le 05/03/2020

Confirmation par le Conseil d’Etat d’un refus illégal d’EDF de conclure un contrat d’achat d’électricité produite par des installations photovoltaïques hors du champ d’application du décret « moratoire »

CE, 5 février 2020, Société Clairvalsolaire, n° 420753, Inédit au recueil Lebon

Presque 10 ans après son édiction en 2010, le décret « moratoire » fait encore parler de lui.

En effet, on rappellera que par décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010, le Premier ministre avait suspendu pour une durée de trois mois à compter de son entrée en vigueur, soit le 10 décembre 2010, l’obligation pour EDF de conclure un contrat d’achat de l’électricité produite par les installations, d’une puissance installée inférieure ou égale à 12 mégawatts, utilisant l’énergie radiative du soleil (soit les installations photovoltaïques).

En pratique, ce décret avait ainsi conduit à suspendre l’enregistrement de tous les nouveaux projets photovoltaïques, à l’exception de ceux menés par les particuliers (puissance inférieure à 3 kilowatts) afin de permettre à l’ensemble de la filière de mener une concertation pour établir un nouveau cadre réglementaire.

Le décret excluait certaines catégories d’installations en particulier celles dont le producteur avait notifié au gestionnaire de réseau, avant le 2 décembre 2010, son acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau.

Plusieurs contentieux s’étaient toutefois noués avec EDF dès lors que certains producteurs s’était notamment vu notifier des décisions de refus de conclure un contrat d’achat au motif que leur installation était concernée par le moratoire.

C’était le cas de la société Clairvalsolaire qui avait été évincée du bénéfice des tarifs d’achat antérieurs au décret moratoire. EDF avait motivé son refus de conclure un contrat d’achat d’électricité au regard de l’absence de signature en bonne et due forme des conventions de raccordement proposées par le gestionnaire du réseau de distribution.

Une difficulté d’interprétation du décret moratoire existait en effet au sujet des conditions dans lesquelles la société avait signé les conventions de raccordement et si de ce fait elle pouvait ou non être regardée comme satisfaisant aux conditions fixées par le décret pour que son projet puisse ne pas être concerné par la période de suspension ainsi décidée.

En l’espèce, la société avait, dès le 30 août 2010, sollicité le raccordement de sa centrale photovoltaïque, puis sollicité EDF pour conclure un contrat d’achat de l’électricité au tarif en vigueur à la date de sa demande de raccordement. Pour ce faire, la société Clairvalsolaire avait expédié les conventions le 1er décembre 2010, soit un jour avant la prise d’effet de la suspension. La société EDF avait cependant refusé de conclure le contrat d’achat demandé par décision du 18 mars 2011 dès lors que les conventions n’avaient pas été dûment signées par le producteur.

La société Clairvalsolaire avait alors demandé au tribunal administratif l’annulation de cette décision de refus, demande à laquelle le tribunal avait fait droit. La cour administrative d’appel avait finalement annulé ce jugement pour des motifs de forme mais avait en revanche confirmé l’annulation de la décision d’EDF. La Cour avait alors considéré que la société EDF ne pouvait légalement refuser de conclure le contrat d’achat d’électricité aux conditions techniques et tarifaires prévues par les conventions retournées le 1er décembre 2010, au seul motif que lesdites conventions n’étaient pas signées.

La société EDF avait ainsi formé un pourvoi à l’encontre de cet arrêt afin que le Conseil d’Etat se prononce sur le fait de savoir si la société Clairvalsolaire entrait ou non dans le champ de la suspension de l’obligation de conclure un contrat d’achat au regard des conditions dans lesquelles elle avait signé ses conventions de raccordement.

Par cet arrêt, le Conseil d‘Etat a considéré que la société avait bien signé les conventions en cause de sorte que la décision de refus d’EDF était illégale.