le 21/01/2021

Absence d’obligation pour l’acheteur de prévoir un critère d’analyse des offres portant sur le respect par les soumissionnaires de normes européennes de sécurité applicables aux prestations objet du marché

CE, 24 décembre 2020, Région Provence-Alpes-Côte d'Azur, n° 445078

Par un arrêt en date du 24 décembre 2020, le Conseil d’Etat est venu préciser que lorsque les offres devant être présentées pour la passation d’un marché doivent respecter des normes européennes de sécurité, les acheteurs n’ont pas l’obligation d’imposer aux soumissionnaires qu’ils produisent des justificatifs à l’effet de démontrer le respect de ces normes, non plus celle de prévoir un critère de notation des offres spécifique portant sur le respect de ces normes.

S’agissant du contexte, rappelons que la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, en tant que coordonnateur d’un groupement de commande constitué de sept lycées, a lancé une procédure d’appel d’offres ouvert pour la passation d’un accord-cadre mono-attributaire portant sur la fourniture et la maintenance de déshydrateurs thermiques et la collecte, le transport et la valorisation des biodéchets dans le cadre du projet européen « Life IP Smart Waste ».

Informé par la Région du rejet de son offre classée en seconde position, la société Cuisine froid professionnel a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, sur le fondement de l’article L. 551-1 du Code de justice administrative, d’annuler cette décision et la procédure de passation de ce marché.

Le juge des référés du Tribunal administratif de Marseille ayant annulé la procédure et l’ayant enjoint, si elle entendait conclure un marché ayant le même objet, de lancer une nouvelle procédure, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur s’est pourvue en cassation contre l’ordonnance du 18 septembre 2020.

Le Conseil d’Etat a censuré cette solution.

A cet effet, il a tout d’abord rappelé la solution dégagée dans sa décision Métropole Nice Côte d’Azur (CE, 5 février 2018, n° 414508) selon laquelle : « lorsque, pour fixer un critère ou un sous-critère d’attribution du marché, le pouvoir adjudicateur prévoit que la valeur des offres sera examinée au regard d’une caractéristique technique déterminée, il lui incombe d’exiger la production de justificatifs lui permettant de vérifier l’exactitude des informations données par les candidats ».

Ensuite, le Conseil d’Etat a considéré qu’« en estimant, pour juger que la région avait manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence, que le respect effectif des normes européennes constituait une exigence précise, impliquant la production de justificatifs, sanctionnée par le système d’évaluation des offres, alors que le règlement de la consultation se bornait à prévoir que l’ergonomie des équipements constituait un élément d’appréciation du critère de la valeur technique, sans que cette exigence, au demeurant générale, soit assortie de conséquences directes sur la notation des offres, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis ».

Et, réglant l’affaire au titre de la procédure de référé engagée en application de l’article L. 821-2 du Code de justice administrative, le Conseil d’Etat a précisé que, au regard du considérant précité, « la région Provence-Alpes-Côte d’Azur n’était pas tenue d’exiger des documents permettant d’assurer le respect des normes européennes de sécurité des personnes par les candidats et leurs équipements » mais aussi que « le pouvoir adjudicateur, qui était libre de choisir les critères d’attribution du marché dès lors qu’ils lui permettaient de déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse, n’a pas davantage commis de manquement à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en ne prévoyant pas de critère de notation spécifique portant sur le respect de ces normes ».

Par ailleurs, cette décision est instructive en ce que le Conseil d’Etat y a jugé qu’une offre « ne saurait être regardée comme ne respectant pas les exigences du règlement de la consultation au seul motif que le prix qu’elle propose est inférieur au montant minimum de l’accord-cadre figurant dans le règlement de la consultation ».