le 18/03/2021

Consultation des associés en temps de crise sanitaire jusqu’au 31 juillet 20021

Ordonnance n° 2020-1497 du 2 décembre 2020 portant prorogation et modification de l'ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé en raison de l'épidémie de covid-19

Décret n° 2020-1614 du 18 décembre 2020 portant prorogation et modification du décret n° 2020-418 du 10 avril 2020 et du décret n° 2020-629 du 25 mai 2020 pour adapter le fonctionnement de certaines instances délibératives au contexte créé par l’épidémie de covid-19

 

Dans le contexte exceptionnel de crise sanitaire que nous traversons depuis le début de l’année 2020, de nombreuses adaptations ont dû être faites tant dans les modes de gestion des finances des sociétés que dans leur gestion administrative.

Ainsi, les sociétés, GIE, GEIE, coopératives, associations, fondations, mutuelles, caisses de crédit, ou encore les fonds de dotation ne sont pas exemptées de consulter leurs associés dans le cadre des assemblées générales ordinaires ou extraordinaires. A l’inverse, elles ont dû s’adapter, voire pour certaines, se moderniser.

Le régime dérogatoire de réunion et de délibération des assemblées et des organes collégiaux institué par l’ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020 a été reconduit par une ordonnance du 2 décembre 2020, complétée par un décret du 18 décembre 2020.

L’ordonnance et le décret laissent ainsi la possibilité d’une prorogation, partielle ou complète, jusqu’au 31 juillet 2021.  

 

I – Principe fondamental du droit d’information des associés 

Chaque associé a en principe droit à la communication des documents sociaux avant la tenue des assemblées générales (comptes annuels, rapport de gestion, rapport du CAC s’il y en a un, texte des résolutions proposées, sous peine de voir la délibération annulée, compotes consolidés et rapport de gestion des groupes).

Pour la plupart des sociétés, groupements ou associations, un droit à l’information est donc directement reconnu aux associés.

Seule la SAS prévoit un aménagement du droit d’information des associés, dans le respect de l’information minimale prévue légalement (montant des honoraires versés au CAC, informations sur le réseau du CAC, bilans sociaux avec l’avis du comité d’entreprise pour les sociétés de + de 300 salariés, et si l’associé détient + de 5% du capital social, il a le droit de poser des questions deux fois par an sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation, sur les opérations de gestion de la société, ou de demander la révocation du CAC).

En outre tout associé a de façon permanente le droit d’obtenir communication des livres et documents sociaux, ainsi que le droit de poser des questions écrites sur la gestion de la société, quelle que soit sa part dans le capital social de la société. Le dirigeant est obligé de répondre dans un délai imparti.

 

II – Rappel des modes de consultation des associés

 

Dans les SA et SARL :

La réunion des associés d’une SARL en assemblée générale n’est obligatoire qu’une seule fois par an pour approuver les comptes. En dehors de cette hypothèse, la consultation peut être effectuée par écrit (valable pour les SARL comportant peu d’associés), pour cela il suffit de rédiger un acte contenant la décision prise et de la faire signer par tous les associés de la SARL. Elle peut aussi être réalisée par correspondance (par lettre recommandée ou par internet, avec un délai de 15 jours accordé aux associés pour y répondre, sauf délai supérieur prévu par les statuts).

 

Dans les SAS :

Contrairement aux cas des SARL ou des SA, la loi n’impose nullement que les décisions collectives des associés de SAS soient prises en “assemblées générales”: c’est aux statuts de SAS de fixer les règles de prises de décisions collectives1.

En pratique, dans la majorité des statuts de SAS, il est prévu un fonctionnement de type assemblées générales comme dans les SA, avec toutefois certains assouplissements en matière de convocation et de mode de prises de décision, permettant d’alléger le formalisme de tenue des assemblées générales.

Les consultations peuvent ainsi être réalisées par le biais d’une réunion des associés, par écrit (texte des résolutions adressé par LRAR aux associés avec un délai pour y répondre), par acte sous seing privé (acte signé par tous les associés), par téléconférence ou visioconférence.

 

Dans les sociétés de personnes :

Comme dans les autres formes de société, l’approbation des comptes annuels, les modifications statutaires ou les opérations portant sur les droits sociaux relèvent du pouvoir exclusif des associés.

En principe, les décisions collectives doivent être prises en assemblée générale mais il est également possible, si les statuts le prévoient, de procéder à une consultation écrite, ou de recueillir le consentement de tous les associés dans un acte.

L’unanimité des associés est de mise, toutefois cette règle peut être écartée dans les statuts pour adopter une majorité plus faible2.

