le 23/09/2014

Présentation et état des lieux du PLUi après la loi ALUR (2ème partie) : entre refonte et modernisation

Avec le transfert automatique de la compétence PLU aux EPCI, l’objectif poursuivi par la loi ALUR est de promouvoir le PLUi comme le nouvel instrument de planification urbaine et d’améliorer le régime du PLUi tenant lieu de programme local de l’habitat et de plan de déplacement urbain (I).

Par ailleurs, la loi ALUR modifie sensiblement le régime des documents d’urbanisme (SCOT, PLU). Aussi sont réformés en profondeur non seulement les procédures d’élaboration, de révision et de modification d’un PLU par un EPCI mais encore, le contenu des plan locaux d’urbanisme intercommunaux (II).

I/ Le nouveau régime du PLUi tenant lieu de PLH et de PDU

L’article 137 de la loi ALUR a pour objectif d’améliorer le dispositif du plan local d’urbanisme intercommunal tenant lieu de programme local de l’habitat (PLH) et de plan de déplacement urbain (PDU). L’examen de ce nouveau dispositif (B) implique tout d’abord d’exposer le droit en vigueur (A).

I.1. Etat du droit avant l’entrée en vigueur de la loi ALUR

L’article L. 123-1-4 du Code de l’urbanisme, issu de la loi portant engagement national pour l’environnement du 12 juillet 2010, dispose que tout PLU, élaboré par un EPCI, doit comporter des Orientations d’Aménagement et de Programmation (OAP) tenant lieu de programme local de l’habitat (PLH) (1).

Si cet établissement public est autorité organisatrice des transports urbains (AOTU), il doit également élaborer des OAP tenant lieu de plan de déplacements urbains (PDU).

Le décret n° 2012-290 du 29 février 2012 a ventilé les différents éléments du PLH et du PDU dans les composantes du PLU (rapport de présentation, projet d’aménagement et de développement durables, orientations d’aménagement et de programmation, règlement).

En pratique, l’élaboration d’un document intégré faisant office de PLU, de PLH et de PDU a posé des difficultés susceptibles de dissuader certains EPCI de s’engager dans l’élaboration d’un PLUi.

Les réflexions se sont axées sur la recherche de leviers permettant de mieux traduire les politiques de l’habitat et des déplacements dans le PLUi, et donc de renforcer son opérationnalité et son efficacité.

I.2. Les nouveautés apportées au dispositif

Le dispositif prévu consiste à recentrer les Orientations d’Aménagement et de Programmation (OAP), lesquelles exposent la manière dont la collectivité souhaite mettre en valeur, réhabiliter, restructurer ou aménager des quartiers ou des secteurs de son territoire, sur les dispositions ayant un impact direct sur l’urbanisme et l’aménagement.

Rappelons qu’initialement, il était envisagé de faire peser l’obligation de réaliser un PLU tenant lieu de PLH sur les métropoles, les communautés urbaines, les communautés d’agglomération, et les communautés de communes de plus de 50.000 habitants.

Or, le texte adopté prévoit que lorsqu’il est élaboré par un établissement public de coopération intercommunale ou par la Métropole de Lyon, le PLU peut tenir lieu de PLH. Dans ce cas, il poursuit les objectifs énoncés à l’article L. 302-1 du Code de la construction et de l’habitation

Et lorsque le PLU est élaboré par un établissement public de coopération intercommunale compétent qui est autorité organisatrice au sens de l’article L. 1231-1 du Code des transports, le PLU peut tenir lieu de plan de déplacements urbains. Dans ce cas, il poursuit les objectifs énoncés aux articles L. 1214-1 et L. 1214-2 du même Code. Il comprend le ou les plans de mise en accessibilité de la voirie et des espaces publics, prévus à l’article 45 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, applicables sur le territoire de l’établissement public de coopération intercommunale.

Enfin, concernant le cas spécifique des communautés de communes de moins de 30.000 habitants, dans l’hypothèse où elles élaborent un plan local d’urbanisme tenant lieu de programme local de l’habitat ou lorsqu’un établissement public de coopération intercommunale qui n’est pas soumis à l’obligation d’élaborer un plan de déplacements urbains en application de l’article L. 1214-3 du Code des transports élabore un plan local d’urbanisme tenant lieu de plan de déplacements urbains, ce plan comprend un programme d’orientations et d’actions (POA) et, si nécessaire, des dispositions relatives à l’habitat ou aux transports et déplacements dans les orientations d’aménagement et de programmation.

La loi ALUR prévoit que désormais l’ensemble du PLUi tient lieu de PLH et de PDU.

