le 12/02/2015

Modification du droit des conventions réglementées et organismes d’HLM

L’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés, prise en application de l’article 3 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises, apporte d’importantes évolutions au régime de conclusion et de suivi des conventions réglementées.
Une attention particulière doit être portée à ces conventions lorsqu’elles sont conclues par des organismes d’HLM, quelle que soit leur nature, SA Hlm ou office.
Certaines conventions conclues par les organismes d’HLM, lorsqu’elles concernent directement ou indirectement leurs dirigeants ou leurs actionnaires, doivent en effet suivre une procédure particulière nécessitant leur approbation préalable par le conseil d’administration ou de surveillance de l’organisme, mais également leur suivi au cours de leur exécution, sous le contrôle, le cas échéant, des commissaires aux comptes et de l’assemblée générale.
L’ordonnance précitée vient, d’une part, apporter une simplification concernant les conventions conclues avec une filiale à 100 % et, d’autre part, renforcer les obligations des conseils d’administration dans l’approbation des conventions nouvelles, dans le suivi des conventions antérieurement conclues, ainsi que dans les mentions à apporter dans le rapport de gestion des sociétés anonymes.

I – Les modifications issues de l’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014

Ces modifications, d’application immédiate, concernent quatre points qui devront amener les praticiens à faire évoluer leur suivi des conventions réglementées dans les sociétés anonymes, à l’occasion notamment de la préparation des prochaines assemblées générales annuelles.

1. L’exclusion du périmètre des conventions réglementées des conventions conclues avec une filiale à 100%

Les conventions conclues entre une société-mère et sa filiale à 100%, toutes deux sociétés anonymes, seront désormais exclues du champ d’application des conventions réglementées, tant pour  la société-mère que pour sa filiale.
Cette exclusion est réalisée par un élargissement de la définition des conventions libres, précisées aux articles L. 225-39 et L. 225-87 du Code de commerce.
On relèvera toutefois d’emblée que cette disposition dite de simplification est déjà critiquée par la doctrine, en ce qu’elle fait échapper ces conventions au contrôle non seulement des actionnaires, mais également du conseil d’administration ou de surveillance.

2. L’obligation pour les conseils d’administration et de surveillance de motiver les décisions autorisant la conclusion de conventions

Cette nouvelle obligation, inscrite désormais aux articles L. 225-38 et L. 225-86 du Code de commerce, prévoit désormais que les conseils d’administration et de surveillance devront motiver leur autorisation préalable « en justifiant de l’intérêt de la convention pour la société, notamment en précisant les conditions financières qui y sont attachées ».
Cette nouvelle obligation vient confirmer les recommandations antérieures, la soumission à l’autorisation préalable d’une convention réglementée devant être accompagnée de la présentation du contexte et des conditions financières de la convention.
En effet, les articles R. 225-31 et R. 225-58 du Code de commerce précisaient déjà que le rapport des commissaires aux comptes devait contenir non seulement les « modalités essentielles des conventions » mais également « le cas échéant, toutes autres indications permettant aux actionnaires d’apprécier l’intérêt qui s’attachait à la conclusion des conventions et engagements analysés ». Or, ces éléments d’appréciation devaient être relevés par les commissaires aux comptes dans les procès-verbaux des conseils d’administration ayant statué sur l’approbation préalable desdites conventions.
Une plus grande attention dans la rédaction des délibérations des conseils devra donc être apportée sur ce sujet, le conseil devant désormais motiver son autorisation préalable.

3. L’obligation pour les conseils d’administration et de surveillance de procéder au réexamen annuel des conventions antérieurement autorisées et s’étant poursuivies au cours du dernier exercice

Cette troisième nouvelle obligation, issue de la pratique des sociétés cotées notamment, rend désormais obligatoire l’examen annuel par le conseil d’administration ou de surveillance des conventions antérieurement approuvées et s’étant poursuivies au cours du dernier exercice.
Ces conventions devaient déjà faire l’objet d’une information spécifique du commissaire aux comptes par le président du conseil d’administration ou de surveillance dans les trente jours de la clôture de l’exercice (art. R. 225-30, alinéa 2 et R.225-57, alinéa 2 du Code de commerce).
Il s’agira désormais de faire examiner ces conventions par le conseil d’administration ou de surveillance chaque année et de transmettre lesdites conventions au commissaire aux comptes pour les besoins de l’établissement de son rapport à l’assemblée générale.
Si, à l’occasion de cet examen, le conseil constate que la convention ne trouve pas lieu à s’appliquer ou doit être renouvelée, il conviendra de procéder à l’autorisation préalable nécessaire à sa résiliation ou à son renouvellement dans les formes et conditions requises par les articles L. 225-38 et L. 225-87 du Code de commerce.
A ce sujet, il est souligné que le Rapport au Président de la République rappelle que « les conventions à durée déterminée ou qui font l’objet d’une reconduction tacite, devront, conformément au droit positif, être soumises à leur terme à une nouvelle autorisation du conseil d’administration ou du conseil de surveillance ».
En pratique, ce réexamen par les conseils d’administration et les conseils de surveillance viendra effectivement faciliter les travaux du commissaire aux comptes pour l’établissement de son rapport.
Il permettra, par ailleurs, de conforter les missions du Président du conseil d’administration, sur qui reposait l’obligation de procéder au suivi de ces conventions déjà autorisées.

