le 16/12/2021

Certificat d’urbanisme : La cristallisation des règles est prorogée en cas d’annulation d’un refus de permis de construire dont la demande avait été déposée dans le délai imparti

CE, 24 novembre 2021, n° 437375

Par une décision en date du 24 novembre dernier, le Conseil d’Etat a considéré que le pétitionnaire bénéficiant d’un certificat d’urbanisme qui s’est vu opposer un refus irrégulier à sa demande de permis de construire, lequel a été annulé par le juge administratif, est en droit de voir sa demande de permis de construire initiale examinée au regard des dispositions d’urbanisme en vigueur à la date de délivrance du certificat d’urbanisme, quand bien même il aurait été délivré plus de 18 mois avant que l’autorité administrative compétente ne statue à nouveau sur cette demande.

 

Dans cette affaire, la société requérante, qui avait obtenu un certificat d’urbanisme pour la réalisation d’une opération mixte sur un terrain situé à Bagnolet (Seine-Saint-Denis) le 24 février 2014, a déposé, le 30 juillet suivant, une demande de permis de construire tendant à l’édification d’un ensemble immobilier de 4 589,65m², comprenant 941,95m² de surface commerciale et 51 logements.

Le Maire de la commune de Bagnolet a opposé un premier refus à la demande de permis de construire lequel a été annulé par un jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 13 octobre 2016 qui a, en outre, enjoint au Maire de Bagnolet de réexaminer la demande de la société requérante dans un délai de trois mois. Après un nouvel examen, le maire a opposé un second refus de délivrer le permis de construire, lequel a de nouveau été annulé par un jugement du 18 janvier 2018, le Tribunal ayant par ailleurs jugé que la société était bénéficiaire d’un permis de construire tacite depuis le 15 janvier 2017, résultant de l’injonction prononcée dans son précédent jugement.

Par suite, Mme D. et autres ont saisi le Tribunal administratif de Montreuil d’une demande tendant à l’annulation de ce permis de construire tacite ainsi que de la décision par laquelle le maire de Bagnolet a refusé de retirer ce permis. La société requérante se pourvoit en cassation contre le jugement du 6 novembre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil, faisant droit à leur demande, a annulé le permis de construire tacite et que le refus du Maire de le retirer.

C’est dans ce contexte que la Conseil d’Etat a été amené à se prononcer sur l’application des règles contenues dans les certificats d’urbanisme lorsqu’une demande de permis de construire a bien été déposée dans le délai de 18 mois imparti, mais qu’elle a été irrégulièrement refusée et que ce refus a été annulé par le juge administratif postérieurement à l’expiration du délai de 18 mois.

Il convient de rappeler qu’aux termes des dispositions de l’article L. 410-1 du Code de l’urbanisme :

« Le certificat d’urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d’urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d’urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l’opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l’état des équipements publics existants ou prévus. / Lorsqu’une demande d’autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d’un certificat d’urbanisme, les dispositions d’urbanisme, le régime des taxes et participations d’urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu’ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l’exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique […] ».

Le Conseil d’Etat a rappelé que ces dispositions ont pour effet « de garantir à la personne à laquelle a été délivré un certificat d’urbanisme, quel que soit son contenu, un droit à voir sa demande de permis de construire déposée durant les dix-huit mois qui suivent examinée au regard des dispositions d’urbanisme applicables à la date de ce certificat, à la seule exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique ».

Par suite, il a considéré que les pétitionnaires étaient « en droit [de] voir [leur] demande examinée au regard des dispositions d’urbanisme en vigueur à la date [du] certificat » et alors même que le certificat d’urbanisme avait été délivré plus de 18 mois avant que l’autorité administrative compétente ne statue à nouveau sur cette demande dont elle demeure saisie.

Le Conseil d’Etat a précisé qu’« il en va ainsi alors même que le demandeur n’est susceptible de bénéficier d’un permis tacite qu’à la condition d’avoir confirmé sa demande ».

Par suite, en jugeant que la société pétitionnaire ne pouvait bénéficier du maintien des règles d’urbanisme applicables à cette date, faute d’avoir demandé la prorogation du certificat d’urbanisme obtenu le 24 février 2014, la Cour administrative d’appel de Marseille a commis une erreur de droit dès lors que la demande initiale avait été déposé dans le délai de 18 mois prévu par l’article L. 410-1 du Code de l’urbanisme.