le 15/03/2018

Annulation d’un avenant à un contrat de concession : modification substantielle et clause réglementaire.

CE, 9 mars 2018, Commune du Mont-Saint-Michel, n° 409972

Par la décision du 9 mars 2018, le Conseil d’Etat rappelle le principe d’interdiction des modifications substantielles des contrats de concession et annule un avenant après avoir apprécier la contrepartie d’une hausse des tarifs payés par les usagers vis-à-vis des obligations mises à la charge du concessionnaire.
Depuis 2009, les parcs de stationnement et les navettes du Mont-Saint-Michel sont exploités dans le cadre d’un contrat de délégation de service public par la SAS Compagnie des parcs et passeurs du Mont-Saint-Michel.
Fin 2013, le président du syndicat mixte de la baie du Mont-Saint-Michel avait été autorisé à signer avec la SAS Compagnie des parcs et passeurs du Mont-Saint-Michel (qui est venu aux droits de la société Véolia Transport) un cinquième avenant au contrat de concession pour la construction et l’exploitation des ouvrages et services d’accueil signé le 6 octobre 2009.
Cet avenant modifiait, d’une part, les obligations à la charge du concessionnaire (changement du point d’embarquement des voyageurs des navettes, et modification du service de navettes hippomobiles), et d’autre part, la grille tarifaire applicable aux usagers.
Dans un jugement du 17 novembre 2015, saisi des recours en excès de pouvoir du maire de la commune du Mont-Saint-Michel et de la société d’hôtellerie et de restauration « Sodetour », le Tribunal administratif de Caen a annulé la délibération autorisant le président du Syndicat à signer l’avenant n° 5, ainsi que la décision du président de signer ledit avenant n°5 en tant qu’il modifiait la grille tarifaire du contrat. La SAS Compagnie des parcs et passeurs du Mont-Saint-Michel a contesté la régularité du jugement devant la Cour administrative d’appel de Nantes, qui a rejeté la requête en appel par l’arrêt du 22 février 2017 contre lequel la SAS s’est alors pourvue en cassation devant le Conseil d’Etat.
Dans la décision commentée, le Conseil d’Etat confirme la jurisprudence constante à deux égards :
– Un avenant à un contrat de concession ne peut modifier, ni son objet, ni de manière substantielle l’un de ses éléments essentiels comme la durée, le volume des investissements ou les tarifs ;

– Lorsqu’un requérant ayant qualité à agir estime qu’un avenant modifie les tarifs de manière importante, cet avenant (ou les stipulations que ledit avenant modifie) peut être contesté par la voie d’un recours en excès de pouvoir dans la mesure où les clauses tarifaires ont un caractère réglementaire.
Puis, le Conseil d’Etat ajoute que : « les tarifs sont au nombre des éléments essentiels qui concourent à l’équilibre économique du contrat ».
Et, en l’espèce, le Conseil d’Etat a jugé que la modification opérée par l’avenant litigieux est substantielle dans la mesure où les hausses de tarifs (comprises entre 31 et 48 %) « allaient (…) au-delà de la compensation des augmentations de charges liées aux modifications des obligations du délégataire convenues » dont des investissements et charges d’exploitation supplémentaires résultant du changement de point de départ des navettes, et se traduit in fine « par une augmentation de plus d’un tiers des recettes ».
En définitive, la modification à la hausse des tarifs n’est substantielle qu’en ce qu’elle modifie « l’équilibre économique du contrat » de la concession, notion que l’on retrouve désormais au b) du 5° de l’article 36 du décret n° 2016-86 du 1er février 2016 relatif aux contrats de concession .
Par suite, le Conseil d’Etat rejette le pourvoi de la SAS et confirme l’annulation par la Cour des clauses tarifaires de l’avenant relatives aux navettes sur la baie du Mont-Saint-Michel – avenant qui aurait justifié la mise en place d’un nouvel appel d’offres.