le 06/04/2020

Rejet de la demande de mesures pour la mise à disposition de matériels aux personnels de santé

CE, 28 mars 2020, n° 439693

Une nouvelle action a été portée devant le Conseil d’Etat par les soignants afin de contraindre l’Etat à prendre des mesures permettant à ceux particulièrement exposés au virus Covid-19 de bénéficier des matériels nécessaires à leur protection. Elle est rejetée par le Conseil d’Etat.  

Les requérants demandaient qu’il soit enjoint à l’Etat d’adopter toutes décisions et mesures d’urgence afin de permettre leur approvisionnement suffisant en matériel et, par ailleurs, de prendre toutes les mesures de police et de réquisitions nécessaires afin de procéder à la fabrication ou à la remise des stocks suffisants de protections (masques FFP2, gel hydroalcoolique, surblouses, charlottes, gants, etc.). Ils invoquaient, à cet égard, la violation du droit à la vie, du droit ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants, du droit à la protection de la santé (le droit de recevoir les traitements et les soins les plus appropriés à son état de santé), et, enfin, des libertés d’entreprendre et du commerce et de l’industrie.   

S’agissant des matériels de protection autres que les masques, le juge a relevé qu’il n’existait pas de difficultés notables d’approvisionnement justifiant que d’autres mesures que celles existantes actuellement soient mises en œuvre au plan national.  

S’agissant des masques, en matière d’approvisionnement, le Conseil d’Etat relève que, depuis le début de l’épidémie – où le stock d’Etat était de 117 millions de masques anti-projections et alors qu’il n’en existait aucun pour les masques de type FFP2, c’est-à-dire ceux conçus pour protéger le porteur du masque – l’Etat a pris des mesures de réquisitionnement auprès de toute personne morale de droit public ou de droit privé et des entreprises de fabrication/distribution, bénéficié d’un certain nombre de dons et passé plusieurs commandes portant sur plusieurs centaines de millions de masques, cela devant conduire à ce qu’il dispose très prochainement de 24 millions de masques par semaine. Par ailleurs, il a relevé que la production de nouveaux types de masques, dont certains réutilisables, était à l’étude par des entreprises françaises, dont le développement est soutenu par l’Etat.  

En matière de distribution, le Conseil d’Etat considère qu’elle a eu lieu selon une « stratégie de gestion et d’utilisation maîtrisée », adaptée en fonction de l’évolution de l’épidémie et au regard des besoins théoriques de chaque profession.  

Le juge pointe toutefois le fait que la dotation en masques de type FFP2 est partielle et, par ailleurs, et que la dotation en masques chirurgicaux est par ailleurs insuffisante pour que les patients puissent en porter (afin d’éviter la contamination des soignants).  

Il considère néanmoins au total qu’il n’y a pas matière à prononcer les mesures sollicitées par les requérants, la situation devant nettement s’améliorer dans les jours et semaines à venir.  

En substance, le Conseil d’Etat considère donc que les mesures effectivement envisageables ont été mises en œuvre par le Gouvernement pour permettre la dotation des soignants en matériels de protection, et qu’aucune injonction de nature à avoir un prolongement concret ne pourrait malheureusement permettre d’améliorer la situation. 

Par Stella Flocco