le 14/06/2017

La CJUE se prononce sur la portée de l’exonération de TVA des services rendus par un groupement de moyens à ses membres, notamment en ce qui concerne les services rendus au titre des frais généraux des membres

CJUE, arrêt en date du 4 mai 2017 (aff. 274/15)

Dans un arrêt en date du 4 mai 2017 (aff. 274/15), la CJUE a apporté des précisions sur l’interprétation des dispositions de l’article 132-1 f de la directive 2006/112 CE du 28 novembre 2016 lequel prévoit la possibilité pour les états membres d’exonérer les services rendus à leurs membres par les groupements autonomes de personnes sous certaines conditions.

Ces dispositions ont été transposées en droit interne à l’article 261 B du Code général des impôts (CGI) aux termes duquel, « les services rendus à leurs adhérents par les groupements constitués par des personnes physiques ou morales exerçant une activité exonérée de la TVA ou pour laquelle elles n’ont pas la qualité d’assujetti, sont exonérés de cette taxe à la condition qu’ils concourent directement et exclusivement à la réalisation de ces opérations exonérées ou exclues du champ d’application de la TVA et que les sommes réclamées aux adhérents correspondent exactement à la part leur incombant dans les dépenses communes » .

Dans l’arrêt du 4 mai 2017 rendu dans l’affaire opposant la Commission au Luxembourg (aff. 274/15), trois griefs étaient formulés à l’encontre de la législation luxembourgeoise :

  • l’exonération des services rendu par un groupement au bénéfice de ses membres, y compris lorsque ces services sont utilisés pour les opérations taxées desdits membres dont le chiffre d’affaires annuel soumis à TVA n’excède pas 30 % (voire 45 % dans certains cas) de leur chiffre d’affaires total hors taxe. Rappelons qu’en France, l’administration fixe le plafond d’opérations imposables à 20 % du chiffre d’affaires des membres du groupement et soumet le maintien de l’exonération des prestations rendues par le groupement à l’exclusion du/des membres dont le chiffre d’affaires taxable dépasse le plafond au 1er janvier de l’année suivante (cf. BOI-TVA-CHAMP-30-10-40)
  • la possibilité pour les membres exerçant une activité au moins en partie soumise à la TVA de récupérer celle supportée par le groupement pour les besoins des services rendus à ses membres ;
  • et, enfin, la non-imposition à la TVA des services rendus par les membres au groupement pour les besoins des services communs.

Sur le premier grief, la CJUE a rappelé au point 51 qu’il résultait du libellé de l’article 132,1-f  que « cette disposition ne prévoit pas d’exonération pour des prestations de services qui ne sont pas directement nécessaires à l’exercice des activités exonérées des membres du Groupement Autonome de Personnes ou pour lesquelles ils n’ont pas la qualité d’assujetti ». Elle a également relevé que « Contrairement à ce que fait valoir le Grand-Duché de Luxembourg, cette interprétation de l’article 132, 1-f de la directive 2006/112 n’a pas pour conséquence de priver d’effet l’exonération prévue par cette disposition. En particulier, l’application de cette exonération ne se limite pas aux groupements dont les membres exercent exclusivement une activité exonérée ou pour laquelle ils n’ont pas la qualité d’assujetti. Ainsi, les services rendus par un GAP dont les membres exercent également des activités imposables peuvent bénéficier de cette exonération, mais seulement dans la mesure où ces services sont directement nécessaires pour les activités exonérées desdits membres ou pour lesquelles ils n’ont pas la qualité d’assujetti » (point 53). Puis elle ajoute que « le Grand-Duché de Luxembourg n’a pas démontré que cette exigence rendrait l’exonération visée à l’article 132, 1-f de la directive 2006/112 quasi inapplicable dans la pratique. D’une part, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 42 de ses conclusions, les services fournis par un GAP à ses membres ne sont pas nécessairement rattachables à leurs frais généraux et à l’ensemble de leurs activités. D’autre part, le Grand-Duché de Luxembourg n’a pas démontré pour quelle raison, le cas échéant, il serait excessivement difficile pour le GAP de facturer ses services hors TVA, en fonction de la part qu’occupent dans l’ensemble des activités de ses membres les activités exonérées de cette taxe ou pour lesquelles ils n’ont pas la qualité d’assujetti » (point 54).

Ce faisant, la CJUE a consacré le fait que l’exonération de TVA prévue à l’article 132-1 f est uniquement liée à l’utilisation par ses membres, exclusive ou non, des services rendus par le GIE, pour les besoins de leurs activités exonérées.

La Cour a ainsi admis la possibilité d’une ventilation des services analysés comme des frais généraux et facturés par le groupement à la fois pour les besoins des activités exonérées et imposables de ses membres, ce qui est exclu pas la législation française.

Sur le second grief la Cour après avoir rappelé que le Groupement étant autonome et effectuant des prestations de services de façon indépendante au sens de l’article 9 de la directive 2006/112 a décidé que les membres d’un groupement ne peuvent procéder à la déduction de la TVA afférentes aux dépenses engagées pour les besoins des services qui leur sont facturés en exonération de TVA.

Sur le troisième grief, la Cour a jugé que l’affectation au groupement par l’un de ses membres de dépenses engagées par ce membre en son nom mais pour le compte du groupement est une opération qui relève du champ d’application de la TVA imposable à ce titre.