le 11/07/2018

Précisions sur les mentions à indiquer dans l’évaluation socio-économique des grandes infrastructures de transports

CE, 11 avril 2018, n° 401753

Rappelons que les grands projets d’infrastructures de transport doivent faire l’objet d’une évaluation socio-économique.

Les dispositions l’article R. 1511-4 du Code des transports prévoit que le dossier soumis à l’enquête publique doit comporter :

1° Une analyse des conditions et des coûts de construction, d’entretien, d’exploitation et de renouvellement de l’infrastructure projetée ;
2° Une analyse des conditions de financement et, chaque fois que cela est possible, une estimation du taux de rentabilité financière ;
3° Les motifs pour lesquels, parmi les partis envisagés par le maître d’ouvrage, le projet présenté a été retenu ;
4° Une analyse des incidences de ce choix sur les équipements de transport existants ou en cours de réalisation, ainsi que sur leurs conditions d’exploitation »

On rappellera que le Conseil d’Etat n’a pas de position formaliste quant à la présence dans l’une des pièces du dossier d’évaluation d’une des informations requises par les textes, dès lors que cette information figure, de toute façon, dans un des documents du dossier.

Dès lors, le caractère insuffisant du contenu de l’un des documents ne constitue pas nécessairement une irrégularité de nature à entacher la légalité du projet, à condition que les autres pièces du dossier permettent de donner au public les éléments d’information exigés par les dispositions en vigueur.

Ainsi, par exemple, la circonstance que certains coûts indirects n’aient pas été rappelés dans l’étude socio-économique est sans effet, dès lors que ces informations figurent dans le dossier d’enquête publique (CE, 29 avril 1998, Commune de Gonesse, n° 187801).

Le Juge administratif fait preuve d’une grande souplesse dans son appréciation de la présence et du contenu de l’évaluation socio-économique prévue par le code des transports.

Il importe que les impacts financiers du projet aient été analysés par le maître d’ouvrage, sans pour autant que chaque coût afférent au projet soit précisément détaillé.

S’agissant précisément de l’analyse des conditions de financement et, chaque fois que cela est possible, de l’estimation du taux de rentabilité financière, le juge administratif s’attache à examiner si, au regard des éléments analysés dans le cadre de l’évaluation socio-économique, et plus généralement du dossier d’enquête publique, le public a été suffisamment informé des coûts globaux induits par le projet et de son intérêt, en termes de bilan prévisionnel et de rentabilité financière, pour la collectivité publique (CE, 3 décembre 2010, Commune de Lattes, n° 306752).

Il a été jugé que l’absence de mention expresse de certains éléments et notamment de certains coûts ne suffit pas à établir que ceux-ci n’auraient pas été pris en compte par l’administration ni à vicier le dossier d’enquête publique (CE, 9 mai 2001, n° 218263 ; CE, 9 février 2004, Association Manche-Nature, n° 223121 ; voir également).

Toutefois, dans sa décision du 11 avril 2018, n° 401753, le Conseil d’Etat apporte des précisions sur les mentions qui doivent figurer dans l’évaluation socio-économique.

Il a jugé que les dispositions du Code des transports précitées « n’imposent pas que l’évaluation socio-économique qui accompagne le dossier d’enquête publique précise le régime juridique sous lequel sera réalisé le projet envisagé » et fasse la démonstration « qu’aucune solution alternative plus favorable à l’environnement ne pouvait être envisagée pour un coût raisonnable ».

En revanche, il a estimé que « l’évaluation économique et sociale doit comporter une description de la méthode de calcul des différents indicateurs permettant d’estimer la rentabilité du projet, parmi lesquels figure le taux de rentabilité interne économique et social ».

Dès lors, la décision de la Cour administrative d’appel de Nantes, qui avait estimé que l’absence d’indication du coût d’exploitation et de renouvellement et d’une estimation du taux de rentabilité financière de l’infrastructure projetée n’était pas de nature à caractériser une insuffisance de l’évaluation socio-économique, doit être appréciée avec prudence (CAA Nantes, 10 novembre 2009, Association Manche-Nature, n° 08NT02671).