le 28/03/2019

Colonnes montantes électriques : ce que la loi ELAN change

Il est apparu depuis plusieurs années un débat d’ampleur nationale, entre, d’une part, les Gestionnaires du Réseau de Distribution d’électricité (GRD), à savoir la société Enedis et les Entreprises Locales de Distribution (ELD), et, d’autre part, les propriétaires et copropriétaires d’immeubles s’agissant de la question de la propriété des colonnes montantes d’électricité présentes dans les immeubles desservant plusieurs niveaux et de l’identification du débiteur de l’obligation d’entretenir et de renouveler ces colonnes montantes électriques. La jurisprudence, si elle semble désormais unanime pour considérer qu’il existe une présomption d’incorporation des colonnes montantes au réseau public de distribution d’électricité, était initialement caractérisée par des divergences entre le juge administratif et le juge judiciaire.

C’est dans ce contexte, qui avait déjà donné lieu à de nombreux contentieux dont certains étaient encore pendants, que le législateur a, à l’occasion de la loi ELAN, clarifié le régime applicable aux colonnes montantes électriques. Ainsi, l’article 176 de la loi ELAN a créé, au sein du Code de l’énergie, de nouveaux articles L. 346-1 à L. 346-5 dont il résulte les principes suivants :

Tout d’abord, une définition des colonnes montantes est introduite à l’article L. 346-1 du Code de l’énergie, qui dispose que : « La colonne montante électrique désigne l’ensemble des ouvrages électriques situés en aval du coupe-circuit principal nécessaires au raccordement au réseau public de distribution d’électricité des différents consommateurs ou producteurs situés au sein d’un même immeuble ou de bâtiments séparés construits sur une même parcelle cadastrale, à l’exception des dispositifs de comptage » (art. L. 346-1 du Code de l’énergie). De nombreux débats s’étaient effectivement élevés entre GRD et propriétaires d’immeubles au sujet de la détermination de la consistance des colonnes montantes électriques.

Ensuite, en ce qui concerne la question de la propriété des colonnes montantes, les nouvelles dispositions des articles L. 346-2 à L. 346-4 du Code de l’énergie prévoient que :

  • les colonnes montantes mises en service à compter de la publication de la loi (publication intervenue le 24 novembre 2018) appartiennent au réseau public de distribution d’électricité ; cela implique donc qu’elles appartiennent aux Autorités Organisatrices de la Distribution d’Electricité (AODE) et sont gérées et entretenues par les concessionnaires de la distribution publique d’électricité ;
  • concernant les colonnes montantes électriques mises en service avant la publication de la loi, le principe posé est également celui de leur appartenance au réseau public de distribution et ce, à l’expiration d’un délai de deux ans commençant à courir à compter de la promulgation de la loi, donc à partir du 24 novembre 2020. Cette incorporation intervient sans condition de remise en état préalable et sans aucun flux financier au bénéfice des GRD.

En outre, dans le délai de deux ans courant à compter de la promulgation de la loi ELAN, et donc jusqu’au 24 novembre 2020, les propriétaires ou copropriétaires d’immeubles ont la possibilité :

  • soit de notifier au gestionnaire du réseau leur acceptation du transfert définitif au réseau public de distribution d’électricité desdits ouvrages ; dans ce cas, les colonnes montantes électriques sont incorporées de manière anticipée dans le réseau (sans attendre le 24 novembre 2020), et ce, toujours sans condition, tenant notamment à leur état d’entretien.
  • soit de se manifester pour revendiquer la propriété de ces ouvrages, et faire ainsi échec à leur incorporation future dans le réseau public de distribution d’électricité. Toutefois, dans ce cas, si les propriétaires d’immeubles décident, après avoir revendiqué la propriété des colonnes montantes électriques, de les transférer dans le réseau public de distribution d’électricité, alors, ce transfert sera conditionné à leur bon état de fonctionnement. Ainsi, les propriétaires devront remettre à niveau (à leurs frais donc) les colonnes montantes avant de les transférer (art. L. 346-4 du Code de l’énergie).

Le nouvel article L. 346-5 du Code de l’énergie précise que les colonnes montantes électriques présentes au sein des réseaux fermés de distribution, visés à l’article L. 344-1 du Code de l’énergie, et au sein des réseaux intérieurs, visés à l’article L. 345-2 du Code de l’énergie, ne sont en revanche pas soumises aux nouvelles dispositions issues de la loi ELAN.

Enfin, l’article 176 II de la loi ELAN, non codifié au sein du Code de l’énergie, apporte une précision qui concerne, non pas les propriétaires ou copropriétaires d’immeubles, mais plutôt les AODE puisqu’il prévoit que les entreprises concessionnaires de la distribution publique d’électricité ne seront plus tenues par leurs éventuelles obligations financières liées aux provisions pour renouvellement des colonnes montantes électriques, et ce, y compris en cas de stipulation contractuelle contraire dans les contrats de concession dont elles sont titulaires.

 

Par Marianne Hauton,
Avocat Senior référent, Seban & Associés