Dans un arrêt, mentionné aux Tables, du 12 juillet 2024, le Conseil d’État précise de manière inédite les critères de l’intérêt à intervenir d’une région en cassation dans le cadre d’un contentieux de l’autorisation environnementale en matière éolienne. La Cour administrative d’appel de Lyon a annulé la décision de refus du préfet de Haute-Loire de délivrer une autorisation environnementale délivrée à la Société Boralex Massif du Dèves d’exploiter un projet de quatre éoliennes et deux postes de livraison. L’arrêt a fait l’objet d’un pourvoi en cassation par différentes associations. Devant le Conseil d’État, la région Auvergne Rhône-Alpes est intervenue au soutien du pourvoi formé par les associations contre l’arrêt de la Cour administrative d’appel
L’intérêt de l’arrêt du 12 juillet 2024 réside spécifiquement dans sa prise en compte de l’intérêt à intervenir de la région Auvergne Rhône-Alpes en matière de contentieux éolien.
Suivant les conclusions du rapporteur public M. Frédéric Puigserver (conclusions sous CE, 12 juillet 2024, Société Boralex Massif du Dèves, n° 464958, disponibles ici), le Conseil d’État admet l’intervention de la région Auvergne Rhône-Alpes, au regard de « ses compétences en matière de développement touristique régional » et, de manière plus concrète, à raison de l’impact potentiel du projet sur des « sites et monuments d’intérêt majeur au plan régional tels que la cathédrale du Puy-en-Velay, inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO », motivant ainsi l’intérêt à intervenir de la région. À ce titre, « [l’] intervention [de la région] est, par suite, recevable ».
Cette jurisprudence concernant l’intérêt à intervenir entre en écho avec un arrêt antérieur du Conseil d’État à l’espèce analogue (CE, 1er décembre 2023, Région Auvergne Rhône-Alpes, n° 470723, article précédent), relatif lui à l’intérêt à agir de la région dans le cadre d’un contentieux de l’autorisation environnementale en matière d’éolienne. Selon cet arrêt, l’intérêt à agir des collectivités territoriales à l’égard d’une autorisation environnementale s’apprécie à l’aune des compétences et intérêts que la collectivité a à sa charge et de sa situation propre. En l’espèce, la région Auvergne Rhône-Alpes avait vu son intérêt à agir rejeté faute de « responsabilité en matière de protection des paysages et de la biodiversité contre les atteintes que l’installation d’éoliennes pourrait provoquer sur son territoire et que la circonstance qu’elle ait adopté un schéma régional par lequel elle définit des objectifs relatifs aux projets éoliens est insusceptible de lui conférer un intérêt direct pour contester l’autorisation en cause ».
Une analyse parallèle de ces deux arrêts permet de conclure à une appréciation de l’intérêt à agir plus rigoureuse que celle de l’intérêt à intervenir des collectivités territoriales, du moins dans le contentieux de l’autorisation environnementale pour des projets éoliens. En effet, à la lumière des conclusions du rapporteur public, l’approche moins rigoureuse du Conseil d’État concernant l’intérêt à intervenir s’explique par les prérogatives plus limitées, sur le plan contentieux, de la personne intervenante comme l’absence de la qualité de partie à l’instance ou l’impossibilité de présenter des conclusions propres.