le 08/07/2021

Des précisions sur l’application du dispositif de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 dite « loi ELAN » concernant le supplément de loyer de solidarité !

Cass. Civ., 3ème, 3 juin 2021, n° 20-12.353

Pour mémoire, le locataire d’un logement social est redevable, en sus du loyer et des charges locatives, d’un supplément de loyer de solidarité, si en cours de bail, les ressources de l’ensemble des personnes vivant au foyer excèdent d’au moins 20% les plafonds de ressources en vigueur pour l’attribution de ces logements.

Autrement dit, si les ressources de la famille viennent, en cours de bail, à augmenter de manière telle qu’elles excédent les plafonds réglementaires, cette famille peut conserver son logement car elle a droit au maintien dans les lieux et « cela contribue à la diversité d’occupation du parc social » mais « si le dépassement du plafond de ressources est significatif, il est juste que cette famille verse un supplément de loyer à son bailleur social » (Circulaire n° 96-29 du 29 avril 1996 relative au supplément de loyer de solidarité). Telle est la philosophie générale du dispositif.

De la même manière, dans l’hypothèse où une famille occupe un logement privé qui, en cours de bail, est acquis et conventionné à l’APL par un bailleur social, ce dernier doit appliquer à la famille le SLS (sous les mêmes conditions de ressources qui excèdent le plafond).

La Cour de cassation avait eu l’occasion de rappeler ce mécanisme dans plusieurs arrêts du 10 juillet 2013.

« les contrats en cours avaient, dès l’entrée en vigueur de la convention signée avec l’Etat, été soumis tant aux dispositions légales que conventionnelles et l’engagement de proroger les baux ne dispensait pas le bailleur social de respecter ses obligations légales relatives au loyer (…) de telle sorte que l’organisme bailleur était fondé à réévaluer les loyers et à appeler le supplément de loyer de solidarité ».

Cette situation générait de nombreux contentieux entre les bailleurs sociaux et leurs « nouveaux locataires », de sorte que la loi n° 2018-1021 du 28 novembre 2018 a clarifié le dispositif et instauré un droit d’option pour les locataires occupant un logement acquis et conventionné par un bailleur social en cours de bail :

  • soit les locataires acceptent de conclure un nouveau bail soumis à la réglementation HLM ;
  • soit les locataires souhaitent voir leur bail se poursuivre jusqu’à expiration.

Les locataires ont six mois pour faire part de leur choix au bailleur social. Quel que soit ce choix, la loi ELAN est venue préciser que le SLS ne pouvait pas s’appliquer, en tout état de cause, avant l’expiration d’un délai de trois ans à compter de la date de signature de la convention APL.

C’est dans ce nouveau contexte légal qu’un locataire devenu locataire d’un bailleur social avait contesté l’assignation en paiement de SLS qui lui avait été notifié arguant son droit d’option et le gel pendant trois ans de tout paiement du SLS.

La troisième chambre civile de la Cour de cassation a écarté l’application dans le temps de la loi ELAN, au motif que cette loi ne pouvait modifier les effets légaux d’une situation juridique définitivement réalisée lors de l’entrée en vigueur de ladite loi. En l’espèce, le conventionnement de l’immeuble acquis par le bailleur social datait du 6 juin 2014, de sorte qu’à compter de cette date le bailleur social était en droit d’appeler le SLS sans que la loi ELAN du 23 novembre 2018 entrée en vigueur le 28 novembre 2018 n’ait pu modifier cette situation.