Les OAP sont recentrées sur les dispositions ayant un impact sur l’urbanisme et l’aménagement ; par ailleurs, une nouvelle composante est créée : le programme d’orientations et d’actions (POA). Celui-ci, qui doit nécessairement figurer dans le PLUi lorsqu’il tient lieu de programme local de l’habitat ou de plan de déplacements urbains, comprend tout élément d’information ou toute mesure nécessaire à la mise en œuvre de la politique globale de l’habitat et des transports et déplacements.

Le POA n’est pas opposable aux autorisations d’urbanisme et pourra évoluer conformément aux procédures définies par le Code de l’urbanisme.

II/ La refonte du contenu du règlement du PLU

II.1. Un règlement remanié et toiletté

La loi ALUR procède à une refonte totale des dispositions relatives au contenu du règlement.

Ces nouvelles règles, qui sont applicables aux règlements des PLU communaux comme intercommunaux, méritent d’être exposées ci-après.

Outre la présentation du règlement qui sera remaniée, plusieurs règles ont fait l’objet de modifications importantes.

En premier lieu, la possibilité de recourir à la pratique du pastillage, qui permet au règlement, dans les zones naturelles, agricoles ou forestières, de délimiter des secteurs de taille et de capacité d’accueil limitées dans lesquels des constructions peuvent être autorisées, est plus fortement encadrée par la loi ALUR.

La loi Grenelle II, avait reconnu cette faculté aux auteurs du PLU, mais l’avait conditionnée par le fait d’une part, que les constructions ne portent atteinte ni à la préservation des sols agricoles et forestiers ni à la sauvegarde des sites, milieux naturels et paysages et, d’autre part, que le règlement précise les conditions de hauteur, d’implantation et de densité des constructions permettant d’assurer leur insertion dans l’environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone.

Le nouvel article L. 123-1-5 du Code de l’urbanisme prévoit désormais qu’outre les « constructions », les aires d’accueil et terrains familiaux locatifs destinés à l’habitat des gens du voyage, ainsi que les résidences démontables constituant l’habitat permanent de leurs utilisateurs peuvent bénéficier de ces dispositions.

Désormais, ces secteurs ne peuvent être délimités qu’« à titre exceptionnel » et seulement après que la Commission départementale de la consommation des espaces agricoles a rendu un avis, celui-ci ne présentant toutefois que le caractère d’un avis simple.

Il appartient en outre au règlement de fixer les conditions relatives aux raccordements aux réseaux publics, ainsi que les conditions relatives à l’hygiène et à la sécurité auxquelles les constructions, les résidences démontables ou les résidences mobiles doivent satisfaire.

Il est également prévu que, en dehors des secteurs de taille et de capacité d’accueil limités, dans les zones naturelles, agricoles ou forestières, si les constructions existantes à la date de la promulgation de la loi ALUR peuvent faire l’objet d’une adaptation ou d’une réfection, aucun changement de destination de ces constructions ne puisse être opéré.

Ce principe comporte toutefois des exceptions.

La loi Urbanisme et habitat avait en effet admis que dans les zones agricoles, le règlement puisse désigner les bâtiments agricoles qui, en raison de leur intérêt architectural ou patrimonial, peuvent faire l’objet d’un changement de destination, dès lors que ce dernier ne compromet pas l’exploitation agricole. Ces dispositions sont maintenues et la loi ALUR reconnaît également la possibilité pour le règlement d’autoriser les extensions limitées des bâtiments, sous les mêmes réserves. Elle introduit une contrainte supplémentaire puisque ces changements de destination ou autorisations de travaux sont en tout état de cause soumis à un avis conforme de la Commission départementale de la consommation des espaces agricoles.

Un dispositif similaire est également prévu en ce qui concerne les constructions existantes en zone naturelle, le règlement pouvant autoriser que certaines d’entre elles fassent l’objet d’un changement de destination après avis conforme de la Commission départementale de la nature, des paysages et des sites.

II.2. La suppression du COS

En deuxième lieu, la loi ALUR procède à la suppression du coefficient d’occupation des sols qui est le rapport exprimant le nombre de mètres carrés de surface de plancher ou le nombre de mètres cubes susceptibles d’être construits par mètre carré de sol. En d’autres termes, la surface de plancher constructible s’obtient ainsi en multipliant le COS par la surface du terrain d’assiette du permis.

Le COS étant jusqu’alors facultatif, les auteurs du PLU disposaient ainsi de la possibilité de limiter la constructibilité des terrains sur un territoire donné. À la différence des règles d’emprise, de hauteur et d’implantation, le COS ne permet toutefois pas de régir la volumétrie et la morphologie des constructions à réaliser.

