le 23/01/2020

QPC et retrait des décisions relatives à l’implantation d’antennes relais

CE, 11 décembre 2019, n° 434741

Par un arrêt en date du 11 décembre 2019, le Conseil d’Etat a rejeté la demande de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) formée à l’encontre des dispositions de l’article 222 de la loi du 23 novembre 2018 portant Evolution du Logement, de l’Aménagement et du Numérique (dite loi ELAN).

Pour rappel, l’article L. 424-5 du Code de l’urbanisme permet le retrait, dans un délai de trois mois, des décisions de non opposition ou d’autorisation d’urbanisme illégales. Passé ce délai, ces décisions ne peuvent être retirées que sur demande expresse de leur bénéficiaire.

L’article 222 loi du 23 novembre 2018 a introduit, à titre expérimental et jusqu’au 31 décembre 2022, une dérogation à cet article, en prévoyant que « les décisions d’urbanisme autorisant ou ne s’opposant pas à l’implantation d’antennes de radiotéléphonie mobile avec leurs systèmes d’accroche et leurs locaux et installations techniques ne peuvent pas être retirées ».

Dans cette affaire, la commune de Locronan avait procédé au retrait de l’arrêté du 13 février 2019 de non-opposition à la déclaration préalable de travaux délivrée à la société Orange portant sur l’implantation d’une installation de téléphonie mobile sur un terrain à Locronan.

La société Orange avait alors saisi le Tribunal administratif de Rennes, sur le fondement de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative, d’une demande de suspension de la décision de retrait, en faisant valoir que cette décision était contraire à l’article 222 précité.

C’est dans le cadre de cette instance que la commune de Locronan a contesté la constitutionnalité de ces dispositions.

Le Tribunal administratif de Rennes a sursis à statuer et a transmis la question au Conseil d’Etat.

Plusieurs griefs étaient soulevés par la Commune à l’encontre de ces dispositions :

En premier lieu, la commune de Locronan affirmait qu’elles portaient atteinte au principe d’égalité devant la loi, garanti par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC), dès lors que ces dispositions instauraient une différence de traitement entre les installateurs d’antennes de radiotéléphonie mobile et ceux d’autres équipements tels que les parcs photovoltaïques et les éoliennes.

Sur ce point, le Conseil d’Etat, rappelant sa jurisprudence constante aux termes de laquelle « le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit », relève que les dispositions contestées présentent un but d’intérêt général dès lors qu’elles permettent une couverture rapide de l’ensemble du territoire par les réseaux de téléphonie mobile à haut débit et à très haut débit.

Dès lors, le Conseil d’Etat considère que la différence de traitement résultant de ces dispositions, en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit, n’est pas contraire au principe d’égalité.

En deuxième lieu, la commune de Locronan soutenait que l’article 222 précité était contraire au principe de légalité des actes administratifs.

Le Conseil d’Etat estime que ce grief n’est pas recevable, le principe de légalité des actes administratifs n’étant pas « un droit ou une liberté » au sens de l’article 61-1 de la Constitution, et ne pouvant ainsi être utilement invoqué à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité.

En troisième et dernier lieu, était soulevé le grief tenant à la contrariété des dispositions contestées au droit au recours garanti par l’article 16 de la DDHC.

Le Conseil d’Etat écarte également ce grief, en rappelant que les dispositions contestées ne privent pas les personnes intéressées d’exercer un recours juridictionnel à l’encontre des décisions relatives à l’implantation des antennes de radiotéléphonie mobile.

Le Conseil d’Etat juge donc que cette question n’étant pas nouvelle, et ne présentant pas un caractère sérieux, il n’y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.