le 29/08/2017

Contentieux TASCOM : un dénouement amer pour les collectivités

Conseil constitutionnel, 21 juillet 2017, QPC n° 2017-644

La décision du Conseil constitutionnel met un terme à la bataille contentieuse que les collectivités avaient engagée depuis quelques années pour faire reconnaître leur préjudice lié au prélèvement illégal de TASCOM opéré sur les années 2012 à 2014.
Pour mémoire, la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 a organisé le transfert de certaines taxes perçues par l’Etat au profit des collectivités ; c’est notamment le cas du produit de la TASCOM, transféré en application du paragraphe 1.2.4.1 de l’article 77 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010.
Or, il ressortait clairement des termes de la loi de finances que la diminution de la dotation de compensation d’un montant correspondant au produit de la TASCOM perçu par l’Etat sur le territoire des EPCI et communes en 2010, a été inscrite dans la loi de finances pour 2010 au titre de la seule année 2011.
Cependant, ce mécanisme a été reconduit les années suivantes par voie de circulaires ministérielles au titre des années 2012, 2013 et 2014.
Saisi pour se prononcer sur la légalité des circulaires précitées de 2012 et 2013, le Conseil d’Etat a, dans un arrêt rendu le 16 juillet 2014 (CE, 16 juillet 2014, Val de Sèvres, req. n° 369736) considéré que le mécanisme était irrégulier, le Ministre ne pouvant ajouter à la loi. Ce faisant, ce mécanisme reproduit à l’identique et dans les mêmes termes sur les autres années était donc tout aussi irrégulier.
Prenant acte de cette décision, le législateur a alors pris l’initiative de modifier l’article 77 de la loi de finances pour 2010 en supprimant la référence à l’année 2011 (article 114 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015).
Et cette évolution législative a modifié les dispositions en cause pour l’avenir seulement, de sorte que, si les prélèvements de TASCOM opérés à partir de 2015 sont fondés en droit, tel n’était pas le cas de ceux effectués en 2012, 2013 et 2014.
C’est dans ce contexte que le montant de la dotation de compensation attribuée aux Communes et aux EPCI à fiscalité propre a été diminué, en 2011, du produit de la TASCOM antérieurement perçu par l’Etat.

Ils ont également fait l’objet d’un prélèvement du produit de TASCOM sur les années 2012 à 2014, et ce, en dehors de toute base législative.
Les ressources de ces EPCI ont dès lors été amputées au titre de ces trois années d’un montant correspondant au prélèvement de TASCOM fixé à hauteur de ce que l’Etat avait perçu sur le territoire en 2010.
C’est dans ce contexte qu’un certain nombre de collectivités ont saisi les tribunaux administratifs pour faire reconnaître le préjudice lié à ces prélèvements illégaux.

Le Tribunal administratif de Pau, saisi d’un recours sur la légalité de tels prélèvements, a reconnu un préjudice lié à cette erreur de droit (TA Pau, 9 février 2016, Communauté de Communes de Maremne-Adour-Côte-Sud, req. n°1402532).

Prenant la mesure « du risque financier » que pourrait représenter la multiplication des décisions de ce type pour le budget de l’Etat, le législateur a adopté un adopté une loi de validation par l’intermédiaire de l’article 133 de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016, et a entendu valider de façon rétroactive les arrêtés préfectoraux de prélèvement de la « TASCOM » pris au titre des exercices 2012, 2013 et 2014.

C’est cette loi de validation que le Conseil constitutionnel a examiné à la lumière de l’article 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 qui protège notamment le principe de séparation des pouvoirs et fixe des exigences constitutionnelles applicables aux lois de validation.

Pour déterminer la constitutionnalité d’une loi de validation, le Conseil constitutionnel doit notamment s’assurer que la validation doit être justifiée par un motif impérieux d’intérêt général (Décision du 16 février 2014, SELALR PJA, 2013-366 QPC), étant précisé que le motif financier n’est pas un critère suffisant pour justifier une loi de validation.

Les collectivités espéraient que le Conseil constitutionnel censurerait cette loi de validation, en vain.

Malheureusement, les Sages ont préféré reconnaître cette loi de validation conforme à la Constitution, précisant notamment que « l’intention du législateur (…) était d’assurer de manière pérenne la neutralité financière du transfert du produit de la taxe sur les surfaces commerciales (…). Il a également entendu prévenir les importantes conséquences financières qui en auraient résulté pour l’Etat ».

On notera cependant qu’une telle motivation est à tout le moins, décevante, les collectivités avaient notamment largement démontrées que les conséquences financières pour le budget de l’Etat étaient minimes, représentant en effet 0,44% de ses recettes annuelles.