le 15/09/2016

Décision attendue du Conseil d’Etat vers l’ouverture de la possibilité de conclure une délégation de service public multi services ?

Le Conseil d’Etat va se prononcer très prochainement sur la possibilité pour une autorité concédante de conclure une délégation de service public (DSP) portant sur plusieurs services publics. Cette décision, très attendue, pourrait faire jurisprudence et permettre de confier à un délégataire, dans le cadre d’un contrat unique, la gestion de plusieurs services publics.

En juillet 2015, la Communauté Urbaine du Grand Dijon (CUDJ) a lancé une consultation pour la conclusion d’une délégation de service public portant sur l’exploitation des services de la mobilité sur son territoire. Seules deux sociétés, les sociétés Keolis et Effia, ont candidaté mais trois entreprises, les Sociétés Q Park, Indigo Infra et SAGS, ont saisi le Juge du référé précontractuel d’une demande d’annulation de la procédure.

En première instance, le Tribunal administratif, après avoir reconnu l’intérêt à agir des requérants considérant que « les trois sociétés requérantes ont un intérêt à contester la conclusion de la convention en litige car, de part leur spécialité, elles avaient vocation à candidater au moins pour la partie stationnement des missions déléguées », annule la procédure en relevant que la convention de DSP « comprend [outre l’exploitation des services de mobilité] la commande de prestations d’assistance à maîtrise d’ouvrage, de maîtrise d’œuvre et d’évaluation des prestations de maintenance de cocontractants de la collectivité locale liés à elle, et au délégataire, par des contrats de partenariat. Or, de telles missions, qui tendent à satisfaire les besoins propres de la collectivité locale délégante et non à assurer la gestion du service public, n’ont pas le caractère de délégation de service public normalement rétribuée par l’exploitation du service ».

Saisi d’un pourvoi par les Société requérantes et la CUDJ, le Conseil d’Etat a entendu son rapporteur public, Gilles Pellissier, proposer d’annuler cette décision.

Il constate qu’aucune disposition ou jurisprudence (notamment de la Cour de Justice de l’Union Européenne) ne limite l’autorité concédante dans la définition de l’objet de la convention qu’il envisage de conclure. Ainsi, aucune obligation d’allotissement ne serait prescrite s’agissant des contrats de DSP, au contraire des marchés publics.

Pour Gilles Pellissier, seule l’inclusion d’activité étrangère au service délégué peut en effet être sanctionnée.

Du reste, une DSP prévoyant de confier au délégataire plusieurs services hétéroclites sans lien entre eux serait illégale car elle impliquerait que soient écartés un certain nombre d’opérateurs spécialisés ou de les contraindre à des regroupements difficiles et porterait donc atteinte aux principes généraux de la commande publique. En revanche, une DSP qui met à la charge du cocontractant des prestations accessoires qui ont un lien avec le service délégué serait possible.

Le rapporteur public constate qu’en l’espèce, la CUDJ a regroupé des prestations qui se rattachent toutes au service de la mobilité. Et si certaines prestations ne sont pas des activités de service public, elles en sont un complément nécessaire.

Si le Conseil d’Etat suit ces conclusions, il s’agirait à l’évidence d’une décision importante qui pourrait éventuellement, selon les termes retenus par le Conseil d’Etat, permettre de dépasser certaines difficultés liées par exemple à la nécessité de séparer certains services publics pourtant complémentaires, comme la valorisation des déchets et la production/distribution de chaleur.

Il n’est toutefois pas certain que le Conseil d’Etat prenne une telle voie, qui irait à rebours des impératifs de non concentration des activités confiés à un même opérateur (en marché public, cela se traduit notamment par une rigoureuse obligation d’allotissement).

La réponse est attendue dans quelques semaines et nous ne manquerons pas de vous tenir informés.