le 24/01/2019

Précisions sur le point de départ du délai de recours contentieux ouvert à l’encontre d’un acte règlementaire pris par une collectivité locale

CE section, 3 décembre 2018, Ligue française pour la défense des droits de l'homme et du citoyen, n° 409667

Qu’il s’agisse des communes, des départements, des régions et des EPCI (voir respectivement les articles L. 2131-1, L. 3131-1, L. 4141-1 et L. 5211-3 du Code général des collectivités territoriales), il est prévu que leurs actes réglementaires « sont exécutoires de plein droit dès qu’il a été procédé à leur publication ou affichage ».

Ils doivent par ailleurs faire l’objet d’une publication au recueil des actes administratifs (les textes visant de manière générale les actes réglementaires pour les départements et régions et, pour les communes de 3.500 habitants et plus, le dispositif des délibérations à caractère réglementaire ainsi que les arrêtés municipaux à caractère réglementaire).

Il résulte de ces dispositions que le caractère exécutoire d’un acte réglementaire d’une collectivité locale est alternativement subordonné à sa publication ou à son affichage. Le simple affichage d’un acte réglementaire est donc de nature à permettre son entrée en vigueur, le Conseil d’Etat ayant indiqué que les dispositions relatives à l’obligation de publication au recueil des actes administratifs ne déroge pas au principe selon lequel « la formalité de publicité qui conditionne l’entrée en vigueur des actes réglementaires du maire peut être l’affichage » (CE, 25 juillet 2008, Société Francelot, n° 295799).

Par une décision du 3 décembre 2018, le Conseil d’Etat vient néanmoins indiquer que les formalités permettant l’opposabilité aux tiers des actes réglementaires, faisant courir le délai de recours contentieux de deux mois prévu par l’article R. 421-1 du Code de justice administrative, ne correspondent pas à celles de leur l’entrée en vigueur.

Le Conseil d’Etat a en effet jugé que l’affichage d’un acte réglementaire (à l’Hôtel du Département, en l’occurrence) ne suffit pas à faire courir le délai de recours contentieux contre cet acte. Il précise que sont de nature à faire courir ce délai :

  • soit la publication de l’acte au recueil des actes administratifs de la collectivité, dans les conditions prévues par le Code général des collectivités territoriales;
  • soit sa publication dans son intégralité sous forme électronique sur le site internet de la collectivité, dans des conditions garantissant sa fiabilité et sa date de publication, en complément de son affichage.

Il annule ainsi en partie l’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel, laquelle avait rejeté le recours de la Ligue des droits de l’homme pour tardiveté, en prenant en compte la date d’affichage à l’Hôtel de ville de l’arrêté contesté.

Au regard de la rédaction des dispositions précitées du Code général des collectivités territoriales, on peut pour le moins considérer qu’une telle solution n’allait pas de soi. D’ailleurs, quelques jours après cette décision, la Cour administrative d’appel de Lyon a, quant à elle, retenu la date d’affichage d’un arrêté municipal pour calculer le délai de recours contentieux et considérer que la requête soumise à son examen était tardive (CAA Lyon, 6 décembre 2018, Fédération départementale des randonneurs équestres de Haute-Savoie, n° 16LY04103). Mais les juridictions du fond devraient vraisemblablement appliquer prochainement cette nouvelle ligne jurisprudentielle, définie dans une décision rendue en section par la Haute juridiction administrative.

Les collectivités territoriales devront donc redoubler de prudence dans l’accomplissement de leurs formalités de publication si elles souhaitent que le délai de contestation de leurs actes réglementaires soit rapidement purgé.