Environnement, eau et déchet
le 10/10/2024
Simon JUPIN-BOSSERSimon JUPIN-BOSSER

Installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) : appréciation de la nécessité de soumettre un projet à autorisation au regard de la sensibilité des milieux

CAA Nantes, 1er octobre 2024, n° 24NT00242

Un récent arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes du 1er octobre 2024 illustre la mise en œuvre de l’article L. 512-7-2 du Code de l’environnement dans le cadre d’un projet d’installation de méthanisation. Il témoigne également de la conciliation délicate entre production d’énergies renouvelables et protection de la biodiversité et des milieux.

Le projet litigieux a la capacité de traiter une « quantité de matières d’origine agricole et agro-industrielle de 90 tonnes par jour en moyenne ». En principe, ce type d’installation est soumis au régime de l’enregistrement au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement (ci-après « ICPE »).

L’article L. 512-7-2 du Code de l’environnement offre la possibilité au préfet de faire basculer un projet – soumis à enregistrement – vers la procédure de l’autorisation, impliquant la mise en œuvre d’une évaluation environnementale, soit « […] au regard de la localisation du projet […] la sensibilité environnementale du milieu le justifie », soit si « […] le cumul des incidences du projet avec celles d’autres projets d’installations, ouvrages ou travaux situés dans cette zone le justifie […] ». L’appréciation de la sensibilité environnementale du milieu – retenue en l’espèce par le juge – est appréciée à l’aune des informations visées à l’annexe III de la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement, incluant par exemple une description du projet et des « effets importants que le projet proposé est susceptible d’avoir sur l’environnement ».

En l’espèce la quantité journalière moyenne de matière traitée se révèle « […] très proche de celle soumise à un régime d’autorisation de 100 tonnes par jour […] ». Au titre de la sensibilité environnementale du milieu, le juge souligne la proximité immédiate avec une ZNIEFF de type II et d’une zone humide, l’avis négatif du Conseil scientifique régional du patrimoine naturel, la localisation du projet au sein du bassin versant d’un cours d’eau ou encore l’insuffisance des mesures de compensation prévues pour pallier la destruction d’une haie jouant le rôle de corridor écologique.

La Cour conclut en indiquant que « le préfet ne pouvait légalement estimer, tant au regard de la localisation du projet, de ses caractéristiques, que du type et des caractéristiques de son impact potentiel, que celui-ci ne présentait pas une sensibilité environnementale justifiant la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 512-7-2 du Code de l’environnement ».

Par ailleurs, une régularisation au titre de l’article L. 181-18 du Code de l’environnement n’a pas été admise par le juge administratif qui a considéré que la disposition n’est pas applicable dans l’hypothèse d’une demande d’enregistrement instruite dans le cadre du régime de l’autorisation comme prévu à l’article L. 512-7-2 du Code de l’environnement.