le 30/08/2018

Un Département peut-il imposer au bénéficiaire du Revenu de Solidarité Active des actions de bénévolat ?

CE, 15 juin 2018, n° 411630

Le Département du Haut-Rhin a approuvé une délibération instaurant le principe du versement revenu de solidarité active (RSA) en contrepartie de la réalisation d’actions de bénévolat, auprès d’une association ou d’une collectivité, à raison d’une moyenne de sept heures par semaine.

Estimant que le Département était incompétent pour définir une nouvelle condition d’attribution du RSA, aucune disposition du Code de l’action sociale et des familles (CASF) ne le prévoyant, le Préfet du Haut-Rhin a déféré au Tribunal administratif ladite délibération.

Pour mémoire, les articles L. 262-1 et suivants du CASF décrivent les modalités d’octroi et de financement du RSA. L’article L. 262-35 du CASF prévoit que le bénéficiaire du RSA conclut avec le Département un contrat qui énumère leurs engagements réciproques en matière d’insertion professionnelle et précise les actes positifs et répétés de recherche d’emploi que le bénéficiaire s’engage à accomplir.

Le Tribunal administratif de Strasbourg et la Cour administrative d’appel de Nancy ont annulé cette délibération au motif que le bénéficiaire du RSA ne peut se voir proposer des actions de bénévolat au titre de son insertion (TA de Strasbourg, 5 octobre 2016, n° 1601891 ; CAA de Nancy, 18 avril 2017, n°s 16NC02674, 16NC02675).

Par un arrêt du 15 juin 2018, le Conseil d’Etat a cassé la décision de la Cour administrative d’appel de Nancy. Le Conseil d’Etat considère en effet que le Département peut prévoir des actions de bénévolat, de manière personnalisée, dès lors qu’elles contribuent à une meilleure insertion professionnelle du bénéficiaire et restent compatibles avec la recherche d’emploi.

Au surplus, si le Conseil d’Etat considère que les dispositions de l’article L. 262-35 du CASF n’interdisent pas à un département de prévoir, dans le contrat conclu avec une personne bénéficiaire du RSA, des actions de bénévolat, il pose cependant trois conditions : le contrat est élaboré de façon personnalisée, les actions de bénévolat contribuent à une meilleure insertion du bénéficiaire et restent compatibles avec la recherche d’emploi.

Si le bénéficiaire vient à ne pas respecter ce contrat, le Président du Conseil départemental pourra ainsi décider de suspendre le versement de son RSA.

Il convient de noter que le Conseil d’Etat différencie deux catégories de bénéficiaires : les bénéficiaires disponibles pour occuper un emploi ou créer leur propre activité et ceux, visés à l’article L. 636-36 du CASF, qui rencontrent des difficultés faisant l’obstacle à leur engagement dans une démarche de recherche d’emploi. Ces derniers ne sont pas concernés par la décision et donc par la possibilité de voir le versement de leur allocation conditionné à des heures de bénévolat.

L’affaire a été renvoyée à la Cour administrative d’appel de Nancy qui doit statuer sur la légalité de la délibération déférée, en tenant compte des conditions posées par le Conseil d’Etat.