le 15/03/2017

Appréciation par le Conseil d’état de l’utilité d’une mesure d’expertise

CE, 14 février 2017, n° 401514

L’expertise judiciaire est, dans de nombreux domaines, le préalable à une action contentieuse devant le Juge du fond. En effet, l’expert judiciaire éclaire le Juge saisi sur des éléments d’ordre technique lui permettant ainsi de définir notamment les responsabilités.

La demande d’expertise est fondée, sur les dispositions de l’article R. 531-1 du Code de justice administrative lequel dispose que « le juge des référés peut, sur simple requête et même en l’absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d’expertise ou d’instruction ».

Si le principe est que l’expertise judiciaire ne peut avoir pour objet de palier la carence du demandeur dans l’établissement de preuve, il est toutefois très rare que le Juge des référés refuse de faire droit à une demande de désignation d’expert.

Toutefois, le Conseil d’Etat vient de rappeler qu’il ne peut systématiquement être fait droit à ce type de demande. En effet, si le Juge des référés saisi n’est pas compétent pour apprécier le fond du dossier, il n’en demeure pas moins qu’il conserve le pouvoir d’apprécier l’utilité d’une expertise.

La Haute juridiction administrative a en effet jugé que l’utilité d’une telle demande doit être appréciée « d’une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d’autres moyens et, d’autre part, bien que ce Juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l’intérêt que la mesure présente dans la perspective d’un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher ; qu’à ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d’expertise lorsque, en particulier, elle est formulée à l’appui de prétentions qui ne relèvent manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative, qui sont irrecevables ou qui se heurtent à la prescription ; que, de même, il ne peut faire droit à une demande d’expertise permettant d’évaluer un préjudice, en vue d’engager la responsabilité d’une personne publique, en l’absence manifeste de lien de causalité entre le préjudice à évaluer et la faute alléguée de cette personne ».

Ainsi, le Juge des référés qui est « juge de l’évidence » peut rejeter une demande d’expertise en raison de son inutilité s’il estime qu’une demande ultérieure au fond n’a aucune chance de prospérer.