le 15/03/2018

Un agent contractuel recruté illégalement par une commune comme directeur général des services ne peut pas être licencié pour perte de confiance

CAA Bordeaux, 22 février 2018, Monsieur B. c/ Commune de Kourou, req. n° 17BX02310

Les emplois fonctionnels des collectivités territoriales sont les emplois de direction dont les modalités d’accès et de cessation d’occupation diffèrent de celles des autres emplois.
C’est à titre dérogatoire que l’occupation d’un tel emploi par un agent contractuel est envisageable.
A cet effet, l’article 47 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 fixe de manière exhaustive la liste de ces emplois et plus précisément, s’agissant des emplois des communes comme en l’espèce, il détermine que seuls ceux de directeur général des services des communes de plus de 80 000 habitants et de directeur général adjoint des communes de plus de 150 000 habitants peuvent être occupés par des agents contractuels.
Il s’en infère que la commune de Kourou, en Guyane, qui comptait alors 26 000 habitants, ne pouvait recruter un agent contractuel pour occuper les fonctions de directeur général des services.
Ce fût cependant le cas, sans que le Préfet ne trouve étonnamment à y redire, M. B. ayant été recruté le 2 juin 2014 par un contrat de trois ans sur le fondement de l’absence de candidature de fonctionnaire et des besoins du service subséquents (cf. article 3-3, 2° de la loi du 26 janvier 1984 précitée), après avoir assuré l’intérim de ces fonctions durant six mois.
Mais dix-huit mois plus tard le Maire décidait de procéder à son licenciement en se fondant sur la perte de confiance, motif habituellement retenu pour mettre un terme à l’occupation de ces emplois, bien que répondant à des conditions notamment de démonstration des faits ayant conduit à ce constat.
L’agent contractuel devait attaquer cette décision, et ayant obtenu gain de cause devant le Tribunal administratif de la Guyane qui a annulé le licenciement et enjoint la commune de le réintégrer jusqu’au terme de son contrat, c’est cette dernière qui a saisi la Cour administrative d’appel de Bordeaux.
La Cour, par des considérants didactiques, a rappelé dans un premier temps que les communes ne pouvaient recruter des agents contractuels pour occuper des emplois fonctionnels ne figurant pas sur la liste de l’article 47 précité, et dans un second temps, tirant les conséquences de l’absence de qualification d’emploi fonctionnel, a appliqué la règlementation propre au licenciement des agents contractuels, à savoir le décret n° 88-145 du 15 février 1988.
Or, ce décret ne permet pas qu’un agent contractuel, hors article 47 donc, soit licencié au motif d’une perte de confiance, motif strictement réservé aux emplois fonctionnels.
Au passage, la Cour rappelle que si l’employeur insère des clauses contraires aux dispositions législatives ou réglementaires en vigueur dans un contrat, il ne peut les opposer par la suite à son cocontractant.
Dans ces conditions, la Cour a confirmé l’annulation du licenciement de l’agent contractuel, qui pourra ainsi éventuellement engager un contentieux indemnitaire, à défaut d’avoir initialement accompagné son recours de telles conclusions.
Si la solution donnée par la Cour est logique, et ne souffre d’aucune critique, on ne peut cependant s’empêcher de songer que la commune, qui ne recevrait pas de candidature de fonctionnaires pour occuper un tel poste, se trouverait fort dépourvue au moment de recruter un directeur général des services si on ne considère pas qu’il s’agit là d’un besoin du service…