Propriété intellectuelle
le 13/11/2025
Gabrielle LAMBERT
Mathis DUQUESNAY

Nullité d’une cession de la marque éponyme d’une commune à des fins commerciales : le cas de la marque « Vendôme »

TA d’Orléans, 5ème, 24 septembre 2025, n° 2102661

Le Tribunal administratif d’Orléans, dans une décision n° 2102661 en date du 24 septembre 2025, s’est prononcé sur la cession de l’usage d’un nom d’une collectivité territoriale à des fins commerciales. Cette situation fait suite à un recours pour excès de pouvoir formé par l’association de défense du patrimoine de la commune « Vendôme, notre patrimoine », à l’encontre d’une délibération de 2021 autorisant la cession de la marque de la commune de Vendôme, au profit du groupe LVMH.

De son côté, la Commune soutenait notamment qu’il n’y avait lieu à statuer car l’INPI avait déclaré nulle la marque « Vendôme », rendant la cession sans effet.

Le tribunal a finalement considéré que le litige conservait son objet, la délibération litigieuse n’ayant été ni retirée ni abrogée.

Plus précisément, la Commune avait cédé l’utilisation non exclusive de la marque éponyme « Vendôme » visant les produits de joaillerie[1] (classe 14), pour une durée de dix ans,[2] permettant au groupe LVMH de lancer une collection de bijoux désignée sous ce nom, pour un montant forfaitaire de 10.000 €.

Contestant la délibération du conseil municipal de la Commune autorisant cette cession, l’association, fondant son intérêt à agir sur son objet social, a introduit un recours pour excès de pouvoir pour la faire annuler.

Selon l’association, la marque était inaliénable car elle fait partie du domaine public de la commune mais également en ce qu’elle porterait atteinte aux droits antérieurs de la Commune sur son nom. De surcroît, elle considérait que le prix était dérisoire et .

Le tribunal a tout d’abord considéré que la marque « Vendôme » appartenait au domaine privé de la Commune, n’étant ni affectée à l’usage direct du public ni à un service public, et n’étant pas un accessoire indissociable à un bien du domaine public. Il a d’autre part considéré que la cession portait sur un droit d’usage non exclusif et limité dans le temps, pour en déduire que le principe d’inaliénabilité des biens relevant du domaine public n’avait pas été méconnu.

Le tribunal a ensuite jugé que la cession ne portait pas non plus atteinte au droit de la Commune sur son nom, car elle était non exclusive et donc ne la privait pas de son droit d’utilisation.

Néanmoins, le Tribunal, après avoir relevé que bien que le domaine privé relevât d’une libre gestion par la Commune, celle-ci se devait de respecter le principe « d’une bonne gestion », a constaté qu’aucun élément ne justifiait les modalités de calcul fixant le montant de la cession l’empêchant d’exercer son contrôle sur le montant fixé. Il a en conséquence jugé que la délibération était entachée d’excès de pouvoir et l’a donc annulée.

Ainsi, si la délibération a finalement été annulée, le juge ne s’est pas prononcé sur la possibilité pour une commune de céder ou non un droit d’utilisation de son nom déposé à titre de marque, à des fins commerciales, seule l’absence de justification du prix ayant été sanctionnée dans cette affaire.

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[1] La classe 14 qui comprend les produits relatifs à la bijouterie ; en l’espèce la marque était enregistrée pour les produits de « Joaillerie ; bijouterie ; pierres précieuses ; horlogerie et instruments chronométriques ; métaux précieux et leurs alliages ; monnaies ; objets d’art en métaux précieux ; coffrets à bijoux ; boîtes en métaux précieux ; boîtiers, bracelets, chaînes, ressorts ou verres de montre ; porte-clefs (anneaux brisés avec breloque ou colifichet) ; statues en métaux précieux ; figurines (statuettes) en métaux précieux ; étuis pour l’horlogerie ; écrins pour l’horlogerie ; médailles »