le 02/07/2015

Catastrophes naturelles et calamités publiques : les modalités de versement des indemnisations des réparations pour les dommages causés aux collectivités territoriales et leurs groupements précisées par décret

Depuis la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM), un fonds pour la réparation des dommages causés aux biens des collectivités territoriales et de leurs groupements par les calamités publiques (article L. 1613-7 du CGCT) est venu s’ajouter au fonds prévus pour les mêmes personnes publiques victimes d’une catastrophe naturelle (article L. 1613-6 du CGCT).

L’article L. 1613-7 annonçait l’adoption d’un décret précisant ses modalités d’application, ce qui est chose faite : le décret n° 2015-693 relatif à l’indemnisation des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des événements climatiques ou géologiques a été adopté le 18 juin 2015. Il institue un régime commun aux cas de dommages survenus à la suite d’une catastrophe naturelle ou d’une calamité publique, chacune ayant néanmoins quelques particularités s’agissant surtout des montants alloués (article R. 1613-1 et suivants du CGCT).

L’occasion de revenir sur le régime applicable aux indemnisations versée au titre de ces fonds avant la période estivale propice aux événements climatiques susceptibles d’engendrer des catastrophes naturelles voire des calamités publiques.

1/ Distinction entre catastrophe naturelle et calamité publique

L’article L. 125-1 du Code des assurances définit la catastrophe naturelle au regard de ses effets, c’est-à-dire des « dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises ».

Aucune définition légale ne précise en revanche le contour d’une calamité publique au sens juridique du terme. Selon la circulaire NOR INTK1405282C du 23 juin 2014 portant sur la réforme du dispositif relatif à l’indemnisation des victimes de catastrophes naturelles, codifié à l’article L. 125-1 du Code des assurances, les calamités publiques correspondent aux catastrophes naturelles d’une ampleur exceptionnelle. En réalité, la distinction entre les catastrophes naturelles et les calamités publiques s’établit en fonction du montant des dommages causés : plus ou moins 6 millions d’euros. En effet, l’article L. 1613-7 indique que le fonds créé pour les calamités publiques a pour objet de réparer les « dommages causés à certains biens de ces collectivités et de leurs groupements par des événements climatiques ou géologiques de très grande intensité affectant un grand nombre de communes ou d’une intensité très élevée lorsque le montant de ces dommages est supérieur à six millions d’euros hors taxes ».

Le décret du 18 juin 2015 distingue ainsi :
–    les subventions imputées sur le fondement de l’article L. 1613-6 du CGCT, relatif aux catastrophes naturelles, lorsque le montant des travaux à financer est inférieur à 6 millions d’euros ;
–    les subventions imputées au titre de l’article L. 1613-7 du CGCT, relatif aux calamités publiques, lorsque le montant des travaux à financer est supérieur à 6 millions d’euros.

2/ Les personnes susceptibles de prétendre au versement de subventions au titre des fonds « catastrophe naturelle » et « calamité publique » et les travaux susceptibles d’être indemnisés

Aux termes des articles L. 1613-6 et L. 1613-7 du CGCT les personnes publiques qui peuvent bénéficier des indemnisations au titre des fonds prévus par ces mêmes articles sont les communes de métropole et leurs groupements (les syndicats intercommunaux semblant toutefois exclus du versement d’indemnité au titre de l’article L. 1613-7), les syndicats mixtes fermés et les syndicats mixtes ouverts restreints ainsi que les départements et régions de métropole.

L’article L. 1613-7 cite également expressément parmi les collectivités bénéficiaires la collectivité territoriale de Corse, ce qui n’est pas le cas de l’article L. 1613-6.

S’agissant des travaux qui peuvent faire l’objet d’une subvention, aucune différence n’est faite entre ceux qui relèveraient du fonds « catastrophe naturelle » et ceux qui seraient indemnisés au titre du fonds « calamité publique ».

Les travaux indemnisables doivent concerner la réparation des dégâts causés aux biens suivants, appartenant aux collectivités et à leurs groupements :
–    les infrastructures routières et les ouvrages d’art ;
–    les biens annexes à la voirie nécessaires à la sécurisation de la circulation ;
–    les digues ;
–    les réseaux de distribution et d’assainissement de l’eau ;
–    les stations d’épuration et de relevage des eaux ;
–    les pistes de défense des forêts contre l’incendie ;
–    les parcs, jardins et espaces boisés appartenant au domaine public des collectivités territoriales ou de leur groupement.

L’article R. 1613-5 prévoit également l’indemnisation au titre des fonds précités des travaux urgents de restauration des capacités d’écoulement des cours d’eau.

3/ La procédure d’indemnisation

a/ La procédure d’indemnisation est identique, que la collectivité ait été victime d’une catastrophe naturelle ou d’une calamité publique, sauf quelques particularités :

–    la demande est adressée au Préfet dans un délai de deux mois suivant l’événement climatique. Passé ce délai, elle est irrecevable (article R. 1613-7 CGCT).

S’agissant du contenu de la demande, il convient de se référer à l’arrêté du 5 juin 2003 relatif à la constitution du dossier pour une demande de subvention de l’Etat pour un projet d’investissement, pris pour application du décret n° 99-1060 du 16 décembre 1999, relatif aux subventions de l’Etat pour des projets d’investissement. Il s’agit alors de fournir notamment les pièces nécessaires à la présentation du projet et à la présentation du porteur de projet.

