le 28/08/2015

Annulation d’un scrutin municipal du fait de la divulgation préférentielle en cours de scrutin de renseignements obtenus à partir des listes d’émargement

CE, 29 juin 2015, Elections Municipales d’Apt, n° 385767

Par un arrêt en date du 29 juin 2015 (n° 385767), le Conseil d’État est venu casser le jugement du Tribunal administratif de Nîmes du 16 octobre 2014 (n° 1401242).

Il annule ainsi les élections municipales de la commune d’Apt (11.150 habitants) considérant que certains membres de bureau de vote avaient, « consulté à plusieurs reprises les listes d’émargement des bureaux de vote en vue d’identifier les personnes n’ayant pas voté et de communiquer à l’extérieur les informations ainsi recueillies », ce qui aurait eu pour conséquence « d’exhorter les électeurs à participer au vote », au bénéfice d’une des listes candidates.

S’inscrivant par suite, dans le sens de précédents arrêts (voir notamment CE, 10 octobre 1984, El. Municipales de Houilles, Lebon 146 ; CE, 9 mars 1990, El. Municipales de Grand-Couronne, Lebon 84), le Conseil d’Etat réaffirme que « la divulgation préférentielle de renseignements nominatifs au cours du scrutin et l’octroi, dans cette mesure, de facilités particulières au profit des candidats d’une des listes en présence» est de nature à porter « atteinte à l’égalité des moyens dont les différents candidats peuvent légalement user », entraînant une possible entrave à la liberté de choix des électeurs.

Au demeurant, « compte tenu de l’écart de voix » (13 voix entre les deux premières listes), il juge que « cette manœuvre doit être regardée comme ayant été de nature à altérer la sincérité du scrutin ».

Au-delà du rappel de la potentialité de voir annuler un scrutin à la suite de la reconnaissance des agissements susmentionnés, il peut être noté que sont ici jugées suffisamment probantes à caractériser cette manœuvre « dix attestations concordantes » ainsi qu’une « feuille annexée au procès-verbal du bureau de vote n° 1 signée par trois membres de ce bureau et par un assesseur suppléant ».

Or, il peut pourtant être indiqué que le Rapporteur public sur cette affaire avait conclu au contraire à un défaut de preuve suffisante de nature à considérer établis les faits reprochés et par suite invitait la juridiction à ne pas annuler le scrutin.