le 13/01/2017

La compétence exclusive du Juge administratif pour ordonner des mesures de nature à porter atteinte à l’intégrité d’un ouvrage public

Tribunal des conflits, 5 septembre 2016, n°4069

En vertu de l’article L. 331-1 du Code de la propriété intellectuelle, « les actions civiles et les demandes relatives à la propriété littéraire et artistique […] sont exclusivement portées devant les tribunaux de grande instance ».

Sur la base de cet article, le Tribunal des conflits avait donc logiquement considéré que « par dérogation aux principes gouvernant la responsabilité des personnes publiques, la recherche d’une responsabilité fondée par la méconnaissance par ces dernières de droits en matière de propriété littéraire et artistique relève, depuis l’entrée en vigueur de la loi du 17 mai 2011, de la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire » (Tribunal des Conflits, 7 juillet 2014, n° 3954).

Cependant, dans une décision en date du 5 septembre 2016, le Tribunal des conflits est venu préciser l’articulation des compétences du Juge judiciaire et du Juge administratif en matière d’ouvrages publics.

Dans cette affaire, un architecte, qui avait réalisé un équipement culturel abritant une grande salle de concert sous la maîtrise d’ouvrage de l’établissement public de la Cité de la musique – Philharmonie de Paris – , a considéré que ce dernier avait altéré son œuvre d’architecte au point de la dénaturer.

L’architecte a saisi le Tribunal de grande instance de Paris afin que celui-ci condamne l’établissement public à faire exécuter les travaux nécessaires à la remise en état de l’œuvre, en réparation de l’atteinte au droit moral de l’auteur.

Le Tribunal des conflits a jugé que, si l’article L. 331-1 du Code de la propriété intellectuelle prévoit la compétence du Juge judiciaire en matière de propriété littéraire et artistique, ces dispositions « ne sauraient être interprétées comme donnant compétence aux juridictions de l’ordre judiciaire pour ordonner des mesures de nature à porter atteinte, sous quelque forme que ce soit, à l’intégrité d’un ouvrage public ».

Ainsi, le Tribunal de grande instance, saisi d’une demande tendant à ce qu’une atteinte au droit moral de l’architecte soit réparée par des travaux sur un ouvrage public, pourra statuer sur l’existence éventuelle de l’atteinte, mais devra se déclarer incompétent, au profit du Juge administratif, pour ordonner la réalisation de travaux sur l’ouvrage.