4. L’obligation d’information des actionnaires sur les conventions conclues entre une filiale et un dirigeant

L’ordonnance du 31 juillet 2014 crée une nouvelle mention obligatoire du rapport de gestion présenté par le conseil d’administration ou le directoire et dont le contenu est défini aux articles L. 225-102 et suivants du Code de commerce.
En effet, ce rapport de gestion devra désormais mentionner « les conventions intervenues, directement ou par personne interposée, entre, d’une part et selon le cas, l’un des membres du directoire ou du conseil de surveillance, le directeur général, l’un des directeurs généraux délégués, l’un des administrateurs ou l’un des actionnaires disposant d’une fraction des droits de vote supérieure à 10%, d’une société et, d’autre part, une autre société dont cette dernière possède, directement ou indirectement, plus de la moitié du capital ». Le texte exclut de cette obligation les conventions courantes et normales.
Dès lors, les conventions conclues entre une filiale à 50% et l’un des dirigeants ou actionnaire significatif d’une société-mère seront désormais soumises à cette nouvelle obligation de mention dans le rapport annuel de gestion de la société-mère. Cette nouvelle obligation viendra bien entendu s’ajouter à la procédure prévue aux articles L. 225-38 et L. 225-86 du Code de commerce qui devra être suivie dans la filiale et, le cas échéant, dans la société grand-mère si celles-ci sont des sociétés anonymes.

II – Les conséquences de l’adoption de ces nouvelles dispositions pour les organismes d’HLM

1. Application aux sociétés d’habitations à loyer modéré

Ces nouvelles dispositions, d’application immédiate, sont applicables aux sociétés d’habitations à loyer modéré comprenant les sociétés anonymes d’habitations à loyer modéré (SA d’HLM) ainsi que les sociétés coopératives d’habitations à loyer modéré (SCP d’HLM et SCIC HLM).
Il est rappelé que l’article L. 423-11 du Code de la construction et de l’habitation précise à cet égard que « les sociétés anonymes d’habitations à loyer modéré soumettent à l’autorisation préalable de leur conseil d’administration ou de leur conseil de surveillance les conventions visées aux articles L. 225-38 à L. 225-42 ou aux articles L. 225-86 à L. 225-90 du Code de commerce, dans les conditions prévues par ces articles ».

2. Le cas des offices publics de l’habitat
Les offices publics de l’habitat sont des établissements publics locaux à caractère industriel et commercial.
Cependant, les articles L. 423-10 et suivants du Code de la construction et de l’habitation les ont soumis à une procédure spécifique de conventions réglementées.
Le champ d’application de ces conventions couvre toute convention conclue directement ou par personne interposée entre l’organisme et un de ses dirigeants, un de ses salariés, un de ses administrateurs ou une personne morale dans laquelle un de ses dirigeants, un de ses salariés, un de ses administrateurs exerce des fonctions d’administrateur, de membre du conseil de surveillance ou de dirigeant.
Les conventions portant sur des opérations courantes et conclues à des conditions normales sont exclues de ces dispositions par l’article L. 423-11-1 du Code de la construction et de l’habitation.
La convention visée doit être soumise à l’approbation du conseil d’administration de l’Office. A défaut, la convention peut être annulée.
Ainsi, si les modifications évoquées ci-avant ne sont pas directement applicables aux offices, il pourrait s’avérer opportun pour ces derniers de se conformer, dans les procédures d’adoption des conventions réglementées, aux prescriptions désormais imposées aux sociétés anonymes et, notamment, de motiver les décisions autorisant la conclusion desdites conventions.
Il pourrait être également opportun de s’inspirer de l’obligation d’examen annuel par le conseil d’administration des conventions réglementées s’étant poursuivies au cours de l’exercice précédent, afin d’améliorer l’information du conseil d’administration des offices.
Le suivi des conventions réglementées constitue un enjeu important de bonne gouvernance des sociétés et offices HLM. Ce suivi permet d’assurer la transparence nécessaire à ces conventions qui couvrent non seulement celles conclues directement ou indirectement avec leurs dirigeants mais, également, celles conclues avec leurs actionnaires. Dans un contexte nouveau issu des directives européennes « Marchés » du 26 février 2014 favorables aux coopérations et à la mutualisation des moyens et des compétences des organismes, ces conventions sont nombreuses et nécessitent donc un suivi attentif.

Anne-Christine FARCAT, Avocat à la Cour