La Mission d’information de l’Assemblée nationale consacrée aux modes de gestion et d’exploitation des installations hydroélectriques a rendu ses conclusions le 17 mai 2025.
Pour mémoire, depuis de nombreuses années, la France s’oppose à la Commission européenne sur l’ouverture à la concurrence des concessions hydroélectriques, deux procédures précontentieuses étant actuellement en cours à ce propos, la première ayant été initiée en 2015 et la seconde en 2019.
En effet, le droit européen prévoit depuis 1996 l’obligation de mettre en concurrence les concessions hydroélectriques avec certaines exceptions qui ont été levées au fur et à mesure, notamment par la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l’attribution de contrats de concession.
En l’absence de résolution du différend, de nombreuses concessions sont arrivées, ou vont arriver, à échéance, et sont gérées selon le dispositif dit des « délais glissants » (art. L. 521-16 du Code de l’énergie), lequel n’est toutefois pas propice à la réalisation d’investissements de développement, faute en particulier de visibilité claire sur le terme des contrats, et ce au détriment des capacités hydroélectriques nationales.
Explorant les solutions susceptibles de mettre un terme au différend, la mission d’information consacrée aux modes de gestion et d’exploitation des installations hydroélectriques conclut que deux solutions doivent être privilégiées pour sortir de l’impasse actuelle.
Tout d’abord, le passage d’un régime concessif à un régime d’autorisation comme cela existe pour les centrales photovoltaïques et les parcs éoliens est envisagé.
Une telle réforme nécessiterait néanmoins de modifier le régime de propriété des ouvrages hydroélectriques, en principe en procédant à leur cession à des acteurs économiques, bien que la mission souhaite préserver la propriété publique de ces derniers.
Consciente des inquiétudes que génèrerait une telle réforme compte tenu de la réduction du contrôle de la puissance publique sur les ouvrages hydroélectriques, la mission identifie les garanties suivantes à apporter en cas de passage au régime d’autorisation :
- Prévoir des prescriptions permettant de maintenir un contrôle de la puissance publique, notamment relative à la sécurité d’approvisionnement, la sûreté et la gestion de la ressource en eau ; cela passerait notamment par des obligations d’investissement.
- Maintenir la qualification d’ouvrage public des ouvrages hydroélectriques,
- Mettre en place un régime de redevances au bénéfice des collectivités traversées par les cours d’eau exploités (dispositif qui est déjà prévu en l’état des textes pour les ouvrages concédés),
- Prévoir l’application des règles de quasi-domanialité publique en cas de cession des ouvrages.
La mission reconnaît que cette solution ne répond pas à la problématique soulevée par la Commission européenne et qui concerne l’absence de libre concurrence dans l’accès aux profits des ouvrages hydroélectriques et non seulement dans l’exploitation de ces derniers.
Aussi, la mission identifie la nécessité de mettre en place d’un système de contrepartie qui devrait bénéficier aux fournisseurs d’électricité ne profitant pas de l’exploitation du parc de centrales hydroélectriques.
La mission indique que la Commission européenne s’est montrée ouverte à cette idée.
Ensuite, une révision de la directive concessions afin d’exempter les activités hydroélectriques du champ de la commande publique est préconisée.
Les rapporteurs de la mission reconnaissent eux-mêmes que le succès d’une telle démarche au niveau européen est douteux.
Il serait en effet nécessaire que la France parvienne à convaincre un nombre important d’États Membres pour que la Commission européenne accepte d’entreprendre une telle réforme, ce qu’elle n’est jamais parvenue à faire durant les vingt années de litiges avec à la Commission.
En revanche, la mission exclut le statut quo, la prolongation des contrats en contrepartie de la réalisation de travaux, la création d’un Établissement Public Industriel et Commercial, la qualification de service d’intérêt économique général (SIEG) et la solution de la mise en quasi régie, qui est rejetée par les acteurs qu’elle a auditionnés et qui aurait pour conséquences de renforcer la position dominante d’EDF ou, en cas de scission de l’activité hydroélectrique, qui nécessiterait la mise en place d’une « muraille de Chine » entre les activités hydroélectriques et le reste du groupe EDF.
Enfin, dans le prolongement de la parution du rapport de la mission d’information, une consultation publique a été lancée le 22 mai 2025 par la direction générale de l’énergie et du climat afin d’évaluer l’intérêt pour les acteurs du marché de l’électricité de produits représentatifs de différents types de centrales hydroélectriques. Cette consultation se clôturera le 15 juin 2025.