du Code général de la propriété des personnes publiques. Il souligne ainsi que, dès lors qu’une personne publique avait prévu d’affecter un bien à un service public et avait prévu de façon certaine de l’aménager à cet effet, le bien était immédiatement, dès ce moment, soumis aux principes de la domanialité publique, et ce sans que n’y fasse obstacle la circonstance qu’il n’ait pas encore fait l’objet de cet aménagement. Ce faisant, le Conseil d’Etat applique la solution, maintenant bien acquise, qu’il avait établie en 2013, dans sa décision ATALR (CE, 8 avril 2013, Association ATLALR, n° 363738).

Dans le cas particulier de cette affaire, le Conseil d’Etat considère donc que l’ensemble contractuel conclu par le Centre hospitalier en 1987, qui avait pour objet de confier à une société la construction d’une maison pour personnes âgées dépendantes puis sa mise à disposition en retour au Centre hospitalier, avait eu pour effet d’incorporer le terrain d’assiette du projet dans le domaine public, dès sa conclusion.

Par ailleurs, le Conseil d’Etat confirme également qu’un bien d’une personne publique peut relever du domaine public, quand bien même il est affecté à un service public par une personne publique qui n’en est pas le propriétaire. Ici encore, la solution était déjà connue (CE, 19 décembre 2007, Commune de Mercy-le-Bas, n° 288017 ; CAA de Marseille, 12 mars 2015, Communauté Urbaine Marseille Provence Métropole, n° 14MA03803).