le 04/07/2019

Annulation partielle de l’arrêté réglementant l’utilisation des pesticides

CE, 26 juin 2019, Association générations futures et Association eau et rivières de Bretagne, n° 415426 et n° 415431

Par son arrêt rendu le 26 juin 2019 (CE, 26 juin 2019, nos 415426 et 415431, Association générations futures et Association eau et rivières de Bretagne), le Conseil d’Etat a annulé partiellement l’arrêté du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants visés à l’article L. 253-1 du Code rural et de la pêche maritime (CRPM).

Cet article L. 253-1 du CRPM pose les règles spécifiques relatives à la mise sur le marché, la distribution et l’utilisation des produits phytopharmaceutiques. Par ailleurs, l’article L. 253-7 du même code précise que « l’autorité administrative peut, dans l’intérêt de la santé publique ou de l’environnement prendre toute mesure d’interdiction, de restriction ou de prescription particulière ».

Il faut rappeler que l’article L. 253-7 transpose l’article 12 de la directive européenne 2009/128/CE du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable qui exige des Etats membres qu’ils veillent à limiter ou interdire l’utilisation des pesticides dans certaines zones spécifiques, en « tenant dûment compte des impératifs d’hygiène, de santé publique et de respect de la biodiversité ou des résultats des évaluations des risques appropriées ».

L’arrêté du 4 mai 2017, qui succède à un arrêté déjà critiqué du 12 septembre 2006, a été pris en application de cet article L. 253-7 du CRPM pour préciser les conditions d’utilisation des pesticides.

Le Conseil d’Etat, saisi de la légalité de l’arrêté du 4 mai 2017, se fonde donc sur les articles L. 253-1 et L. 253-7 du CRPM ainsi que sur l’article 12 de la directive 2009/128 pour affirmer le principe suivant :

« 7. Il appartient à l’autorité administrative […] de prendre toute mesure d’interdiction, de restriction ou de prescription particulière, s’agissant de la mise sur le marché, de la délivrance, de l’utilisation et de la détention de produits phytopharmaceutiques, qui s’avère nécessaire à la protection de la santé publique et de l’environnement ».

Ce faisant, le Conseil semble établir une obligation à la charge de l’administration de fixer les règles d’utilisation des pesticides qui sont nécessaires à la protection de la santé et de l’environnement, quand l’article L. 253-7 du CRPM, précité, ne parle que d’une possibilité.

En l’espèce, le Conseil d’Etat a partiellement annulé l’arrêté du 4 mai 2017 en raison de ses nombreuses insuffisances en la matière, et, en particulier, en raison de l’absence de mesure de protection des riverains des zones traitées (considérant 9).

Le Conseil d’Etat retient également que l’arrêté attaqué aurait dû prévoir un délai pour le retour des travailleurs ou de toute autre personne sur une zone où des pesticides ont été utilisés, dans l’hypothèse où ces produits ont été utilisés sur des sols vierges de végétation (considérant 9).

Par ailleurs, il souligne que l’arrêté, qui ne régit que les techniques de pulvérisation et de poudrage, aurait également dû encadrer d’autres méthodes de dispersion des produits phytosanitaires, telles l’épandage de granulés ou l’injection de produits dans les sols car ces méthodes présentent aussi un risque de contamination des eaux de surface en dehors du site traité par ruissellement (considérant 17).

Enfin, le Conseil d’Etat dispose que l’arrêté attaqué aurait dû prévoir des mesures précises d’interdiction ou de limitation de l’utilisation de pesticides afin d’éviter ou de réduire le risque de pollution par ruissellement en cas de forte pluie (considérant 18).

Au terme de la décision ici examinée, l’Etat dispose d’un délai de six mois pour adopter les mesures réglementaires qui s’imposent à la suite de l’annulation partielle de l’arrêté du 4 mai 2017.