le 14/02/2017

Le régime juridique des tribunes réservées, dans les supports d’information générale des communes, à l’expression des élus n’appartenant à la majorité municipale, au nom de ce qui constitue aujourd’hui une liberté fondamentale recèle, décidément, encore bien des mystères

On croyait avoir peu à peu dégagé, grâce à la jurisprudence administrative, tout ce qu’il y avait à connaître de cet espace d’expression : il devait être ouvert dans tous les supports de communication de la commune, quels qu’ils soient : magazines, publication dès lors que ce dernier diffusaient, même ponctuellement, une information générale sur les réalisations et la gestion du conseil municipal.

On avait fini par mieux saisir les conditions d’une cohabitation possible de l’espace réservé à l’expression des élus d’opposition avec des tribunes d’élus de la majorité.

On savait qu’il n’était pas possible au maire en tant que directeur de publication d’exercer la moindre censure sur le contenu des articles, même s’ils n’avaient aucun rapport avec l’intérêt local ou étalaient une franche propagande électorale.

L’arrêt du Conseil d’État n° 387144 du 20 mai 2016 avait cependant précisé que le maire avait encore le pouvoir et même le devoir d’intervenir dans les cas où leur publication pourrait manifestement avoir des conséquences pénales.

On croyait avoir compris que le site internet municipal ne pouvait échapper à l’article L. 2121-27-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) dès lors qu’il contenait des informations générales sur la collectivité.

Mais voici qu’un arrêt de la Cour administrative de Nancy en date du 30 juin 2016 a considéré que la simple mise en ligne du bulletin municipal suffisait à satisfaire aux exigences de l’article L. 2121-27-1.

La multiplication des supports d’information n’entraînerait donc pas la multiplication des tribunes de l’opposition ? La solution donnée par la Cour dans cette affaire où les requérants exigeaient des tribunes d’opposition dans le site internet de Jarville-la-Malgrange, pourrait le laisser croire tant elle apparait fondée sur une considération élémentaire : pour elle, les communes ont un large pouvoir d’appréciation pour organiser l’espace d’expression des élus et la seule mise en ligne du bulletin municipal dans lequel figurait la tribune de l’opposition était suffisante.

En l’espèce, ce raisonnement pouvait sans doute paraître moins choquant dans la mesure où le contenu du site était particulièrement neutre et où la tribune d’opposition était aisément accessible.

Mais en raisonnant de façon si générale, sans paraître tenir compte des conditions concrètes  du cas examiné, la Cour a peut-être ouvert la voie à une remise en cause partielle des exigences légales dont la loi Démocratie n° 2002-276 du 27 février 2002 était porteuse.

A une période où il n’existe pas tant de sites internet municipaux offrant des tribunes libres d’opposition, cette décision pourrait ne pas contribuer à changer cette situation.

La seule mise en ligne du magazine sur le site entraîne, comme souvent, une illisibilité quasi complète des tribunes libres. Le Conseil d’Etat aura sans doute à faire connaître sa position à ce propos.