le 19/11/2015

Cession d’un terrain à un prix inférieur à sa valeur

CE, 14 octobre 2015, Commune de Châtillon-sur-Seine, n° 375577

L’arrêt du Conseil d’Etat en date du 14 octobre 2015 s’inscrit dans la lignée des décisions Commune de Fougerolles (CE, 3 novembre 1997, n° 169473) et Commune de Mer (CE, 25 novembre 2009, n° 3102802).

Dans cette affaire, une commune avait cédé des terrains à la communauté des gens du voyage afin de permettre leur logement, au prix de 5 euros du mètre carré, alors que le service des domaines avait estimé la valeur vénale des terrains à 30 euros du mètre carré.
Le Juge administratif, saisi d’un recours pour excès de pouvoir à l’encontre de la délibération autorisant la vente, était donc amené à vérifier si la vente des terrains à un prix très nettement inférieur à leur valeur vénale était légale.

Classiquement, le Conseil d’Etat rappelle les conditions de légalité des cessions de propriétés publiques à un prix inférieur à leur valeur : « la cession d’un terrain à des particuliers pour un prix inférieur à sa valeur ne saurait être regardée comme méconnaissant le principe selon lequel une collectivité publique ne peut pas céder un élément de son patrimoine à un prix inférieur à sa valeur à une personne poursuivant des fins d’intérêt privé lorsque la cession est justifiée par des motifs d’intérêt général et comporte des contreparties suffisantes ».

L’apport de la décision du 14 octobre 2015 réside dans ce que le Conseil d’Etat prend ensuite le soin de détailler ce que renferme la notion de « contreparties » : elles recouvrent les avantages que la cession est susceptible de procurer à la personne publique cédante, au regard de l’ensemble des intérêts publics dont elle a la charge.

Et, le Conseil d’Etat prend également le soin de détailler l’office du Juge en matière de contrôle des cessions : il doit d’abord s’assurer de l’existence d’un motif d’intérêt général justifiant la cession, il doit ensuite vérifier l’existence de contreparties, et il doit enfin s’assurer du caractère effectif et suffisant de ces contreparties, au regard de leur nature et des obligations mises à la charge des cessionnaires.

Le Conseil d’Etat sanctionne alors la Cour administrative d’appel qui avait considéré que les avantages en matière d’hygiène et de sécurité publique ainsi que la possibilité d’économiser le coût d’aménagement d’une aire d’accueil pour les gens du voyage et les coûts d’entretien de terrains irrégulièrement occupés ne pouvaient pas être comptés au nombre des contreparties de la cession.