le 19/11/2020

Absence de manquement du maître d’oeuvre à son obligation de conseil et qualité pour engager une action en garantie décennale

CAA Nantes, 16 octobre 2020, n° 19NT02658

Il s’agit ici d’une nouvelle application du principe bien établi du devoir de conseil du maître d’œuvre que les juridictions administratives sont très régulièrement amenées à apprécier, comme, par exemple, dans la décision du Conseil d’Etat du 8 janvier 2020 n° 428280 que nous avions déjà commentée dans notre lettre d’actualité juridique de janvier.

Dans cette affaire également, la Cour rappelle les conditions d’engagement de la responsabilité contractuelle du maître d’œuvre, soit le fait de s’être abstenu d’attirer l’attention du maître d’ouvrage sur des désordres affectant l’ouvrage et dont il pouvait avoir eu connaissance en cours de chantier.

En l’espèce, la Cour ne retient aucun manquement du maître d’ouvrage à son devoir de conseil, au motif que :

« au vu en particulier du rapport d’expertise, il ne résulte de l’instruction ni que la fissuration de la cuve de la fosse septique installée chez M. A… ait été présente ou susceptible d’être décelée en cours de chantier, ni que la société SNE Quantitec ait eu connaissance de défauts d’exécution des travaux en lien avec les désordres constatés en 2015 qu’elle ne pouvait manquer de relever afin de proposer une réserve lors de la réception ».

Il est également intéressant de souligner le contexte particulier d’intervention de la communauté de communes, appelante dans cette affaire, pour la réalisation des travaux litigieux qui avait entrepris de faire réhabiliter les installations d’assainissement non-collectif de personnes privées avec qui elle avait conclu des conventions aux termes notamment desquelles elle choisissait les équipements d’assainissement ainsi que l’entrepreneur chargé de les installer.

La communauté de communes n’était donc pas propriétaire des ouvrages faisant l’objet des travaux de réhabilitation, et n’avait corrélativement pas la qualité de maître d’ouvrage.

La Cour a ainsi considéré qu’elle n’était pas directement détentrice de l’action en garantie décennale et n’avait donc pas qualité pour demander à être indemnisée, au titre de cette garantie, du montant des travaux nécessaires à la réparation de l’ouvrage, à savoir une cuve de fosse septique fissurée.

Et ce, nonobstant l’existence d’une clause dans la convention prévoyant que le propriétaire était tenu d’informer la communauté de communes des désordres affectant l’ouvrage et reconnaissait que cette dernière était seule détentrice d’une action en responsabilité fondée sur la méconnaissance des obligations contractuelles des constructeurs.

La Cour considère qu’une telle convention n’avait pour objet ou pour effet ni de subroger la communauté de communes dans les droits du maître d’ouvrage privé aux fins d’exercer une action en garantie décennale ni de lui permettre, à un autre titre, d’exercer une telle action au nom et pour le compte d’un propriétaire privé.