 

Dans les SNC :

Dans les sociétés en nom collectif, le principe est celui de la réunion d’une assemblée générale mais les statuts peuvent prévoir la consultation écrite3.

 

Dans les sociétés en participation :

Dans les sociétés en participation, l’organisation des décisions collectives relève de la liberté statutaire.

 

III – Le régime dérogatoire de réunion et de délibération des assemblées et des organes collégiaux

 

Comme exposé précédemment, l’ordonnance du 2 décembre 2020, complétée par un décret du 18 décembre 2020 laissent la possibilité d’une prorogation, partielle ou complète du régime dérogatoire, jusqu’au 31 juillet 2021.

Ainsi, les assemblées dématérialisées, consultations écrites  et au moins un mode de vote à distance doivent être rendus possibles pour toutes les entreprises, même lorsque les statuts ne le prévoient pas, voire l’interdisent.

Par ailleurs, depuis le 3 décembre 2020, le recours au vote par correspondance est ouvert aux groupements pour lesquels il n’est normalement pas prévu par la Loi ; aux groupements pour lesquels il n’est en principe autorisé par la Loi qu’à la condition du respect de certaines conditions (comme par exemple celle relative à l’existence d’une clause à cet effet dans les statuts) : ces conditions sont donc temporairement neutralisées. Le procès-verbal doit néanmoins préciser le recours au vote par correspondance.

Ainsi, pour toutes les formes de sociétés, les assemblées dématérialisées doivent être rendues possibles même si elles sont initialement interdites par les statuts, et des moyens techniques doivent être mis en place pour permettre la retransmission continue et simultanée des délibérations. La consultation écrite doit aussi pouvoir être mise en place4, même si elle est initialement interdite par les statuts (sauf pour les sociétés cotées).

Encore, l’article 4 de l’ordonnance du 25 mars 2020 autorisait, de façon exceptionnelle et temporaire, la tenue des assemblées « à huis clos », c’est-à-dire sans que leurs membres ni les autres personnes normalement autorisées à y assister (par exemple les CAC ou les représentants des syndicats du personnel) n’y participent, ni physiquement ni par voie de conférence téléphonique ou audiovisuelle.

L’ordonnance du 25 mars précisait que la condition de recours à l’assemblée en huis clos était l’édiction ou non de mesures administratives limitant ou interdisant les déplacements ou les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires, appréciés in abstracto, soit de façon large. 

L’article 2 de l’ordonnance du 2 décembre 2020 vient resserrer cette appréciation et considère qu’elle doit dorénavant être appréciée in concreto, c’est-à-dire que dorénavant, les mesures restrictives susceptibles d’avoir une incidence sur l’organisation de l’assemblée et de conduire à ce qu’elle soit tenue « à huis clos » sont uniquement les mesures qui interdisent ou limitent les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires, ou celles qui interdisent ou limitent les déplacements pour de semblables motifs.

Concrètement, pour les SARL et dans le cadre d’une assemblée à huis clos, le vote par correspondance5,  est autorisé, le vote par procuration doit pouvoir être effectué par le conjoint ou un autre associé par le biais d’un pouvoir, et le vote électronique doit être rendu possible.

Pour les SAS et dans le cadre d’une assemblée à huis clos, le vote par correspondance est autorisé, le vote par procuration doit pouvoir être effectué via un pouvoir donné à un associé ou à un tiers dans la limite de ce que les statuts prévoient, mais l’ordonnance n’oblige pas au recours au vote électronique. 

La représentation de l’associé devra cependant respecter certaines règles. Ainsi, doivent parvenir à la société jusqu’au 4ème jour précédant la date de l’AG :

  • les mandat(s) de représentation indiquant le mandataire
  • les instructions du mandataire pour l’exercice du ou des mandats dont il dispose, par message électronique à l’adresse électronique indiquée et en utilisant le formulaire de vote par correspondance.

 

Pour aller plus loin, le Trésor Public propose une Foire Aux Questions sur le thème de la tenue des AG ou des CA et sur la tenue de la comptabilité des entreprises en période de crise sanitaire.

Par Lucy Labayen – sous la direction de My-Kim Yang-Paya

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1 article L. 227-9 du Code de commerce

2 C. com., art. L. 221-6 . – C. civ., art. 1852

3 C. com., art. L. 221-6

4 Réponse par mail possible à l’adresse électronique indiquée dans les documents adressés à l’associé, Décret 2020-418 art. 3, al. 2

5 Vote par mail possible à l’adresse électronique indiquée dans la convocation, Décret 2020-418 art. 3, al. 1