le 07/06/2017

Gestion des sites et sols pollués : les nouvelles instructions des services de l’Etat

Instruction interministérielle n° DGS/EA1/DGPR/DGAL/2017/145 du 27 avril 2017

Au mois d’avril dernier, les services du Ministère de l’environnement, de l’énergie et de la mer ont adressé aux Préfets deux instructions visant à organiser la gestion des sites et sols pollués du territoire : la circulaire du 19 avril 2017, relative à la mise à jour des textes méthodologiques de gestion des sites et sols pollués de 2007, et l’instruction interministérielle n° DGS/EA1/DGPR/DGAL/2017/145 du 27 avril 2017, relative à la gestion des sites et sols pollués et de leurs impacts nécessitant la mise en œuvre de mesures de gestion sanitaire et d’étude de santé et/ou de mesures de gestion sanitaire des productions animales et végétales.

En premier lieu, la circulaire du 19 avril 2017 présente la récente mise à jour des guides méthodologiques ministériels relatifs à la gestion des sites et sols pollués. Ces guides se présentent sous la forme, d’une part, d’une Introduction à la méthodologie nationale de gestion des sites et sols pollués et, d’autre part, de la Méthodologie nationale de gestion des sites et sols pollués.

Les guides précédents, élaborés en 2007, auxquels les nouveaux guides se substituent, excluaient un certain nombre de réformes intervenues en la matière ces dix dernières années. Plus particulièrement n’étaient pas intégrées les évolutions législatives intervenues depuis l’ordonnance n° 2010-1579 du 17 décembre 2010 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des déchets, qui donne aux sols pollués excavés un statut de déchets, ou encore depuis la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) qui crée les secteurs d’informations des sols – SIS (article L. 125-6 C. env.) ainsi que la procédure de changement d’usage (article L. 556-1 C. env.). Les guides mis à jour permettent désormais de prendre en compte ces réformes dans la gestion des sites et sols pollués.

Pour autant, la méthodologie repose sur les mêmes principes que précédemment. On y retrouve donc, de manière renforcée :

  • « la distinction entre les pollutions actuelles et futures, appelées à être gérées selon un principe de prévention et réparation, et les pollutions historiques, héritage collectif issu de notre passé industriel, pour lesquelles s’applique le principe de gestion du risque selon l’usage ;
  • l’évaluation du risque fondée sur la réalité des usages, la connaissance des milieux d’exposition et l’emploi des valeurs de gestion transcrivant les objectifs nationaux de santé publique ;
  • le principe de spécificité impliquant une appréciation au cas par cas, au plus près des réalités effectives de terrain [excluant ainsi l’idée d’une gestion des risques au regard d’une pollution définie a priori;
  • enfin le rôle central donnée à l’analyse de la faisabilité technique et l’approche coût/avantage dans la démarche de gestion».

A cette fin, les deux outils bien connus de l’Interprétation de l’Etat des Milieux (IEM), qui comporte notamment l’évaluation quantitative des risques sanitaires (EQRS), et du Plan de gestion (PG) sont détaillés dans le guide, complétés non seulement des réformes intervenues depuis 10 ans mais également des nombreux retours d’expériences, sollicités pour leur élaboration, ainsi que l’évolution des connaissances sur les méthodes utilisées.

Les services du Ministères de l’environnement préconisent alors aux préfets de se référer à cet « état de l’art consolidé » dans le domaine des sols pollués et de largement diffuser la méthodologie proposée ainsi que de s’y référer pour l’instruction de dossiers de sites relevant ou non du régime des installations classées pour l’environnement.

En second lieu, les services de l’Etat ont publié une instruction pour la gestion des « sites complexes », c’est-à-dire des sites pollués qui nécessitent la mise en œuvre de mesures  de gestion sanitaire et d’étude de santé et/ou de mesures de gestion sanitaire des productions animales et végétales. Cette instruction a été rédigée à la suite d’un recensement des sites et sols pollués (majoritairement constitués de sites ICPE), lancé en avril 2016, et au regard des retours d’expérience réalisés dans le cadre de ce recensement.

Après avoir rappelé les principes applicables à la gestion de ces sites, tels qu’énoncés dans les guides méthodologiques mis à jour, précités, l’instruction énumère les préconisations et actions issues du recensement : la mise en place d’une coordination interministérielle pour accélérer l’appui technique des services de l’Etat aux préfectures dans la gestion des dossiers difficiles ; la mobilisation de toutes les administrations compétentes autour du préfet au moment de la gestion des dossiers (DREAL, ARS, DRAAF, DDT, DD(CS)PP notamment) ; la révision du planning des études sur les anciens sites miniers ; la mise à jour des bases de données relatives aux sites et sols pollués (BASIAS et BASOL par exemple).

L’instruction évoque encore la procédure d’intervention de l’ADEME, prévue par la circulaire du 26 mai 2011, pour la mise en sécurité des sites. Elle rappelle également les pouvoirs de police dont disposent les préfets en matière d’ICPE ou encore en matière minière. La prise en compte des SIS, issus de la loi ALUR, est également préconisée de même que la nécessité de gérer les sites au regard des objectifs d’aménagements du terrain, en application de l’article L. 556-1 du Code de l’environnement.

Encore doit-on noter, parmi les préconisations, les mesures visant à intégrer les problématiques de santé publique et plus particulièrement la prise en compte de la protection des données de santé pour mener les investigations environnementales complémentaires (l’exemple est pris des dépistages de saturnisme par mesure du plomb dans le sang qui peuvent être menés par l’ARS) ou encore l’utilisation possible de procédures liées à l’insalubrité. Enfin, la nécessité d’une communication transparente et proactive à l’égard des élus et de la population est mise en avant.

Clémence du ROSTU, Avocat à la cour