le 12/04/2016

Le dispositif national de mise à l’abri, d’évaluation et d’orientation des mineurs isolés étrangers après la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant

Loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant

La loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant est venue apporter de nouvelles précisions relatives à la prise en charge des mineurs isolés étrangers (MIE) par les départements.

Elle vient compléter la circulaire du 31 mai 2013 relative aux modalités de prise en charge des MIE, qui a institué un dispositif national de mise à l’abri, d’évaluation et d’orientation de ces jeunes.

Plus précisément, elle donne une base légale à la clé de répartition des MIE entre départements, précise le rôle de l’autorité judiciaire s’agissant de l’orientation de ces jeunes et réglemente le recours controversé aux examens osseux.

S’agissant des critères de répartition des MIE entre départements, on rappellera à titre liminaire que, par une décision en date du 30 janvier 2015, le Conseil d’Etat avait annulé partiellement la circulaire du 31 mai 2013 au motif que le Garde des Sceaux n’avait pas le pouvoir de prescrire aux magistrats du Parquet d’orienter ces mineurs en fonction d’un critère, non prévu par le législateur, tiré de la proportion de la population de moins de dix-neuf ans dans la population de chaque département (CE, 30 janvier 2015, Département des Hauts-de-Seine et autres, n° 371415, n° 371730 et n° 373356) (cf. notre Lettre d’actualité juridique n° 45 de février 2015).

Le législateur est donc intervenu pour préciser que le Ministre de la justice fixe les objectifs de répartition proportionnée des accueils des mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille entre les départements, « en fonction de critères démographiques et d’éloignement géographique ».

Il a par ailleurs prévu que le président du conseil départemental transmet au Ministre de la Justice les informations dont il dispose sur le nombre de ces mineurs dans le département (nouvel article L. 221-2-2 du Code de l’action sociale et des familles – CASF).

S’agissant de l’orientation des MIE par l’autorité judiciaire, l’article 375-5 du Code civil a été complété par deux alinéas qui prévoient que tant le Procureur de la République que le Juge des enfants demandent au Ministère de la justice de leur communiquer, lorsqu’un service de l’aide sociale à l’enfance signale la situation d’un mineur privé temporairement ou définitivement de la protection de sa famille, pour chaque département, les informations permettant d’orienter le mineur concerné, et que la décision de placement du mineur devra être prise par le magistrat « en stricte considération de l’intérêt de l’enfant », apprécié « notamment à partir des éléments ainsi transmis pour garantir des modalités d’accueil adapté » (article 375-5 du Code civil).

A la suite de la circulaire du 31 mai 2013, une cellule nationale, placée auprès de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse du Ministère de la justice, chargée de coordonner la prise en charge des MIE et de fournir un appui aux acteurs de cette prise en charge, a été mise en place.

Mais, jusqu’ici, elle ne pouvait être saisie que par les Parquets, dès lors que le Ministre de la Justice nétait pas compétent pour imposer des sujétions aux magistrats du siège.

Désormais, c’est la loi qui prévoit que le Juge des enfants interroge les services du Ministère de la justice.

Cela devrait permettre, à terme, une répartition plus équitable des MIE entre départements.

On relèvera que ces dispositions ne concernent pas expressément les MIE, mais il ressort des travaux parlementaires relatifs à la proposition de loi qu’il s’agissait bien de régler la question de ces jeunes à la suite de l’annulation partielle de la circulaire du 31 mai 2013 par le Conseil d’Etat.

Par ailleurs, l’objectif est bien de permettre une répartition équilibrée de ces mineurs entre les départements (exposé des motifs des amendements n° AS11 et AS12).

S’agissant du recours aux examens osseux, l’article 388 du Code civil a été complété. Il est désormais prévu que les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge, en l’absence de documents d’identité valables et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés « que sur décision de l’autorité judiciaire et après recueil de l’accord de l’intéressé ».

En outre, il est indiqué que les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d’erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l’intéressé est mineur, le doute profitant à l’intéressé, et que, dans ce dernier cas, il ne peut être procédé à une évaluation de l’âge du jeune à partir d’un examen du développement pubertaire des caractères sexuels primaires et secondaires.

Enfin, on notera que la loi du 14 mars 2016 n’encadre pas plus le dispositif d’évaluation de l’âge de ces jeunes alors qu’une circulaire interministérielle en date du 25 janvier 2016 avait annoncé la définition d’un cadre national sur ce point (circulaire NOR JUSF1602101 C relative à la mobilisation des services de l’Etat auprès des conseils départementaux concernant les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et les personnes se présentant comme tels).