le 03/05/2018

Référé mesures utiles : pas d’injonction de réaliser les travaux à l’encontre d’une personne publique ayant refusé de les réaliser

CE, 11 avril 2018, Syndicat départemental de la Corse du Sud c/ Sté Bip Promo, n° 413098

Faisant application de sa jurisprudence habituelle en la matière, le Conseil d’Etat confirme, dans le cadre d’un litige ayant trait à la réalisation de travaux de raccordement d’habitations au réseau de distribution d’électricité, que le juge du référé mesures utiles ne peut prononcer, à l’encontre d’une personne publique, une mesure qui ferait obstacle à une décision administrative.
Dans la décision commentée, une société avait sollicité le raccordement au réseau électrique de quatre maisons qu’elle a fait édifier sur un terrain situé à Porto-Vecchio.
Le Syndicat départemental d’énergie de la Corse du Sud, autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité localement compétente, a alors indiqué à la société, par courrier électronique, qu’il subordonnait le raccordement au versement par celle-ci d’une somme de 23.363 euros à titre de participation à la réalisation de travaux de renforcement du réseau.
Ne s’estimant pas redevable de cette somme, la société avait alors saisi le juge des référés du Tribunal administratif de Bastia afin qu’il ordonne au syndicat, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-3 du Code de justice administrative, de réaliser les travaux à ses frais. Le juge des référés du Tribunal administratif avait fait droit à cette demande en condamnant le Syndicat département d’énergie de Corse du Sud à réaliser le raccordement en cause dans un délai de trois mois, sous astreinte de 200 euros par jour.
Saisi en cassation, le Conseil d’Etat annule l’ordonnance rendue par le juge des référés du Tribunal administratif et rejette la demande d’injonction présentée par la société.
Pour ce faire, le Conseil d’Etat rappelle qu’aux termes de l’article L. 521-3 du Code de justice administrative, « en cas d’urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l’absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative ».
Et, après avoir rappelé que peuvent être prononcées sur le fondement de cette disposition des « injonctions adressées à l’administration », le Conseil d’Etat relève toutefois, conformément à sa jurisprudence constante, qu’ « il ne saurait faire obstacle à l’exécution d’une décision administrative, même celle refusant la mesure demandée, à moins qu’il ne s’agisse de prévenir un péril grave ».
Or, au cas présent, le Conseil d’Etat relève que l’injonction prononcée par le juge des référés du Tribunal administratif de Bastia « fait obstacle à l’exécution de la décision administrative révélée par le courrier électronique du 20 juin 2017, méconnaissant ainsi les dispositions de l’article L. 521-3 ». La décision en question est celle susmentionnée par laquelle le Syndicat a indiqué à la société qu’il subordonnait la réalisation du raccordement au versement par celle-ci d’une somme de 23 363 euros.
Ainsi, si la voie du référé mesures utiles peut certes conduire au prononcé d’injonctions à l’encontre d’une personne publique, dès lors que la mesure sollicitée va directement à l’encontre d’une décision administrative, les conditions posées par l’article L. 521-3 du Code de justice administrative ne sont pas réunies, et les conclusions doivent être rejetées par le juge. Il incombe alors aux requérants de contester une telle décision par d’autres voies.