le 05/03/2020

Les estimations des mesures foncières prévues aux plans de prévention des risques technologiques ne s’imposent pas aux décisions administratives futures de mise en œuvre du plan

CE, 12 février 2020, Société Frangaz, n° 424153

Le Conseil d’Etat a rendu une décision portant sur la possibilité d’invoquer les estimations des coûts des mesures foncières prévues aux plans de prévention des risques technologiques à l’appui d’une demande d’annulation de ce plan.

Le 14 novembre 2014, le préfet de l’Aude a approuvé un plan de prévention des risques technologiques (PPRT) autour des sites de la société Frangaz, autorisés au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement, sur la zone portuaire de la commune de Port-la-Nouvelle. La société a introduit un recours pour excès de pouvoir auprès du tribunal administratif de Montpellier tendant à l’annulation de l’arrêté préfectoral. La société entendait contester la pertinence du coût estimé des futures mesures d’indemnisation des mesures foncières éventuelles, et qui figurent au PPRT.

Le 22 novembre 2016, le Tribunal administratif a rejeté la demande. Le jugement est confirmé le 13 juillet 2018 par la Cour administrative d’appel de Marseille. La société a formé un pourvoi contre l’arrêt d’appel.

On notera ici que l’article L. 515-16 du Code de l’environnement prévoit un mécanisme d’acquisition, par les personnes publiques, des biens situés dans des secteurs où se présentent des risques pour la vie humaine. D’une part, l’article L. 515-16 II permet aux propriétaires de biens situés dans des secteurs où existent des risques importants d’accident présentant un danger grave pour la vie humaine de mettre en demeure la personne publique compétente en matière d’urbanisme de procéder à l’acquisition de leur bien. D’autre part, le III du même article permet à l’Etat, lorsque le même risque représente un danger très grave pour la vie humaine, de déclarer d’utilité publique l’expropriation des biens situés dans la zone concernée, au profit de la personne publique compétente en matière d’urbanisme. Dans ce cadre légal, l’article L. 515-19 du Code de l’environnement prévoit que l’ensemble des mesures d’acquisition et expropriation susvisées sont financées par l’Etat, les exploitations d’installations à l’origine du risques et les collectivités territoriales compétentes. Le plan de prévention des risques comprend, en vertu de l’article R. 515-41 du Code de l’environnement, une estimation indicative du coût de ces mesures foncières.

Le Conseil d’Etat a alors considéré que cette estimation indicative du coût des mesures foncières n’a pas pour objet de déterminer le montant des indemnités versées aux propriétaires faisant l’objet desdites mesures foncières, ni de fixer les modalités de financement de ces mesures. Le Conseil d’Etat en conclut dès lors que l’estimation ne peut pas être opposée aux futures décisions administratives prises pour mettre en œuvre le plan et que, partant, la non-pertinence des coûts estimés ne peut être utilement invoquée à l’appui de conclusions tendant à l’annulation du plan de prévention des risques.