Les collectivités ne pourront donc plus recourir au COS pour limiter la densité constructible sur leur territoire. Sa suppression devrait permettre, selon le législateur, d’assurer la densification des villes et de prévenir l’étalement urbain.

La disparition du COS entraîne, corrélativement, la suppression d’un certain nombre de dispositions relatives à la gestion de la densité constructible (2).

En troisième lieu, sont supprimées les dispositions qui permettaient au règlement de fixer la superficie minimale des terrains constructibles.

La loi ALUR prévoit la possibilité pour le PLU de règlementer la surface de plancher des constructions en fonction de la taille des terrains, si la préservation de la qualité des boisements et espaces verts le justifie, dans des zones très spécifiques.

II.3. Un PLU plus écologique et favorisant la mixité fonctionnelle

Dispositions destinées à favoriser la densification. Le contenu du rapport de présentation est par ailleurs complété dans la mesure où, afin de satisfaire l’objectif de densification du territoire, ce dernier doit en effet désormais « analyser la capacité de densification et de mutation de l’ensemble des espaces bâtis en tenant compte des formes urbaines et architecturales » .

Sur la base de cette analyse, une véritable stratégie foncière doit être définie. Le rapport de présentation devra exposer les dispositions qui favorisent la densification de ces espaces ainsi que la limitation de la consommation des espaces naturels, agricoles ou forestiers.

Le PLU doit également présenter quelle a été la consommation de ces espaces au cours des dix années précédant l’approbation du plan ou depuis la dernière révision du document d’urbanisme.

Limitation des surfaces consacrées aux aires de stationnement. S’agissant des obligations en matière d’aires de stationnement, la loi ALUR fait la distinction entre les places concernant les véhicules motorisés et celles destinées aux vélos. Le règlement doit ainsi fixer les obligations en matière de stationnement des vélos, pour les immeubles d’habitation et de bureaux.

Le PLU doit également prévoir des dispositions permettant de limiter les surfaces occupées par les aires de stationnement. A cette fin, la loi ALUR impose que le rapport de présentation dresse un inventaire des capacités de stationnement et expose quelles sont les possibilités de mutualisation de ces capacités.

Désormais, les surfaces affectées aux aires de stationnement ne pourront excéder un plafond correspondant aux trois quarts de la surface de plancher de ces bâtiments, le PLU pouvant néanmoins relever ce plafond à un niveau compris entre les trois quarts et la totalité de la surface de plancher affectée au commerce.

Ces dispositions devraient inciter les opérateurs à réaliser des parkings en ouvrage (en sous-terrain ou en silo) et ainsi limiter la consommation d’espace.

Dispositif encadrant l’ouverture à l’urbanisation des zones. Le législateur, faisant le constat qu’un certain nombre de zones ouvertes à l’urbanisation étaient souvent surdimensionnées, et ne correspondaient pas à l’usage des terrains ni à la réalité des projets d’aménagement envisagés, fixe des règles destinées à encadrer de façon plus stricte le dispositif existant.

La loi ALUR soumet ainsi de façon automatique à la procédure de révision, définie par l’article L. 123-13 du Code de l’urbanisme, l’ouverture à l’urbanisation d’une zone à urbaniser qui, dans les neuf ans suivant sa création, n’a pas été ouverte à l’urbanisation ou n’a pas fait l’objet d’acquisitions foncières significatives. L’on peut ici imaginer que cette dernière notion aux contours imprécis fera l’objet de discussions devant le Juge administratif.

De la même manière, en cas de modification d’une zone pour ouvrir celle-ci à l’urbanisation, l’organe délibérant compétent devra prendre une délibération motivée justifiant de l’utilité de cette ouverture au regard des capacités d’urbanisation encore inexploitées dans les zones déjà urbanisées et de la faisabilité opérationnelle d’un projet dans ces zones.

Céline LHERMINIER, Avocat à la cour

(1) Notons ici que l’alinéa 5 de l’ancien article L. 123-1 du Code de l’urbanisme ajouté par l’article 30 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion prévoyait d’ores et déjà que les plans locaux d’urbanisme devaient intégrer les dispositions des programmes locaux de l’habitat définis aux articles L. 302-1 à L. 302-4 du Code de la construction et de l’habitation et devaient tenir lieu de programmes locaux de l’habitat

(2) Telles que le contrôle de la constructibilité résiduelle ou le dispositif dit de « transfert de COS »