le 13/10/2016

La communication à un candidat évincé d’un document interne à l’administration évaluant les risques et faiblesses juridiques d’une procédure de passation d’un marché porte atteinte au déroulement équitable du procès

CE, 28 septembre 2016, société Armor Développement et autres, n° 390760

Par un arrêt en date du 28 septembre 2016, rendu sous l’empire de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal – à laquelle succède le Code des relations entre le public et l’administration depuis le 1er janvier 2016 – le Conseil d’Etat a limité le nombre de documents pouvant être communiqués dans le cadre d’un contentieux de la commande publique.

D’une part, à la suite de sa décision de 2015, dans un premier temps, le Conseil d’Etat a rappelé que ne sont pas communicables les documents administratifs portant atteinte au déroulement de procédures engagées devant les juridictions, et notamment ceux dont la communication « risquerait d’empiéter sur les compétences et prérogatives d’une autorité judiciaire ou d’une juridiction » (CE, 30 décembre 2015, Société Les Laboratoires Servier, n° 372230).

Dans un second temps, il a précisé que « la seule circonstance qu’une communication de document administratif soit de nature à affecter les intérêts d’une partie à une procédure, qu’il s’agisse d’une personne publique ou de toute autre personne, ne constitue pas une telle atteinte ».

Dans ce cadre, le Conseil d’Etat a considéré qu’un avis interne à l’administration rédigé dans la perspective d’un contentieux, évaluant les risques et faiblesses juridiques de la procédure de passation du marché en cause, portait atteinte au déroulement équitable du procès en ce qu’il permettait de porter à la connaissance du Juge des éléments émanant de la partie défenderesse et de nature à plaider contre la cause de cette dernière.

D’autre part, à la suite de sa décision du 30 mars 2016, le Conseil d’Etat a réaffirmé que n’étaient pas communicables les documents qui reflètent la stratégie commerciale d’une société et que portait ainsi atteinte au secret commercial la communication du bordereau des prix unitaire de la société attributaire (CE, 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan, n° 375529).

Logiquement, la Haute juridiction a ajouté que le même raisonnement trouvait à s’appliquer au détail quantitatif estimatif du marché et à l’offre finale détaillée du candidat retenu. Telle était déjà l’interprétation donnée à cet arrêt par la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA, 9 juin 2016, Conseil départemental de l’Eure, n° 20161778).

Ce faisant, le Conseil d’Etat semble poursuivre son œuvre de réduction du champ des documents communicables dans le cadre des contentieux de la commande publique.