le 07/11/2019

Tarifs réglementés de vente d’électricité : nouvelles précisions de la CRE en cas d’atteinte du plafond de l’ARENH en 2020

Délibération de la CRE du 30 octobre 2019 portant décision sur la méthode de répartition des volumes d’ARENH en cas de dépassement du plafond prévu par la loi et portant orientations sur les principes retenus pour le calcul du complément de prix

Délibération de la CRE du 17 octobre 2019 portant décision sur la méthodologie de prise en compte dans les tarifs réglementés de vente d’électricité pour l’année 2020 de l’éventuelle atteinte du plafond de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique au guichet de novembre 2019

 

Par délibérations en date des 17 et 30 octobre 2019, la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a précisé les règles qu’elle envisage d’appliquer en 2020 en cas de dépassement du plafond du dispositif de l’Accès Régulé à l’Energie Nucléaire Historique (ARENH) lors du guichet à venir de novembre 2019.

Introduit par la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l’électricité (dite « loi NOME »), le dispositif transitoire de l’ARENH permet aux fournisseurs alternatifs d’électricité d’acheter l’électricité produite par les centrales nucléaires de la société EDF à un prix régulé (art. L. 336-1 et suivants du Code de l’énergie). La quantité d’électricité à céder dans ce cadre ne peut excéder un plafond fixé par arrêté dans la limite de 100 TWh par an. Depuis l’arrêté du 28 avril 2011, ce plafond est fixé à son maximum légal.

Face à des prix élevés sur les marchés de gros de l’électricité, les demandes des fournisseurs pour bénéficier de l’ARENH pour l’année 2019 ont atteint un volume total de 133 TWh, dépassant le plafond de l’ARENH pour la première fois depuis sa création.

En conséquence de quoi, la CRE avait défini, par une délibération du 25 octobre 2018 une méthode visant à rationner (ou « écrêter ») le plafond de l’ARENH au prorata des volumes demandés par les fournisseurs, ainsi que des corrections apportées aux compléments de prix (appliquées en cas de demandes excédentaires ou excessives d’ARENH des fournisseurs).

Et ce rationnement ou « écrêtement » de l’ARENH avait été répercuté dans le calcul des tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVE) de l’année 2019 selon une méthode fixée par délibération de la CRE du 11 janvier 2018 et appliquée dans sa délibération du 7 février 2019.

De plus, la prochaine loi relative à l’énergie et au climat (art. 62-III) devrait prévoir une augmentation du plafond légal de l’ARENH à 150 TWh par an, ce qui permettrait au Gouvernement de relever le plafond à respecter dans cette même limite lorsque la loi sera en vigueur (cette dernière étant actuellement en cours d’examen devant le Conseil constitutionnel – voir notre Focus de juillet 2019).

Or, si un relèvement du plafond de l’ARENH n’est pas envisagé à ce jour selon les annonces du Gouvernement dans la presse, les demandes d’ARENH pour l’année à venir devraient être supérieures à celles de 2019, dépassant derechef le plafond de 100 TWH toujours en vigueur.

Dans ce contexte, les délibérations commentées apportent trois séries de précisions afin de (mieux) anticiper les règles d’attribution de l’ARENH en cas de demandes supérieures au plafond en 2020 et les conséquences de ce dépassement sur les tarifs réglementés de vente d’électricité.

S’agissant tout d’abord de la règle d’écrêtement de l’ARENH, la délibération du 30 octobre 2019 précise que la règle appliquée début 2019 sera reconduite en 2020 : elle s’appliquera aux nouvelles demandes d’ARENH des fournisseurs au guichet de novembre 2019, déduction faite des demandes effectuées au guichet précédent et restant à livrer.

De même, les demandes des filiales contrôlées par EDF dépassant le plafond seront écrêtées intégralement. Encore par sa délibération, la CRE vient également poser un cadre pour sanctionner le comportement d’un fournisseur qui demanderait des quantités « manifestement excessives » d’ARENH. Dans un tel cas, ces demandes excessives d’ARENH seront écrêtées intégralement. Le cas échéant, la CRE pourra n’attribuer aucun volume d’ARENH au fournisseur concerné. De plus, afin d’anticiper de telles situations, la CRE a par ailleurs d’ores et déjà demandé aux fournisseurs qui auraient des demandes plus élevées de justifier la prévision de consommation formulée dans leur dossier de demande, en cas d’augmentation substantielle par rapport à l’année 2019.

En outre, en cas d’abus de droit à l’ARENH au sens de l’article L. 134-26 du Code de l’énergie, la délibération donne la possibilité au Président de la CRE de saisir le CoRDIS d’une demande de sanction.

Concernant ensuite le calcul des compléments de prix en cas de dépassement du plafond ARENH en 2020, la CRE a indiqué, dans sa délibération du 30 octobre 2019, que le calcul de ces compléments de prix continuera de prendre en compte l’atteinte du plafond de l’ARENH, sous réserve de l’adoption d’un texte réglementaire sur ce point[1].

Pour ce qui est enfin de la méthode de prise en compte de l’écrêtement de l’ARENH dans le calcul des tarifs réglementés de vente d’électricité en 2020, la CRE a décidé, dans sa délibération commentée du 17 octobre dernier, d’appliquer sa précédente méthode.

Après avoir analysé les retours des participants à une consultation publique du 2 octobre 2019 sur sa proposition de lissage dans le temps des effets de l’écrêtement sur les tarifs, la CRE a finalement abandonné cette proposition, à « l’impact très modéré », face à un risque de « renchérissement du coût (…) pour les consommateurs ».

En définitive, en l’absence d’un relèvement du plafond de l’ARENH par le Gouvernement, ainsi que la future loi relative à l’énergie et au climat devrait le lui permettre jusqu’à 150 TWh, la CRE reconduit, pour 2020, l’essentiel des règles édictées pour le dépassement du plafond de l’ARENH au titre de l’année 2019, et en les anticipant davantage.

[1] Qui ferait suite à l’entrée en vigueur de l’article 62-II de la loi relative à l’énergie et au climat