L’article 3 du décret du 16 décembre 1999 prévoit toutefois que « pour l’examen des dossiers relevant de ses attributions, chaque ministre détermine, par arrêté, les pièces complémentaires qu’il considère nécessaires pour la constitution du dossier complet ». De sorte que le Ministre chargé des collectivités territoriales pourrait préciser, par arrêté, les pièces spécifiques supplémentaires qui devront être jointes à la demande de subvention au titre des fonds précités.

–    le Préfet procède alors à l’évaluation du montant des dégâts pour déterminer si les sommes seront versées au titre du fonds de l’article L. 1613-6 ou de l’article L. 1613-7 du CGCT. Il peut, pour ce faire, s’appuyer sur  la mission du Conseil général de l’environnement et du développement durable qui doit rendre son avis sur la recevabilité de la demande et sur le montant des dégâts dans un délai de 45 jours (la consultation de cette mission est obligatoire lorsque le montant global estimé des dégâts est supérieur à 600.000 euros hors taxes ou lorsque l’événement climatique ou géologique à l’origine des dégâts a touché plusieurs départements).

–    L’ancien article R. 1613-8 du CGCT prévoyait alors que le Préfet adressait au Ministre chargé des collectivités la demande de subvention et une proposition de subvention. Ces dispositions ont toutefois disparu, la procédure ne s’appliquant qu’en cas de calamité publique (article R. 1613-15 CGCT). Désormais, la décision d’accorder la subvention revient au représentant de l’Etat pour les subventions indemnisant les dommages survenus à la suite d’une catastrophe naturelle (article R. 1613-4 CGCT). Le Préfet fixe également le taux de subvention pour chaque opération de réparation, mais après que le Ministre des collectivités a fixé, pour chaque événement, le taux maximum d’indemnisation.

On relèvera également qu’une mission d’inspection peut intervenir en appui du Ministre chargé des collectivités territoriales lorsque le montant global des dégâts estimés est supérieur à 6 millions d’euros hors taxes ou que l’ampleur des dégâts et la difficulté des évaluations le justifient. Cette mission facultative donne son avis sur la recevabilité de la demande et sur le montant des dégâts dans un délai de 45 jours.

b/ S’agissant des délais d’instruction de la demande, ils ne sont pas précisés par le décret précité du 18 juin 2015, de sorte qu’il convient de se référer au décret du 16 décembre 1999. On notera ainsi que l’administration dispose d’abord d’un délai de deux mois pour indiquer au demandeur si son dossier est ou non complet, puis d’un délai de six mois à compter de la date à laquelle le dossier est réputé complet pour répondre à la demande de subvention (article 5).

On peut s’interroger sur l’articulation de la procédure d’indemnisation au titre des fonds d’aides aux collectivités avec celle de la reconnaissance d’état de catastrophe naturelle prévue à l’article L. 125-1 du Code des assurances : l’état de catastrophe naturelle doit-il être reconnu avant le versement de subvention à la collectivité qui le demande ?

c/ En principe, aucun commencement d’exécution n’est autorisé avant que le dossier ne soit déclaré complet. Une exception est toutefois prévue par l’article R. 1613-7 qui indique qu’en cas d’urgence, le représentant de l’Etat peut notifier, par décision revêtue du visa de l’autorité chargée du contrôle financier, que le commencement d’exécution des travaux avant la date à laquelle le dossier est complet n’entraîne pas un rejet d’office de la demande de subvention. Le demandeur informe le représentant de l’Etat du commencement de leur exécution.

L’avance qui peut être versée au moment du commencement d’exécution peut atteindre jusqu’à 20 % du montant prévisionnel de la subvention (et non plus 15% comme cela était prévu par le décret du 20 juillet 2000 pris pour l’application du décret n° 99-1060 du 16 décembre 1999 relatif aux subventions de l’Etat pour les projets d’investissement que le décret du 18 juin 2015 abroge).

4/ Les montants alloués au titre des fonds « catastrophe naturelle » et « calamité publique »

Le montant de l’indemnité versée au titre du fonds « catastrophe naturelle » est décidé par le Préfet en fonction des taux maximums prévus à l’article R. 1613-9 du CGCT, c’est-à-dire :
–    un taux de 80 % du montant total des subventions qui peuvent être attribuées à des collectivités et des groupements d’un même département, lorsque le montant des dégâts subis est supérieur à 50 % de leur budget total ;
–    un taux de 40 % lorsque le montant des dégâts subis est compris entre 10 % et 50 % de leur budget total ;
–    un taux de 20 % lorsque le montant des dégâts subis est inférieur à 10 % du budget total.

Les subventions accordées ne doivent pas en principe dépasser le montant total maximum déterminé par le produit du montant total des dégâts éligibles par un taux arrêté par le Ministre chargé des collectivités territoriales et du budget.

S’agissant des subventions allouées au titre du fonds « calamité publique » le Ministre chargé des collectivités territoriales et le Ministre chargé du budget fixent, pour chaque événement, le taux maximum d’indemnisation à l’intérieur de la fourchette prévue à l’article R. 1613-15 du CGCT et décident du montant total de subventions susceptibles d’être accordées aux collectivités territoriales et aux groupements d’un même département en fonction de l’évaluation des dégâts éligibles. Le Préfet fixe ensuite le taux de subvention pour chaque opération au regard des taux maximums précités et de l’évaluation des dégâts éligibles.