le 14/02/2018

Concessions funéraires : attention à distinguer la concession « familiale » de la concession « collective »

CAA Nantes, 22 septembre 2017, Madame A. c/ Commune de Plouguernével, n°16NT02229

A la suite du décès de Monsieur D. K., la fille du défunt, Madame A., a souhaité inhumer son père dans un cimetière de la commune de Plouguernével (Côtes-d’Armor) au sein duquel les beaux-parents du défunt disposaient d’une concession funéraire.

Après s’être vu opposer un refus à sa demande d’inhumation par le maire de la commune, Madame A. a saisi le Tribunal administratif de Rennes d’une requête tendant à l’annulation de cette décision de refus. Cette requête a été rejetée par un jugement du même Tribunal administratif du 12 mai 2016, jugement contre lequel Madame A. a fait appel devant la Cour administrative d’appel de Nantes.

En vertu de l’article R. 2213-31 du Code général des collectivités territoriales, l’inhumation dans un cimetière est soumise à un régime d’autorisation relevant des pouvoirs de police administrative du maire. Et, ce dernier est tenu de refuser une inhumation sur un terrain concédé à un tiers et sur lequel le défunt ne dispose d’aucun droit à y être inhumé, sauf à engager la responsabilité de la commune (cf. CE, 30 avril 2014, M. A. C., n° 366081).

En l’espèce, le maire a refusé la demande de Madame A. en considérant que la concession funéraire litigieuse était « collective » alors que la demanderesse l’estimait au contraire « familiale ».

Comment distinguer la concession familiale de la concession collective ? La pratique apporte une réponse face au silence du droit sur cette question : alors que l’inhumation dans une concession collective ne peut bénéficier qu’aux personnes expressément désignées par celle-ci, la concession familiale est ab initio prévue pour les inhumations de son fondateur et de ses ayants-droits (sauf exclusion expresse).

Cette distinction collective-familiale emporte également d’autres conséquences.

Pour mémoire, le fondateur d’une concession funéraire est toujours libre, de son vivant, de constituer la liste des personnes pouvant (ou pas) y être inhumées mais, une fois ce fondateur décédé, l’affectation ne pourra pas être modifiée par ses héritiers : il s’agit, en quelque sorte, de respecter les dernières volontés du défunt.

En revanche, dans une concession familiale, le silence du fondateur permettra tout de même aux héritiers, d’un commun accord, de faire inhumer une personne étrangère à la concession d’origine. Ce qui serait plus délicat, semble-t-il, dans le cadre d’une concession collective.

Dans l’affaire ici commentée, la concession litigieuse accordée au beau-père du défunt avait pour objet « d’y fonder la sépulture particulière de lui-même [le beau-père] et son épouse », ce qui permet à la Cour administrative d’appel de Nantes de conclure que :

« aucun élément du dossier n’établit que ses co-concessionnaires, qui seuls avaient qualité pour le faire, auraient décidé de modifier la destination de ladite concession particulière pour lui conférer le caractère d’une concession de famille, ou qu’ils auraient adjoint le nom de M. D. K. à la liste des bénéficiaires ».

Il en résulte que, dans le cas d’une concession funéraire collective, la liste des personnes pouvant y être inhumées ne peut être modifiée après le décès du fondateur, d’autant plus en l’absence d’éléments de nature à établir que ce dernier avait entendu, de son vivant, la modifier.

Et d’ailleurs :

« les circonstances, d’une part, que le caveau soit de grande taille et, d’autre part, que les relations entre M. K. et les consorts H. étaient bonnes du temps de leur vivant, ne sont pas de nature à établir l’existence d’une volonté expresse des titulaires de la concession de modifier les bénéficiaires de celle-ci » (considérant n°4).

Par suite, la Cour a rejeté les demandes d’annulation de la décision du Maire, d’injonction de faire procéder à l’inhumation de M. D.K. et a mis à la charge de la requérante la somme de 1.500 euros au titre des frais de justice à l’article L. 761-1 du Code de justice administrative.